Appareil productif breton : la course contre la montre pour éviter l’arrêt total

Par Philippe Créhange

Moins de salariés, des trésoreries qui se tendent… Il est de plus en plus compliqué pour les entreprises bretonnes de maintenir leur activité. C’est pourtant une nécessité, insistent les représentants des patrons. En particulier dans l’agroalimentaire.

« Les usines agroalimentaires doivent continuer à fonctionner. Hormis évidemment la santé, qui reste prioritaire, c’est ça le principal enjeu sous l’angle économique », insiste le président du Medef Bretagne, Hervé Kermarrec.
« Les usines agroalimentaires doivent continuer à fonctionner. Hormis évidemment la santé, qui reste prioritaire, c’est ça le principal enjeu sous l’angle économique », insiste le président du Medef Bretagne, Hervé Kermarrec. (Photo archives DR)

Une activité exsangue pour certains, des salariés en télétravail ou en équipes restreintes pour d’autres, des trésoreries qui se préparent à se tendre dangereusement, des rendez-vous téléphoniques qui se multiplient avec clients, fournisseurs et banquiers… Être chef d’entreprise relève en ce moment du stage commando. Difficile par exemple de faire appliquer les consignes gouvernementales quand certains salariés se présentent au travail avec la boule au ventre comme dans la grande distribution, qui doit rester ouverte. « Les personnels sont exposés, il n’y a pas de masque et ils n’en auront sans doute pas avant la mi-avril. Ils mettent des plaques de plastique autour des caisses mais ce n’est pas suffisant… » Un témoignage parmi d’autres de l’un de ses adhérents qui inspire cette remarque au président du Medef Bretagne Hervé Kermarrec : « Il faut que les salariés de la grande distribution qui viennent actuellement soient récompensés de leurs efforts ». Tout en fixant des priorités.

« La difficulté c’est de maintenir l’outil productif en fonctionnement. Les usines agroalimentaires doivent continuer à fonctionner. Hormis évidemment la santé, qui reste prioritaire, c’est ça le principal enjeu sous l’angle économique ». Le modèle italien, avec la fermeture rapide de nombreuses entreprises, fait réfléchir les patrons français : « Ça avait créé beaucoup de désordre ».

« Si tout le monde s’arrête, ce sera très dur lors de la reprise d’activité car il y aura une inertie »

« S’il y a un message à marteler c’est celui-ci : ne fermez pas les activités qui peuvent être maintenues ! », renchérit Emmanuel Thaunier, président de la chambre de commerce et d’industrie d’Ille-et-Vilaine. « On nous a demandé de continuer à travailler et c’est très important. Si tout le monde s’arrête, ce sera très dur lors de la reprise d’activité car il y aura une inertie. L’un des défis qui nous attend est de redémarrer le plus vite possible », explique le patron d’un organe consulaire qui a ouvert, comme ses homologues, son centre d’appels « CCI Prévention ». La cellule poursuit ses activités les plus urgentes : formalités à l’international, contribution foncière des entreprises, cartes professionnelles… « Ce sont cinq ou six personnes qui répondent de 9 h à 18 h. Et certains jours, c’est chaud. Il est arrivé que l’on reçoive 200 appels en une matinée », confie Emmanuel Thaunier. « Il faut prendre du temps pour les écouter. Ils sont angoissés ».

Rééchelonnement des emprunts, nouvelles lignes de crédit… Voilà à quoi se résument les principales interrogations du moment. Une grande banque en Bretagne a par exemple eu à traiter 3 000 appels en une seule journée !


Faire face aux charges fixes


Sans parler des questions très pratiques autour des déplacements professionnels, qui suscitent là encore beaucoup de confusion. « Une entreprise de l’agroalimentaire met actuellement plus de 1 000 salariés sur les routes. Ce n’est pas possible d’imprimer pour chacun d’entre eux une attestation nouvelle tous les matins. Il faudrait une attestation unique », relève Hervé Kermarrec, qui a fait remonter la demande auprès de la préfète Michèle Kirry.

Et puis, évidemment, il y a toutes ces entreprises dont l’activité est totalement à l’arrêt et qui se demandent de quoi sera fait l’avenir… « Comment faire face aux charges fixes quand il y a zéro euro de chiffre d’affaires ? On peut décaler les charges fiscales et sociales mais ce n’est pas suffisant », souligne le patron du Medef.

Il voit toutefois les solutions apportées par l’État et les organes financiers sous un bon œil. « Les banques offrent la possibilité de différer de six mois les remboursements de crédit et peuvent mettre à disposition des entreprises trois mois de trésorerie. Car le manque de cash, ce sera aussi le principal problème. Dans un système idéal, il aurait fallu que les entreprises n’émettent pas de factures pendant quinze jours mais c’est absolument impossible car il y a des coûts mécaniquement incompressibles ».

« C’est une situation extraordinaire, personne n’avait imaginé ça et on n’a pas de plan B »

Une visioconférence organisée avec la préfète et les représentants des banques à laquelle se sont connectés 1 000 patrons bretons a permis au Medef de recueillir d’autres doléances. Questions sur le chômage partiel, le télétravail, la possibilité de cumuler les deux, le report de charges sociales, la TVA… Certains ont, par exemple, pris connaissance de la création d’un fonds solidaire permettant le versement par l’État de 1 500 € par mois aux entreprises qui réalisent moins d’un million d’euros de chiffre d’affaires et enregistrent une baisse d’au moins 70 %. « C’est une situation extraordinaire, personne n’avait imaginé ça et on n’a pas de plan B. Mais à nous de garantir que l’activité économique va repartir et que toutes les entreprises seront en capacité de le faire », martèle Hervé Kermarrec.

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