Coronavirus: les 7 conditions pour préparer en moins d'un mois un déconfinement en toute sécurité

L’épidémie commençant à marquer le pas, le 11 mai a été fixé comme date du déconfinement. S’il y a eu des failles dans la préparation, la France dispose d’un mois pour préparer une sortie sécurisée.

Nancy Cattan Publié le 15/04/2020 à 06:40, mis à jour le 15/04/2020 à 06:58
J.-F. Ottonello

La France, comme d’autres pays, n’a pas pu empêcher que des régions subissent une déferlante de cas graves de Covid-19. Si des incertitudes persistent, on a aujourd’hui suffisamment de recul et d’exemples dans le monde, pour procéder à un déconfinement « sécurisé ». Analyse et critiques des mesures annoncées lundi par le chef d’État.

En protégeant les aînés et les plus fragiles

Les Chinois l’avaient publié très tôt : le taux de mortalité du Covid-19 augmente de façon exponentielle avec l’âge. Seulement 0,2 % des personnes âgées de 10 à 40 ans décèdent lorsqu’elles sont contaminées par le coronavirus. Chez les septuagénaires, ce taux grimpe à 8 %. Et chez les octogénaires, il culmine à presque 15 %.

Autre facteur qui accroît la mortalité du virus : les problèmes de santé. Le taux de mortalité des personnes atteintes de cancer, hypertension, maladie respiratoire, cardiovasculaire, diabète… est presque trois fois plus élevé que dans l’ensemble de la population.

Il est logique, dès lors, que les mesures de confinement continuent de s’appliquer au-delà du 11 mai, pour ces populations vulnérables à haut risque de formes graves et de décès. Il faudra être attentif dans les mois qui vont suivre à éviter que ces personnes se retrouvent en contact avec des enfants notamment, qui auront repris le chemin de l’école. Une situation très difficile à vivre par les personnes concernées, qu’il conviendra de soutenir pour prévenir des décompensations psychiques : anxiété, dépression… Seul un test sérologique, capable de préciser si la personne vulnérable est protégée d’une nouvelle contamination, permettrait d’accélérer son déconfinement.

Autre sujet de préoccupation évoqué par Emmanuel Macron : la « perte de chances » pour les personnes souffrant d’autres pathologies que le Covid. Cabinets médicaux fermés, opérations déprogrammées, climat de psychose… ont en effet conduit à une rupture dans la prise en charge de nombreux malades chroniques. Un désastre sanitaire est à craindre si une reprogrammation de certains soins et actes chirurgicaux n’est pas envisagée rapidement.

Sans se précipiter sur des traitements non validés

Chloroquine, vaccin BCG, sérothérapie… Depuis le début de la pandémie de coronavirus, de nombreuses pistes de traitements sont étudiées. L’une d’entre elles, promue par le Pr Raoult, a déchaîné les passions, divisant la France en deux camps : les pro et les anti-hydroxychloroquine (HCQ). Et des politiques ont participé à alimenter les divisions en prenant publiquement position en faveur de ce médicament.

Mais où en est-on aujourd’hui ? Aucun médicament, pas plus l’HCQ qu’un autre, n’a malheureusement apporté la preuve formelle de son efficacité dans le traitement ou la prévention de la maladie Covid-19. Certes, les résultats de la dernière étude du Pr Raoult, portant sur 1 061 malades traités par l’HDQ, sont intéressants, mais faute de groupe témoin, ils ne permettent pas de conclure.

D’où l’allusion du chef de l’État à la « rigueur » des recherches cliniques. Mais, surtout, le Pr Raoult préconise ce traitement à des stades précoces (à des stades tardifs, il semble au mieux inefficace, au pire dangereux). Stades précoces dont on sait qu’ils ne s’aggraveront pas dans 80 % des cas. Va-t-on traiter des millions de Français qui guériraient spontanément par un médicament, associé à un risque cardiaque certes faible, mais qui, sur une population très large, pourrait se traduire par un nombre de cas important ?

En testant par PCR toutes les personnes qui ont des symptômes

Pour analyser cette proposition de Macron, il faut déjà savoir qu’il fait référence là aux tests PCR, Polymerase Chain Reaction ou réaction de polymérisation en chaîne de dépistage.

Ces tests, qui ont manqué au début de l’épidémie, mais se sont multipliés aujourd’hui, permet de confirmer la présence du virus. Mais attention, réalisés trop tôt (sans symptômes évocateurs) ou trop tard, ils n’ont pas de valeur. Ils s’intègrent dans la stratégie de déconfinement, en permettant de tester très vite des personnes qui présenteraient des signes de la maladie et de les isoler pour éviter qu’ils ne contaminent d’autres personnes. Seule limite : les personnes asymptomatiques qui par définition, ne peuvent être alertées par des signes cliniques.

Les tests sérologiques (qui sont toujours en cours de finalisation) permettront, eux, de détecter si une personne a été en contact avec le virus. Ils nous donneront une idée de notre immunité collective vis-à-vis du coronavirus qui, selon les estimations, devrait être faible. Signe que les règles de confinement ont bien été respectées (le virus n’a pas beaucoup circulé), mais aussi, et c’est tout le paradoxe, facteur de risque d’une deuxième vague plus haute, si un protocole strict de déconfinement n’est pas respecté.

En mettant en quarantaine les positifs

Dylan Meiffret.

La mise en quarantaine des cas infectés, voire des cas contacts. C’est une mesure clé contre la propagation du virus et pour éviter une nouvelle explosion du nombre de personnes contaminées lors du déconfinement. Le chef de l’État l’a évoquée mais sans entrer dans le détail. Or, si l’objectif est simple à comprendre, la tâche risque d’être très ardue. Il s’agit d’identifier des sites dédiés, comme des hôtels, capables d’héberger rapidement et pendant plusieurs jours ou semaines, des personnes testées positives - et ne relevant pas d’une hospitalisation - et qui partagent leur domicile avec d’autres personnes. Ce qui est le cas de 73 % des Français. Nice, qui a été la première ville en France à expérimenter la prise en charge hors de l’hôpital, pourrait donner le La.

Sans attendre un vaccin

Une cinquantaine d’études sont aujourd’hui lancées pour essayer de trouver un vaccin contre le coronavirus. Mais, selon l’Agence européenne du médicament, « il pourrait s’écouler au moins un an avant qu’un vaccin contre le Covid-19 ne soit prêt pour approbation et disponible en quantités suffisantes pour permettre une utilisation généralisée ». Alors que beaucoup s’offusquent que ces recherches n’aillent pas plus vite, il faut se souvenir combien les vaccins ont mauvaise presse en France. Et parions aujourd’hui que si un vaccin anti-Covid était proposé dès l’hiver prochain, une minorité irait se faire vacciner. Pour rappel, la vaccination contre la grippe qui à fait près de 15 000 morts en France en 2016-2017 est très inférieure à l’objectif national (même parmi les professionnels de santé). Elle diminue pourtant considérablement le risque de complications graves et de transmission du virus. Ça fait rêver, non ?

En sortant masqué

Les masques. Avec l’hydroxychloroquine, c’est le sujet qui a suscité le plus de débats polémiques. Se rangeant à l’avis de l’Académie nationale de médecine, le chef de l’État s’est engagé à « permettre à chaque Français de se procurer un masque grand public ». Le port généralisé de masque complète les mesures barrières actuellement en vigueur, en tenant compte du fait que des personnes en période d’incubation ou asymptomatiques excrètent le virus ce qui entretient la transmission de l’infection. Une assertion qui en réalité continue de faire l’objet d’analyses : la proportion de ces porteurs « sains » varie selon les études, et leur contagiosité reste à définir. Mais surtout, l’intérêt du masque dépend de sa manipulation. Se gratter le nez sous le masque, l’enlever sans précaution, ne pas le changer après avoir éternué… sont autant de gestes anodins qui ruinent son efficacité. Les Français ont encore un long chemin à faire avant d’atteindre l’expertise des Asiatiques en matière de port du masque. Et d’hygiène en général.

En repérant les cas contacts

Dans toutes les bouches depuis plusieurs jours, le recours à une appli de traçage numérique a été clairement évoqué par le chef de l’État. Le principe est simple : en cas de symptômes ou de test positif au Covid-19, l’utilisateur de l’appli se signale et l’application prévient tous les contacts croisés les jours précédents (sans donner son nom ni le lieu où ils l’ont croisé), en les invitant à se faire dépister et se mettre en quarantaine. Si cet outil peut être très utile pour prévenir une deuxième vague, il ne peut être déployé en France que sur la base du volontariat (pour se plier à la réglementation européenne). Or, pour être réellement efficace il doit être massivement utilisé puisque seules les personnes équipées de l’application sont captées et alertées des risques d’infection. Les Français seront-ils prêts à sacrifier leurs « libertés » sur l’autel de la santé collective ?

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