Injures raciales : Brigitte Bardot de nouveau en correctionnelle

Des propos injurieux contre les habitants de l’île de La Réunion valent à l’ancienne actrice d’être renvoyée devant un tribunal. Sa dernière condamnation, pour incitation à la haine raciale, date de 2011.

 Brigitte Bardot avait qualifié les habitants de l’île de l’océan Indien « d’autochtones ayant gardé leurs gènes de sauvages ».
Brigitte Bardot avait qualifié les habitants de l’île de l’océan Indien « d’autochtones ayant gardé leurs gènes de sauvages ». AFP/Valéry Hache

    À 85 ans, l'icône du cinéma français des années 60 est en passe de rejouer son plus mauvais rôle, celui de prévenue devant un tribunal correctionnel. Déjà condamnée à cinq reprises pour des propos à caractère raciste, Brigitte Bardot est de nouveau poursuivie par la justice pour des faits similaires. Non plus à l'égard de la communauté musulmane, qu'elle avait prise pour cible pendant les années 2000, mais cette fois envers les habitants de… l'île de la Réunion.

    Le 19 mars 2019, la militante de la cause animale adressait, en tant que présidente de sa Fondation, un courrier au préfet du département ultramarin dans lequel elle dénonçait des mauvais traitements infligés à des chiens, faits lui ayant été rapportés par ses soutiens locaux. Enjoignant le représentant de l'État à mettre fin à ces pratiques, elle rebaptisait la Réunion « L'île du Diable » et dérapait sévèrement en qualifiant ses habitants « d'autochtones ayant gardé leurs gènes de sauvages » et de « population dégénérée encore imprégnée des coutumes ancestrales, des traditions barbares qui sont leur souche. »

    « Tout ça a des réminiscences de cannibalisme des siècles passés. […] J'ai honte de cette île, de la sauvagerie qui y règne encore » assénait encore « BB » dans cette lettre diffusée par son chargé de communication auprès de plusieurs médias de l'île. Des propos ayant déclenché un tollé, les réactions indignées se multipliant à La Réunion comme en métropole.

    Mise en examen pour injures raciales

    Des excuses présentées publiquement quelques jours plus tard (« Mon seul tort est d'avoir fustigé l'ensemble de la population en blessant ceux qui ne blessent pas les animaux ») n'ont pas effacé des propos qui ont valu à l'ex-égérie de Godard d'être mise en examen pour injures raciales, son chargé de communication également pour complicité. Des plaintes de la part de la Ligue des Droits de l'Homme, de la fédération des associations tamoules de la Réunion, de la Licra ou encore du MRAP ont également été déposées.

    Dans un réquisitoire daté du 11 mars dernier, le procureur de Saint-Denis Eric Tufféry notait que « Nul ne niera que Mme Bardot a mené des combats légitimes pour qu'il soit mis fin à certaines pratiques qui n'étaient plus tolérables […] La force de l'engagement de Mme Bardot ne saurait cependant justifier qu'elle ait injurié de façon globale des êtres humains en laissant croire que les sévices à animaux étaient le fait de l'ensemble des habitants de la Réunion. » Et le 30 avril, le juge d'instruction en charge de l'affaire estimait l'infraction suffisamment caractérisée pour renvoyer Brigitte Bardot et son communicant devant le tribunal correctionnel.

    « Je me félicite de cette décision, après ses insultes inadmissibles envers les Réunionnais » a réagi hier Jean-Hugues Ratenon, député réunionnais de la France Insoumise ayant lui aussi déposé plainte contre l'actrice « pour empêcher ce genre de dérive dangereuse. » Une plainte qui, dit-il, lui avait valu à l'époque « une lettre anonyme avec des propos extrêmement violents et racistes. » « La justice doit aller au bout, quelle que soit la personne visée » insiste le parlementaire.

    « Elle devient la caricature de son propre combat »

    Également satisfait par la perspective d'un procès, l'avocat de la Licra et du MRAP attend, lui, « des explications et une sanction. » « Son combat, aussi juste soit-il, ne l'autorise pas à dire tout et n'importe quoi. Elle devient la caricature de son propre combat », estime Me Philippe Pressecq.

    Sauf recours devant la chambre de l'instruction, Brigitte Bardot devrait donc être convoquée devant le tribunal correctionnel de Saint-Denis de la Réunion dans les prochains mois. Sa dernière comparution pour incitation à la haine raciale en 2011 lui avait valu 15 000 euros d'amende.