Coronavirus : pourquoi le confinement est efficace

Sans adopter des décisions aussi radicales que l’Italie, la France va fermer tous ses établissements scolaires et universitaires à partir du 16 mars. Une mesure de maintien des élèves à domicile jugée pertinente par les experts.

 Fermer les écoles « permet de casser les chaînes de contamination, car les enfants sont des vecteurs du virus », explique le professeur Philippe Juvin.
Fermer les écoles « permet de casser les chaînes de contamination, car les enfants sont des vecteurs du virus », explique le professeur Philippe Juvin. LP/Amanda Breuer Rivera

    « Chiuso ». Sur les grilles des écoles italiennes, mais aussi aux devantures des bars, des restaurants, des boutiques de vêtements et des salons de coiffure, le même mot s'affiche en lettres majuscules : fermé. Depuis que les 60 millions d'Italiens ont été placés sous cloche à cause du coronavirus, la France s'interroge : ces mesures extrêmes de confinement sont-elles réellement efficaces?

    Alors que le président de la République Emmanuel Macron a annoncé ce jeudi 12 mars la fermeture des établissements scolaires, à partir de lundi, et ce jusqu'à nouvel ordre, le chef du service des urgences de l'hôpital Pompidou à Paris estime que cette mesure a déjà montré son efficacité. « Dans le monde entier, de nombreuses études ont montré que la fermeture des écoles permettait de réduire l'épidémie de grippe hivernale, explique le professeur Philippe Juvin. Cela permet de casser les chaînes de contamination, car les enfants sont des vecteurs du virus et ont du mal à adopter les gestes barrière comme de se laver les mains ou de porter un masque. Maintenant, il va falloir gérer ces fermetures d'écoles et savoir comment on s'organise ».

    Le chef des urgences de l'hôpital Pompidou s'interroge notamment sur l'organisation de son propre service. « Si toutes les écoles sont fermées et que les parents doivent garder leurs enfants à la maison, je me demande combien il me restera d'infirmiers et de médecins dans mon service », souligne Philippe Juvin.

    «Plus les mesures sont extrêmes, plus c'est efficace»

    En adoptant jusqu'à maintenant une stratégie de confinement progressive, uniquement dans certaines zones du territoire, la France se différenciait de l'Italie, mais elle vient subitement de monter un cran au-dessus dans les mesures restrictives.

    « Il faut bien se rendre compte que le coronavirus devrait toucher environ 15 % de la population française, soit plus de dix millions d'habitants, souligne Jean-Stéphane Dhersin, spécialiste en modélisation des épidémies au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). L'objectif de l'Etat est de freiner au maximum l'avancée de l'épidémie, pour l'étaler dans le temps et éviter de bloquer les hôpitaux ».

    De plus en plus donc, le scénario italien semble en train de gagner la France. « L'Italie n'a elle-même fait qu'appliquer ce que la Chine a déjà fait et on voit que l'épidémie dans ce pays est en phase descendante », souligne le professeur Philippe Juvin. « Fermer des écoles, des salles de sport, des théâtres… oui, c'est bien, car en coupant les contacts entre les gens, vous coupez de fait les chaînes de transmission du virus », ajoute le médecin.

    « Plus les mesures de confinement prises sont extrêmes, plus elles sont efficaces, abonde Jean-Stéphane Dhersin. D'ailleurs, si on demandait à l'ensemble de la population de rester chez soi, en quinze jours ou trois semaines, l'épidémie de coronavirus serait finie. »

    «Des effets collatéraux délétères»

    Mais le directeur adjoint de l'Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions ajoute que bloquer les habitants à domicile aurait un énorme impact économique et sanitaire. Car certaines personnes risqueraient de mourir chez elles, d'autres maladies que le coronavirus, faute de soins.

    « C'est tout le problème d'un confinement généralisé, reconnaît Philippe Juvin. Cela crée une désorganisation de la société telle que cela peut provoquer des effets collatéraux délétères. »