Coronavirus : la moitié des petites maisons d’édition menacées de fermeture

Coronavirus : la moitié des petites maisons d’édition menacées de fermeture

Particulièrement touchées par la crise sanitaire et la fermeture des librairies, la moitié des plus petites maisons d’édition pourrait mettre la clé sous la porte.
Public Sénat

Par Alizé Boissin

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40% de livres en moins jusqu’à la fin de l’année. C’est l’estimation d’Antoine Gallimard, à la tête du troisième groupe éditorial français. Dans une récente interview pour France Info, il explique que le secteur de l’édition, « est particulièrement touché » par le confinement. Il prévoit « une réduction de parutions de livres de l’ordre de 40% jusqu’à la fin de l’année. Lui a déjà annoncé perdre près de 90% de son chiffre d’affaires… une baisse encore plus importante pour les petites maisons d’éditions. Celles qui éditent entre 5 et 10 livres par an. Un constat que partage Pierre Dutilleul, directeur général du syndicat national de l’édition. Il annonce « une période longue et difficile pour le secteur ». D’après le syndicat, le chiffre d’affaires de l’édition baisserait de « 90% à 100% pour les plus petites maisons. »

Les maisons d’édition, les maillons faibles de la chaîne du livre

Parmi toutes les conséquences de l’épidémie du coronavirus Covid-19, la fermeture des salons du livre et des rencontres littéraires, « véritables vitrines », handicape lourdement les petites maisons d’édition. Un manque à gagner « énorme » pour Frédéric Araujo, directeur de AKFG édition. Inquiet pour l’avenir de son métier et celui de ses collègues, « ceux qui éditent entre 5 et 10 livres par an », il a décidé de lancer une pétition intitulée « Sauvons nos petites maisons d’éditions » afin d’alerter le gouvernement sur la situation. « Nous avons déjà des difficultés à imposer nos titres, nous avons subi de plein fouet les grèves cet hiver, alors là la crise sanitaire c’est le coup de trop. » Selon lui, 60% des petites maisons d’édition pourraient fermer à la suite de la crise. La sénatrice Laure Darcos, membre de la commission de la culture au Sénat, craint de son côté que « la moitié » ne ferme. Ce sont « les oubliés » du secteur selon elle, avant de déclarer « il ne faut jamais oublier que ce sont eux qui prennent le premier risque de publier. »

Auditionné par la commission de la culture du sénat, le ministre de la Culture Franck Riester a été rapidement interpellé par la sénatrice de Seine-et-Marne Colette Mélot : « les acteurs de la culture restent sans filet de sécurité face à la crise (…) je pense aux éditeurs qui subiront les effets de cette crise à long terme jusqu’en 2021, voire 2022, et qui ne pourront pas bénéficier des aides annoncées car leur chiffre d’affaires n’est pas suffisamment impacté ». Une interpellation qui est restée sans réponse précise du ministre. Il a annoncé qu’il bâtirait un fonds d’aides pour les acteurs qui ne rentraient pas dans certaines « catégories. » Colette Mélot, espère que « les maisons d’édition seront prises en compte dans cette annonce. »

« Des mesurettes » 

Le revenu des maisons d’édition subi de plein fouet la fermeture des librairies, « le poumon du livre » selon l’expression de Pierre Dutilleul. En effet, sur France Inter Franck Riester a assuré qu’« il y a des dispositifs qui sont mis en place pour ne pas obliger les libraires à payer ce qu’ils doivent à leurs éditeurs ». Et même si le monde de l’édition bénéficie des mesures générales prises par le gouvernement (report des charges et des impôts, indemnité de 1500 euros pour ceux qui ont perdu leur chiffre d’affaires, fonds d’aide et facilités de trésorerie...) Frédéric Araujo assure que « c’est loin d’être suffisant, ce sont des mesurettes, ça va aider les grosses maisons c’est tout ». Il déplore un combat perdu d’avance, « c’est toujours David contre Goliath » déclare-t-il. « Quand on sait combien coûte la production d’un livre – entre 5 000 et 10 000 euros – c’est dérisoire » estime l’éditeur. 

Pour tenter de maintenir le secteur, le Centre national du livre a adopté un fonds exceptionnel de 5 millions d’euros pour l’édition. Une première enveloppe de 500.000 euros est destinée aux maisons d’édition dont le chiffre d’affaires est inférieur à 500.000 euros. Autre condition, les maisons d’édition ne doivent pas bénéficier du fonds de solidarité nationale. Un non-cumul que regrettent les petites maisons. 

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