"Le monsieur commence à couler, je saute du pont" : ce pompier de Rouen raconte son sauvetage

Stephen Abarnou, sapeur-pompier de Rouen, a sauvé la vie d'un homme qui s'était jeté du pont Flaubert dans la Seine, jeudi 23 avril 2020. Il raconte son intervention.

Un désespéré, qui a sauté du haut du pont Flaubert à Rouen (Seine-Maritime), jeudi 23 avril 2020, a été sauvé par un sapeur-pompier.
Un homme désespéré, qui a sauté du haut du pont Flaubert à Rouen (Seine-Maritime), jeudi 23 avril 2020, a été sauvé par un sapeur-pompier, au prix d’un saut d’ordinaire jamais réalisé. (©Archives/SL/76actu)
Voir mon actu

« Je n’avais pas d’informations au départ, vous êtes mieux au courant que moi. » C’est en riant que Stephen Abarnou, sapeur-pompier, rouvre le fil de son intervention soudaine, jeudi 23 avril 2020, à Rouen (Seine-Maritime). Un homme de 48 ans se trouvait alors dans la Seine, après un saut délibéré depuis le pont Flaubert. Le sergent Abarnou, spécialisé dans le sauvetage aquatique, raconte une intervention « risquée ». 

À lire aussi

« Il nous regarde droit dans les yeux, et se jette en arrière… »

16h30, arrivée du véhicule de secours. L’homme est toujours sur le pont, maintenu au téléphone par un standardiste du centre d’appel des pompiers. C’est en s’approchant que tout bascule : « On coupe les sirènes, on se stationne à proximité. Et lorsqu’on ouvre la porte de l’ambulance, à cinq mètres de lui, il nous regarde droit dans les yeux, et se jette en arrière… »

Entraîné à sauter depuis les différents ponts rouennais, cet ancien pompier de Paris fait rapidement face à un dilemme :

Moi, je suis le seul sauveteur aquatique sur le pont. Mais j’ai en tête que le pont Flaubert on n’y saute pas, c’est trop haut. Personne ne l’a jamais fait.

En bas, sous l’écume, la victime revient pourtant péniblement à la surface. Et manifeste des difficultés à respirer, la face régulièrement immergée. Un déclencheur, alors que le bateau de sauvetage n’est pas encore à l’horizon. Après deux minutes de flottement, palmes aux pieds, le sergent de 31 ans, père de deux enfants, décide — en une fraction de secondes — de le rejoindre, au prix d’un saut droit qui oscille « entre 15 et 18 mètres, selon les marées ».

Je retarde au maximum, mais le monsieur commence à couler. Et là, je saute. 

Consciente, la victime est rapidement retrouvée. « Je lui ai dit qu’on allait le sortir de l’eau et que tout allait bien se passer. » Sauvée au prix d’un remorquage « risqué » jusqu’à un premier pilier de pont, en « plein milieu de la Seine, où il y a de la circulation ». 

« Je n’ai jamais eu de crainte »

Au total, cinq minutes s’écouleront entre le saut et la mise en sécurité du désespéré. Ni l’homme de 48 ans, ni le sergent de la caserne Rouen-sud n’étaient blessés à l’arrivée des nageurs-sauveteurs.

Je n’ai jamais eu de crainte. Je l’ai vraiment fait parce que je savais que je pouvais aller chercher ce monsieur. Je savais que ce saut là, je pouvais l’appliquer. On s’entraîne tout le temps. 

Sauvetage remarqué, a fortiori parce qu’il s’agit du premier saut depuis le pont Flaubert, il ne devrait pas faire jurisprudence. « Il vaut mieux pas, car la réception a été brutale. Il y a un gros risque de traumatisme. Ou de se retrouver immergé à une certaine profondeur. »

Vidéos : en ce moment sur Actu

Que glane-t-on, à son retour à la caserne, d’une intervention aussi risquée ? « Il n’y a pas de prestige. On s’entraîne pour ça, pour faire des gestes sans avoir à réfléchir. J’étais surtout très content de voir arriver mes collègues. Le sentiment de cette intervention, c’est la réussite collective. »

Le premier sauveteur, c’est ce pompier au téléphone que je ne connais pas. J’ai demandé dans l’eau si ce collègue avait été gentil (rires, NDLR). C’était un beau travail d’équipe, tout s’est goupillé à merveille.

Et de rappeler, quant à sa spécialisation aquatique : « Ce monsieur a eu de la chance que je sois dans l’ambulance. »

À lire aussi

Dernières actualités

76actu

Voir plus

Vos journaux

Le Bulletin (Darnétal)
édition Le Bulletin (Darnetal)

mardi 23 avril 2024 Lire le journal

Je m'abonne
Le Bulletin (Darnétal), Une du mardi 23 avril 2024

Le Havre Infos

mercredi 10 avril 2024 Lire le journal

Je m'abonne
Le Havre Infos, Une du mercredi 10 avril 2024

Cote Rouen

mercredi 24 avril 2024 Lire le journal

Je m'abonne
Cote Rouen, Une du mercredi 24 avril 2024