A Fréjus, les premiers restos rouverts sont ceux du cœur

L’incapacité humaine et matérielle a contraint l’association à fermer ses portes durant le confinement. À la réouverture, mardi, le calme ambiant laisse craindre des jours à venir plus difficiles.

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Alexandre Plumey Publié le 12/05/2020 à 19:10, mis à jour le 12/05/2020 à 19:42
Aux Restos de Fréjus, rouverts depuis mardi, une nouvelle organisation a été mise en place pour la distribution des denrées. Photo Philippe Arnassan

Une file d’attente de personnes, cabas à la main. La scène ne s’est pas déroulée devant un centre commercial mais rue Vignal, à Fréjus.

Les locaux des Restos du cœur ont rouvert mardi matin après une fermeture de près de deux mois. Loin de la foule observée fin mars à Paris pour une distribution du même genre place de la République, les bénéficiaires se sont succédé vivant comme un soulagement le retour de cette aide.

La nouvelle organisation et les règles sanitaires les obligeaient à s’adapter. Un sens de circulation pas toujours bien compris a été mis en place. Et les sacs sont déjà remplis en amont – hormis pour les produits frais. Ils n’ont plus qu’à être distribués par la porte après présentation d’une carte d’identité.

"Les deux pires mois de toute ma vie"

À l’intérieur, les bénévoles s’activent. Et transpirent. Visière devant les yeux, masques sur le nez. Face à eux des femmes et des hommes; des travailleurs et des chômeurs; actifs et retraités; seuls ou parents; jeunes et séniors; apprêtés comme un dimanche ou en survêtement comme un autre jour face à cette sortie attendue pour beaucoup.

"Deux mois c’est long, quand on vient ici depuis trois ans, soupire une sexagénaire souhaitant rester anonyme pour ne pas que ses enfants apprennent qu’elle se rend ici. Ils se sentiraient gênés de ne pas m’aider alors qu’eux aussi ont leurs soucis."

Si les produits frais ont été distribués aux associations comme Paola Solidarités pour leurs maraudes, certains bénéficiaires ont accusé le coup. "J’allais en course tous les deux jours pour ne pas trop dépenser et vivre au jour le jour", témoigne une mère de trois enfants de 11, 9 et 6 ans avec quatre sacs dans les mains.

Si certains sont des habitués contraints et forcés, d’autres ont des besoins plus récents. Barbe de trois jours, lunettes carrées, un trentenaire tarde avant de nous répondre. Il sollicite pour la première fois l’aide des Restos du cœur et avoue "ne pas encore accepter venir ici. Je viens de passer les deux pires mois de toute ma vie, explique d’abord l’agent de sécurité qui a perdu son travail juste avant le confinement. J’ai deux enfants et donc une pension à payer et un autre avec ma nouvelle compagne, qui en plus est enceinte de huit mois. En plus, j’ai dû me faire opérer du bras après une chute qui s’est infectée. Je dois repasser sur le billard et repousser mon retour au travail".

Par pudeur, par honte, les têtes sont basses au moment de venir chercher ce qui leur permet d’améliorer leur quotidien. Avant la nouvelle distribution, le 26 mai. En une demi-journée, plus d’une centaine de personnes se sont rendues sur place. Eux aussi attendaient la réouverture des restaurants... du cœur.
"En une matinée, autant de bénéficiaires qu’à l’été 2019"

À l’heure de la réouverture, Catherine, responsable distribution, craint un afflux de personnes dans les semaines à venir vu la conjoncture. À tel point que mardi, des personnes non-inscrites mais dans le besoin se sont rendues sur place.

Entre collecte tronquée et demande en hausse, les Restos du cœur sont encore plus en tension.

Pourquoi avoir fermé les locaux pendant deux mois?
Parce que nous ne pouvions plus assurer le service. J’ai été malade au début, la responsable du site a toussé un peu, donc nous n’avons pas pris le risque. En plus, nos bénévoles ont le plus souvent l’âge d’être des personnes jugées vulnérables.

Et donc depuis, vous avez pu vous organiser pour rouvrir?
Nous avons reçu gracieusement des visières pour les bénévoles de la part des entreprises Deschamps père et fils et Atelier Lopez. La mairie nous a prêté des barrières. Et les achats de masques et de gel au niveau national nous ont suffisamment rassurés pour nous relancer.

Concernant la distribution?
Les sacs de provisions sont prêts depuis la veille selon les critères d’attribution et le système de points. Mais par exemple, on ne peut plus remplir les cabas des gens. Nous avons dû acheter pour 100 euros de sacs en papier. Et c’est autant de paquets de pâtes en moins. Alors si un gentil donateur de sacs veut contribuer à la relance, nous sommes preneurs.

Comment s’est passée la collecte?
Nous l’avons organisée le premier week-end de mars donc elle a pu se dérouler ric-rac. Mais vu que l’on parlait déjà du virus, les gens ont eu peur, la collecte a été moins importante que l’année précédente.

Et les bénéficiaires?
Sur les inscriptions avant mars, nous étions déjà en hausse de 40%. Et ce matin par exemple, des familles non-inscrites sont venues. Il est d’ailleurs impossible de les accueillir pour les enregistrer pour le moment. En une matinée, nous avons vu autant de bénéficiaires que d’inscrits à l’été 2019...


Les Restos du cœur, 71 rue Vignal, Fréjus.
Prochaine collecte: le mardi 26 mai de 8 h 30 à 12 h.
Contact: 04.94.52.95.36.

“Rhôooooooooo!”

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