Coco : "Il faut essayer de mettre un peu de léger dans la gravité"

Dessin de Coco, paru dans Charlie Hebdo n•1444, le 25 mars 2020. - Coco
Dessin de Coco, paru dans Charlie Hebdo n•1444, le 25 mars 2020. - Coco
Dessin de Coco, paru dans Charlie Hebdo n•1444, le 25 mars 2020. - Coco
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Confinée en famille, la dessinatrice Coco croque l’absurdité de ce qui est désormais notre quotidien, essayant d’apporter un peu d’humour malgré cette grave crise sanitaire. La collaboratrice du journal satirique Charlie Hebdo partage aussi ses dessins sur les réseaux sociaux.

"Je ne sors que pour faire les courses, je ne suis pas une grande adepte du jogging", dit avec un sourire la dessinatrice Coco (de son vrai nom Corinne Rey), jointe mardi 24 mars par France Culture. Ses dessins, qu’elle publie régulièrement sur ses comptes Instagram et Twitter, figurent aussi dans le dernier numéro de Charlie Hebdo, paru ce mercredi 25 mars. La situation a beau être critique et délicate à traiter, le journal satirique, connu pour ses Unes mordantes et son attachement à la liberté d'expression, continue son travail avec les mêmes convictions. Charlie, raconte Coco, on a cette devise de vouloir rire de tout et même de la mort, quand c’est le cas. La mort touche tout le monde, ce n’est pas un sujet tabou. Il faut pouvoir passer outre l’émotion et donner le sourire" pour tenter de "prendre du recul" et "dédramatiser". 

C’est ça, le rire. C’est rire des choses qui dérangent, qui parfois blessent. Le rire, c’est provoquer.

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Dessin de Coco, mars 2020.
Dessin de Coco, mars 2020.
- Coco / Compte Instagram @cocoboer

Toute l’équipe est en ce moment en télétravail. Fabriquer le journal à distance est inédit, mais Coco - qui mardi n’était pas sortie depuis quatre jours - a  "plutôt le moral". "J’ai l’habitude d’être seule dans mon travail pour réfléchir" et "je suis plutôt du soir", précise-t-elle. "Je ne produis rien de bien avant 10 ou 11 heures". "C’est vrai qu’à Charlie_, on travaille en équipe. Ces moments-là vont me manquer un peu, mais on arrive à se joindre par Skype ou par mail"._

Le dessin de Coco pour France Culture, le 25 mars 2020.
Le dessin de Coco pour France Culture, le 25 mars 2020.
- Coco

Une crise et de multiples possibilités de la dessiner

Depuis plusieurs semaines, la pandémie de coronavirus et ses conséquences multiples ont écrasé les autres actualités. _"Notre vie est tellement impactée qu’on ne peut pas penser à autre chose"_, reconnaît Coco. Mais malgré leur omniprésence, ces sujets sont loin d’être épuisés. Ce n’est pas l’inspiration qui lui manque : 

Tous les jours, de nouvelles actualités tombent sur les restrictions, le confinement, le travail des infirmières… Il y a des tas d’angles et de possibilités de traitement, donc pour l’instant je ne suis pas du tout inquiète sur les capacités que j’aurai à produire.

À produire ou... "à déconner, parce qu’il faut essayer de donner le sourire aux gens, même si c’est une situation dangereuse", explique Coco qui vient de créer "un dessin sur les caissières, en première ligne dans les supermarchés".

Quand elle ne représente pas les caissiers et leurs clients (voir plus haut), les pharmaciens et le personnel soignant, Coco se penche avec amusement sur une autre thématique : l’ennui. _"Ça peut être marrant l’ennui, ça peut donner des situations cocasses et grotesques"_, ce qu’elle traduit en quelques coups de crayon, donnant vie à des personnages dont le laisser-aller parlera à certains, comme cet homme qui, chaque jour, s’enfonce un peu plus dans son fauteuil, l’air renfrogné. "Il faut essayer de mettre un peu de léger dans la gravité", estime la dessinatrice.

Dessin de Coco, mars 2020.
Dessin de Coco, mars 2020.
- Coco / Compte Instagram @cocoboer

"On ne se sent plus le droit de faire quoique ce soit"

Malgré son "grain de folie" assumé, Coco n’en oublie pas le surréalisme et la gravité du moment présent : "On est en démocratie et en même temps les choses sont de plus en plus fermées, on ne se sent plus le droit de faire quoique ce soit", décrit-elle_._ Selon Coco, plusieurs enseignements peuvent déjà être tirés de cette crise : 

J’espère que les moyens seront enfin mis dans les services publics pour que ces choses-là n’arrivent plus. Si quelque chose doit changer après cette crise, c’est ça : se rendre compte que le service public, c’est important et nécessaire à tous.

Coco, autoportrait en confinement, mars 2020.
Coco, autoportrait en confinement, mars 2020.
- Coco / Compte Instagram @cocoboer

En attendant la fin des mesures de restriction, et quand elle ne joue pas avec ses deux enfants à son domicile, en banlieue parisienne, la dessinatrice se concentre sur ses productions pour Charlie Hebdo. Elle travaille aussi bien pour le journal papier que pour le site internet, espérant ainsi conserver le lien avec les lecteurs, non sans une petite angoisse :

Je vous avoue que ça me ferait un peu mal aux fesses, pour le dire poliment, d’avoir résisté, d’avoir réussi à faire le journal après le 7 janvier et de ne pas pouvoir le faire à cause de ce virus.

Le 7 janvier 2015, un attentat a été perpétré dans les locaux de Charlie Hebdo. Les terroristes ont tué 12 personnes et blessé onze autres. Coco, elle, a survécu. "Ça m’embêterait un peu", conclut-elle, après tout ce que l’équipe de l’hebdomadaire a traversé.

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