La justice française dit non aux dispositifs de reconnaissance faciale dans les lycées

Le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du conseil régional de PACA qui autorisait la mise en place d'un portique de sécurité utilisant la reconnaissance faciale à l'entrée de deux lycées du Sud de la France. Il avance trois arguments : l'incompétence de la région, l'absence de garanties suffisantes et les finalités du dispositif.

 

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La justice française dit non aux dispositifs de reconnaissance faciale dans les lycées

Le tribunal administratif de Marseille a annulé, le 27 février 2020, la délibération du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) par laquelle la mise en place d'un dispositif de reconnaissance faciale dans deux lycées a été autorisée. Ainsi les juges donnent raison à l'association La Quadrature du Net, la Ligue des droits de l'Homme, la fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques des Alpes-Maritimes et le syndicat CGT Educ'Action à l'origine de la procédure. L'annulation repose sur trois arguments : l'incompétence de la région PACA, l'absence de garanties suffisantes et les finalités du dispositif.

 

L'incompétence de la région PACA

Premièrement, le tribunal administratif estime que la région PACA était incompétente pour initier cette expérimentation. En effet, seuls les chefs d'établissements sont compétents pour décider de l'installation des technologies de reconnaissance faciale dans leurs établissements. "La région PACA a excédé les compétences qu’elle tient des dispositions précitées de l’article L. 214-6 du code de l’éducation, quand bien même les établissements scolaires retenus auraient eu donné leur consentement", notent les magistrats.

 

Deuxièmement, "la région ne justifie pas avoir prévue des garanties suffisantes" quant à l'obtention du consentement des lycéens ou de leurs représentants légaux. En effet, le système de reconnaissance faciale mis en œuvre traite des données biométriques qui nécessitent le consentement préalable des personnes soumises à ce traitement. Le conseil régional prévoyait une simple signature pour recueillir l'approbation. Cette formalité n'apporte pas des garanties suffisantes d'après les juges.

 

Rien ne justifie le traitement de données biométriques

Enfin, le tribunal marseillais affirme que l'article 9 du Règlement général sur la protection des données (RGDP) a été violé. Ce texte interdit le traitement des données biométriques "aux fins d'identifier une personne physique de manière unique" sauf dans certains cas, comme la sauvegarde des intérêts vitaux ou des motifs d'intérêt public importants. Or "la région n’établit ni ne fait valoir que les finalités poursuivies s’attachant à la fluidification et la sécurisation des contrôles à l’entrée des lycées concernés constituent un motif d’intérêt public", déclare le tribunal. De plus, elle n'a pas justifié en quoi de simples badges ne suffisaient pas à remplir à ces objectifs.

 

C'est la première fois que la justice française se prononce sur la légalité d'un dispositif de reconnaissance faciale. La décision rendue le tribunal administratif était prévisible car quelques mois plus tôt, en octobre 2019, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) avait rendu un avis similaire. Le gendarme de la vie privée considérait que l'expérimentation n'était "ni nécessaire ni proportionnée".

 

Lutter contre les intrusions et les usurpations

Le "portique virtuel de sécurité" concerné devait être installé à l'entrée des établissements scolaires. A l'aide d'un badge ou d'un QR code, les élèves devaient passer par un portique composé d'un lecteur et d'une caméra. Ainsi, le dispositif capterait le visage de l'élève pour le comparer au profil numérique contenu dans le badge ou le QR code. En cas d'intrusion, un message devait être immédiatement envoyé aux personnes responsables de la sécurité.

 

Le projet avait été lancé en décembre 2018 par un vote formalisant un test d'un an dans le lycée Les Eucalyptus (Nice) et le lycée Ampère (Marseille). Le but poursuivi était de prévenir les intrusions et les usurpations d'identité et de réduire la durée des contrôles devant les établissements scolaires. "L'expérimentation a pour objectif d'évaluer la valeur ajoutée mais aussi les contraintes opérationnelles qu'impliqueraient la mise en œuvre d'un dispositif de comparaison faciale au sein d'un lycée", était-il écrit dans la présentation du projet par la région, document obtenu par Mediapart.

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