Pour la première fois, les éoliennes et le solaire ont fourni plus d’électricité que le charbon au sein de l’Union européenne. Une bonne nouvelle pour le climat mais c’est sans compter sur les importations d’électricité à partir de charbon depuis les pays frontaliers de l’UE. Rien qu’en 2019, elles ont représenté 26 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent du parc charbon de l’Italie. Un constat alarmant à la veille de la présentation de la loi climatique par la Commission européenne.

Les émissions de gaz à effet de serre ne s’arrêtent pas aux frontières ! Si l’Union européenne peut se réjouir de mettre progressivement au ban le charbon, c’est sans compter sur les importations réalisées depuis les pays frontaliers. Alors que la production d’électricité à partir de charbon a baissé de 24 % en 2019 au sein de l’UE, les importations européennes d’électricité produite hors UE à partir de charbon ont été multipliés par sept entre 2017 et 2019, passant de trois térawattheures à 21 térawattheures (importations nettes), selon une étude du think tank Sandbag (1).  
Ces importations ont représenté 26 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent du parc charbon de l’Italie, et un manque à gagner de 630 millions d’euros puisque ces émissions n’ont pas été visées par le marché carbone européen. “Les efforts des États membres de l’UE pour décarboner leurs systèmes énergétiques seront vains si l’énergie qu’ils importent est tout aussi sale” regrette Dan Dobre, militant chez Bankwatch Romania. “En 2019, la Roumanie a été un importateur net d’électricité sale pour la première fois en sept ans parce qu’elle n’a pas réussi à moderniser son système de production” précise-t-il.

Infog double jeu UE charbon VD



Parmi les autres pays concernés, la Finlande, qui se place en tête des importateurs d’électricité à base de charbon, en provenance de Russie. La Grèce s’approvisionne majoritairement en Turquie et en Macédoine, la Hongrie et la Roumanie font appel aux centrales à charbon d’Ukraine tandis que l’Espagne échange avec le Maroc. La péninsule ibérique a ainsi importé en 2019 de l’électricité deux fois plus polluante que celle produite sur son territoire national. 
Hausse des interconnexions
En cause, le marché carbone qui a renchérit la production d’électricité à partir de charbon au sein de l’UE et entraîné une vague de construction de centrales aux frontières, dans des pays où il n’existe pas de prix du carbone. Une tendance qui va se poursuivre avec une augmentation prévue de la capacité d’interconnexion entre l’UE et les pays frontaliers de 31 % (soit 57 gigawatts de nouvelles capacités), dont 15 % dans les Balkans occidentaux, là où se trouvent les centrales les plus polluantes d’Europe.  
“La solution n’est cependant pas trop compliquée : une taxe frontalière sur le carbone sur cette électricité importée. Grâce à cette nouvelle politique, nous pourrions étendre l’influence de l’UE en matière de réduction des émissions au-delà de ses frontières en aidant les pays voisins à produire plus rapidement une énergie propre” explique Chris Rosslowe, principal auteur du rapport. La nouvelle Commission, portée par Ursula von der Leyen, a évoqué la mise en place d’une telle taxe mais elle suscite déjà des réactions menaçantes, notamment outre-Atlantique.    
Concepcion Alvarez, @conce1
(1) Voir le rapport du think tank Sandbag

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