La double peine de l’Iran : le coronavirus et les sanctions américaines

Le port du masque est désormais très répandu dans la ville de Qom, épicentre de l’épidémie de coronavirus qui a déjà fait près de mille morts en Iran. ©AFP - Fatemah Bahrami / ANADOLU AGENCY
Le port du masque est désormais très répandu dans la ville de Qom, épicentre de l’épidémie de coronavirus qui a déjà fait près de mille morts en Iran. ©AFP - Fatemah Bahrami / ANADOLU AGENCY
Le port du masque est désormais très répandu dans la ville de Qom, épicentre de l’épidémie de coronavirus qui a déjà fait près de mille morts en Iran. ©AFP - Fatemah Bahrami / ANADOLU AGENCY
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L’Iran est le troisième pays le plus touché par la pandémie de Covid-19, mais les sanctions américaines pèsent sur sa capacité à importer du matériel médical. Au lieu de les lever, Washington les a encore durcies hier.

Il est un pays où le désastre sanitaire se double d’une catastrophe géopolitique : c’est l’Iran, troisième pays le plus touché au monde, après la Chine et l’Italie, avec un millier de morts et une épidémie qui ne faiblit pas.

Le régime iranien a d’abord caché la gravité de la situation, car l’épicentre de l’épidémie se situe à Qom, ville sainte des chiites. Il a fini par bouger, et a ordonné la fermeture des sites de pélerinage pour éviter les rassemblements ; mais des vidéos récentes montrent des foules en colère qui tentent de forcer les lourdes portes de ces lieux. Un manifestant déclare que ce site n’a jamais fermé en quatorze siècles, et dénonce une hérésie…

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En raison de la crise sanitaire, l’Iran a libéré hier 85 000 prisonniers, dont une détenue irano-britannique, Nazanin Ratcliffe. Espérons que les deux chercheurs français emprisonnés à Téhéran et accusés d’« espionnage », Fariba Adelkhah et Roland Marchal, seront également libérés.

Les lourdeurs et les contradictions du système iranien seraient des handicaps suffisants pour lutter contre le virus. Mais le pays est soumis à des sanctions économiques imposées unilatéralement par Donald Trump après s’être retiré de l’accord nucléaire de 2015. 

Ces sanctions ont incontestablement un impact sur la lutte contre l’épidémie. Le domaine de la santé n’est certes pas soumis aux sanctions, mais l’Iran n’a plus accès aux marchés financiers et a donc du mal à se fournir en matériel médical étranger ; et il subit un embargo pétrolier américain qui le prive de sa principale ressource.

Résultat : Téhéran reçoit une certaine aide de la Chine, pays qui a pris une grande place en Iran, et utilise des moyens parfois rudimentaires pour lutter contre l’épidémie.

La Chine, en début de semaine, a demandé aux États-Unis de lever leurs sanctions pour permettre à l’Iran de lutter efficacement contre l’épidémie. Cette demande s’apparente à du bon sens alors que le Covid-19 touche tout le monde, y compris les États-Unis ; et les Européens s’honoreraient à la soutenir.

Il y a peu de chances que les Américains acceptent. C’est d’autant moins probable que ces derniers jours, il y a eu des affrontements, en Irak, entre les Américains et les milices chiites pro-iraniennes. Pas vraiment un climat de détente, la mort du général Soleimani n’est pas loin.

Hier, Washington a même imposé de nouvelles sanctions, visant trois Iraniens liés au programme nucléaire. Ces sanctions ne changent pas grand-chose, mais elles montrent que la mécanique de la confrontation se poursuit, malgré l’épidémie.

Prochain test : l’Iran a demandé un prêt de 5 milliards de dollars au Fonds monétaire international, ses caisses sont vides. Les États-Unis ont les moyens de bloquer, ou de laisser faire.

On pourrait croire que la lutte commune contre un virus qui ne connait ni frontière, ni idéologie, ni religion, permettrait d’apaiser les tensions internationales. C’est l’inverse qui se produit, alors que tout le monde regarde ailleurs. 

Pour le peuple iranien, c’est un profond sentiment d’abandon qui donne un goût amer à la grande fête de Norouz, le nouvel an persan qui tombe cette semaine.

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