Violation du confinement : les parents d’ados récidivistes en garde à vue dans l’Oise

Trois sorties sans attestation, c’est un délit dont les parents de mineurs peuvent être responsables. Si la mesure n’est pas systématique, elle peut être appliquée, comme cela a été le cas à Creil.

 Les parents ont été convoqués puis entendus dans la journée mais n’ont pas été sanctionnés. (Illustration).
Les parents ont été convoqués puis entendus dans la journée mais n’ont pas été sanctionnés. (Illustration). LP/Simon Gourru

    Etre placés en garde à vue à cause des agissements de leurs enfants mineurs : c'est ce à quoi ont été confrontés les parents de deux adolescents âgés d'une quinzaine d'années, habitants de la ville de Creil (Oise). Les deux jeunes ont été interpellés aux alentours de 22 heures, dans la nuit du 20 au 21 avril, sur les hauteurs de cette commune de 35 000 habitants.

    Surpris pour la troisième fois sans attestation dérogatoire, ce qui est considéré comme un délit, ils auraient pu être placés en détention. A la place, leurs parents ont été convoqués dès le lendemain au commissariat. Placés en garde à vue — un pour chacun des jeunes — ils y ont finalement passé la journée, même si, par la suite, le parquet a choisi de ne pas les sanctionner.

    Créer un électrochoc

    L'objectif, pour la police, n'était pas la répression, mais de créer un électrochoc. « Nous voulons faire prendre conscience aux parents des gestes de leurs enfants mais aussi à ces derniers que leurs actes peuvent avoir des conséquences judiciaires pour leur père ou leur mère », indique-t-on au commissariat.

    Du côté de la Direction départementale de la sécurité publique, on assure que ce n'est pas une consigne particulière. « C'est prévu par le Code pénal, qui est une consigne permanente, signale le commissaire Olivier Dimpre. Cela se fait déjà dans d'autres départements. C'est avant tout pour permettre à la justice de pouvoir prendre une décision parmi un panel d'outils juridiques, qui ne sont pas seulement des sanctions financières ou des condamnations à la prison ! »

    Le procureur de la République de Senlis est loin d'être opposé à la mesure. « Je ne dis pas que je vais poursuivre mais je ne m'interdirais pas d'interroger la responsabilité des parents dans certains cas », lance Jean-Baptiste Bladier.

    Ce dernier s'appuie sur l'article 227-17 du Code pénal, qui prévoit deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amendes pour les parents qui manqueraient à leurs obligations légales « au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l'éducation de son enfant mineur ».

    Couvre-feu depuis un mois

    « Je comprends qu'il puisse y avoir débat sur le sujet, poursuit le procureur. Mais, avec toutes les réserves d'usages, nous serions parfaitement en droit de demander des comptes aux parents dont les enfants ont commis de multiples violations de la loi. Comme avec un stage de responsabilité parentale par exemple. »

    Alors qu'un couvre-feu a été instauré dans la commune depuis un mois, le maire (PS) se satisfait du durcissement de ton de la police. « C'est sans doute répressif mais il faut que les parents réagissent, se faire arrêter deux fois sans attestation, c'est déjà assez grave dans les circonstances actuelles. »

    Et dans les rues de la ville, la mesure divise autant qu'elle séduit. « Il faut réagir, que font ces parents quand leurs enfants sont dehors en plein confinement et sans raison ? » s'étrangle Moktar. Annie, elle, semble plus mesurée. « Ce sont sans doute des parents déjà dépassés, je pense qu'il vaudrait mieux les aider que les punir. »