Dépouilles conservées dans des conditions indignes : "Il y a une omerta sur cette horrible histoire"

l'université René Descartes à Paris  ©AFP - Photo12 / Gilles Targat
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l'université René Descartes à Paris ©AFP - Photo12 / Gilles Targat
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Le centre du don des corps de la faculté de Paris-Descartes a accueilli des milliers de dépouilles dans des conditions indignes. Laurent Bellini, dont la grand-mère avait choisi de faire don de son corps au même centre, a déposé plainte auprès du parquet de Paris. Il est l'invité de Mathilde Munos.

Un article de L'Express paru fin novembre dénonçait les "conditions indécentes" de conservation de dépouilles de "milliers de personnes ayant fait don de leur corps à la science" dans un centre spécialisé de l'Université Paris-Descartes. "Dans des locaux vétustes, les dysfonctionnements du centre et les problèmes de gestion ont eu une conséquence terrible: des dépouilles putréfiées, rongées par les souris, à tel point que certaines ont dû être incinérées sans avoir pu être disséquées", relatait l'hebdomadaire, décrivant des corps empilés. 

À la suite de cet article, une enquête a été ouverte par le pôle santé publique du parquet et confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) et début février, 24 familles ont porté plainte dans l'enquête ouverte par le parquet de Paris pour "atteinte à l'intégrité d'un cadavre".

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"Nous n'avons eu aucune explication, juste un silence assourdissant de la part de l'université" explique Laurent Bellini : "On a affaire à un mur. Quand une tombe est souillée, des voix politiques s'élèvent, mais là, rien, pas de réponse, on nous dit 'envoyez un mail', à des adresses qui ne répondent jamais, il y a une omerta sur cette horrible histoire", rappelant qu'au sein du ministère concerné siège maintenant l'ex-président de la faculté de Descartes, incriminée dans l'affaire.  

"Nous on ira jusqu'au bout", explique Laurent Bellini, qui ne veut pas de compromis : "On veut savoir et remettre à plat la législation de dons du corps". 

Il se rappelle aussi sa grand-mère, "morte à 104 ans en 2016, qui était un petit corps tout frêle, qui, dans ses derniers moment, disait qu'elle pourrait servir à quelque chose avec cette longévité". Mais après le don de son corps,  "je n'ai plus eu de nouvelles". Ce n'est qu'après avoir cherché et passé de nombreux coups de fil qu'il a appris que la crémation avait eu lieu et les cendres dispersées : "Aujourd'hui, quand je regarde ces photos, j'ai du mal à retrouver de belles images de ma grand-mère, c'est assez obsédant".  

"On apprend dans certains articles que certains corps auraient pu être monnayé et servir à des crash-tests"   

Il y a, dans la législation, une différence entre donner son corps à la science et à la médecine, mais Laurent Bellini explique "ce n'est pas indiqué aussi clairement dans le livret qui est donné". Le dons des corps n'est pas non plus fait dans les mêmes conditions selon les régions, estime-t-il : "Ma marraine avait fait ça en région PACA et ça ne se fait pas tout à fait comme ça. Pour ma grand-mère, ça été trop rapide, et on a même dû payer pour le transport du corps jusqu'au centre !".  

Quand ces dysfonctionnements se poursuivent plusieurs années, "ce n'est plus seulement de la négligence, c'est carrément du 'je m'en foutisme'", s'indigne-t-il : "On réclame l'ouverture d'une information, que l'affaire soit portée en justice, que les responsables soient connus. On veut voir comment les familles peuvent avoir accès à un rituel funéraire avec un peu de dignité."

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