Manuel Valls a du coffre, et un style. Il l’a prouvé lors de son discours politique, ce 8 avril, terminant par une ode vibrante à la France. Comme dit un député: "Lui, il prend la lumière", en comparaison avec Jean-Marc Ayrault. De quoi redonner confiance?
Question, car, sur le fond, la politique annoncée ressemble beaucoup à celle promise, mais pas encore mise en œuvre par Jean-Marc Ayrault. Tout bouge, et rien ne change. Le crédit d’impôt compétitivité emploi, les rythmes scolaires, la transition énergétique, le pacte de responsabilité, la rigueur budgétaire. Le Premier ministre a juste déplacé le curseur de certains prélèvements: les charges pesant sur le smic, l’impôt sur les sociétés… Comme un symbole prometteur.
Rien ne change en matière de dépenses publiques. Le chef du gouvernement a renvoyé la discussion au vote de la loi de finances rectificative début juillet. Pas de changement non plus dans la gestion de l’Etat. La seule réforme de structure évoquée est celle du millefeuille territorial, mais avec un calendrier pas très réaliste: 2017 pour la réforme des régions, soit deux ans après les élections régionales que la gauche a de grandes chances de perdre et l’année de l’élection présidentielle ; 2018 pour l’intercommunalité un an après l’élection présidentielle. Quant aux départements, Manuel Valls a évoqué 2021!
En réalité, le nouveau Premier ministre avait peu de marge de manœuvre. Il est sous contrainte. De Bruxelles, des marchés, du chef de l’Etat qui a fixé le cap, et de sa majorité. Une majorité traumatisée par la claque des élections municipales. La gauche dure, les partisans de Martine Aubry sont en embuscade. Les Verts sont prêts à dégainer à la première occasion.
Même son gouvernement est loin de lui être acquis. Seul, sans relais personnels au sein du PS, il a dû faire alliance, lui, le social-libéral, avec des représentants de l’aile gauche. Et il a dû s’entourer de proches du président à des postes-clés.
Difficile dans un tel dispositif d’incarner "une nouvelle étape". Manuel Valls, l’iconoclaste, a dû revêtir des habits consensuels pour rassurer son camp. Pas question de faire sauter les tabous. Il s’est au contraire efforcé de coller à son camp en démontrant sa préoccupation sociale. Il a d’ailleurs commencé son discours par la compassion: "Trop de souffrance, pas assez d’espérance." Le chef du gouvernement ne pouvait pas se permettre de mettre le feu. Mais du coup, il -déçoit. "Valls s’est construit dans la transgression. En voulant rassembler, il a perdu son ADN", confie un dirigeant socialiste.
En revanche, pour les proches de Manuel Valls, le véritable ADN du Premier ministre, c’est "ordre, modernité, efficacité". Et c’est avec ces mots qu’il compte redonner du souffle.
Retrouvez les portraits des 5 principaux ministres que Manuel Valls va devoir gérer:
Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères et du Développement international.
Ségolène Royal, ministre de l’Ecologie, de l’Energie et du Développement durable.
Arnaud Montebourg, ministre de l’Economie, du Redressement productif et du Numérique.
Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics.
Benoît Hamon, ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.