Journal d’une confinée, par Cynthia Fleury : “La deuxième vague attendue est moins celle du Covid-19 que celle de toutes les pathologies mises de côté”

Cynthia Fleury, professeure titulaire de la chaire Humanités et santé au Conservatoire national des arts et métiers, tient pour nous son journal du confinement. Cinquante-cinquième et dernier jour de ce journal, elle s’inquiète du retard considérable pris sur les soins des autres maladies.

Par Cynthia Fleury-Perkins

Publié le 10 mai 2020 à 14h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 00h22

9-5-20

Ce jour 55 est une figure géométrique en soi dans la mesure où il est un nombre heptagonal : on peut s’amuser ici à voir dans ce dernier la préconfiguration de nos êtres à distance dans les mois qui viennent.

Enfin, le jour 56 libérateur est là, à portée d’heures. Il était plus ou moins difficile psychologiquement de vivre le confinement, mais chacun comprenait assez facilement une restriction temporaire des libertés si telle était la condition de la non-saturation des urgences et surtout de la protection de la vie de nos aînés. Néanmoins, chacun était en droit de s’interroger sur le bienfondé stratégique de ce choix, et sur les effets désastreux d’un confinement prolongé, tant sanitairement que socialement. La deuxième vague attendue est moins celle du Covid-19 que celle de toutes les pathologies qui se sont vues mises de côté, avec une perte de chance réelle. Dans le déconfinement, le soin, de l’aigu à l’ordinaire, va être sollicité comme jamais.

Alors que nous étions astreints chez nous, le street art a comme à son habitude déjoué quelques règles, le plus artistiquement possible, en sillonnant les rues pour des motifs non-dérogatoires, mais tellement nécessaires pour la narration collective de l’événement. Dans quantité de rues, des êtres masqués ont surgi, annonçant la nouvelle ronde humaine. Ils nous guident déjà. Banksy avait d’abord fait l’inverse, et investi ses intérieurs comme s’ils étaient urbains, et l’on se souvient des petits rats grimpant dans sa salle de bain, jouant avec le tube de dentifrice, puis il a opté pour le don qu’il connaît bien, aux équipes soignantes de l’hôpital de Southampton, en confectionnant un dessin rendant hommage à l’héroïsation ordinaire qu’ils représentent et qui nous inspire.

Ah oui, cela reste un plaisir non négligeable de savoir que ces masques insupportables vont faire « bugger » un peu les dispositifs de reconnaissance faciale. Nous l’avions dit, en ces temps si particuliers, ne négligez aucune joie. Je nous souhaite déjà une chose : ne pas nous retrouver pour un journal de reconfiné(e).

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