CORONAVIRUS - Encore une campagne de dépistage massive dans un abattoir. L’ensemble des quelque 400 salariés d’un abattoir de Fleury-lès-Aubrais (Loiret), près d’Orléans, subiront une vague de tests d’ici à mardi, a annoncé ce dimanche 17 mai l’Agence régionale de santé (ARS). En cause: la détection d’un “cluster” de 34 cas de Covid-19.
Ce dépistage, qualifié “d’assez considérable”, organisé jusqu’à mardi grâce aux unités mobiles du CHR d’Orléans, “va permettre de faire un état des lieux exhaustif et précis de la présence et de la circulation du virus au sein de l’entreprise”, selon Laurent Habert, directeur général de l’ARS Centre-Val de Loire.
Cet abattoir n’a toutefois rien d’un cas isolé, en France comme à l’étranger. Dans certains pays souffle même un vent de suspicion sur ce secteur qui n’a bien souvent jamais été fermé pendant le confinement.
De l’Allemagne aux États-Unis
En France, où six cas avaient été signalés vendredi dans un abattoir des Côtes-d’Armor, “les résultats des tests font apparaître ce jour 63 cas positifs Covid-19 supplémentaires, portant le total des cas confirmés à 69”, a indiqué l’ARS Bretagne ce dimanche. “Ces personnes sont isolées à leur domicile et leur suivi sera assuré par l’ARS Bretagne”, a-t-elle ajouté.
20 personnes ont été testées positives au Covid-19 parmi les quelque 700 salariés d’une entreprise de l’agroalimentaire en Vendée. L’entreprise concernée, Arrivé, est un abattoir de volailles qui n’a jamais cessé de fonctionner durant le confinement et où les règles sanitaires ont été renforcées avec le signalement de ces cas.
Aux États-Unis, plusieurs abattoirs sont également devenus des foyers de contagion du Covid-19. Outre-Atlantique, un quatrième contrôleur chargé de faire respecter les règles sanitaires dans les abattoirs américains est décédé mercredi dernier après avoir contracté la maladie.
Pour s’assurer que les supermarchés continuent à proposer de la viande et que les éleveurs puissent faire tuer leurs bêtes, le président américain Donald Trump a signé fin avril un décret forçant les abattoirs à rester ouverts alors même que les cas de Covid-19 se multiplient parmi les travailleurs.
Le syndicat représentant les salariés des établissements transformant de la viande estimait au 8 mai que 30 d’entre eux avaient péri après avoir contracté le nouveau coronavirus et que plus de 10.000 au total avaient été infectés ou exposés à la maladie.
En Allemagne, dans le Schleswig-Holstein, région frontalière du Danemark, un abattoir avait enregistré 109 cas de contamination au 8 mai, jetant la suspicion sur l’ensemble de la filière dans le pays.
La viande n’est pas en cause
Mais selon les experts, le contact ou la consommation de la viande ne seraient pas en cause. “Il n’y a pas de chaîne de contamination prouvée à partir de la viande ou de son ingestion, ce n’est pas le mode de transmission du virus”, a déclaré le patron de l’ARS Centre-Val de Loire Laurent Habert sur BFMTV, pointant plutôt des contaminations entre les salariés eux-mêmes.
S’agissant du cluster proche d’Orléans, Laurent Habert a estimé que les 34 cas confirmés, dans un lieu où travaillent 160 personnes, montraient “qu’il y a eu beaucoup de contacts et d’échanges dans cette unité au sein des personnels”.
“Peut-être qu’il faudra qu’on regarde également, et ce sera un des buts de l’enquête, les conditions dans lesquelles les agents et les personnels sont ensemble, y compris en dehors des chaînes de production. Il faudra voir si les gestes barrière et de distance physique ont été ou non appliqués...Est-ce que pour des raisons d’exiguïté?”, s’est-il interrogé.
Pourtant, les protocoles sanitaires mis en place dans cet abattoir ont globalement été respectés, a indiqué de son côté le préfet Pierre Poussel.
Sites obsolètes et conditions de travail
Malgré ces précautions, les conditions de travail spécifiques aux abattoirs sont peut-être en cause dans la dissémination du virus. “L’utilisation de karcher et de scies provoquent des aérosols”, “les difficultés à maintenir la distanciation sociale” durant le travail” mais également “des problèmes par rapport aux vestiaires d’habillage où les salariés sont à proximité sans porter de masques” peuvent favoriser la diffusion de la maladie, envisage le docteur Yvon Le Flohic, médecin généraliste à Ploufragan près de Saint-Brieuc, cité par LCI.
Des espaces exigus, voire des sites obsolètes peuvent également accélérer la propagation du virus. À l’usine de Smithfield Foods à Sioux Falls, dans la Dakota du Sud (États-Unis), où quelque 3700 personnes abattent, découpent, et transforment habituellement des milliers de cochons chaque jour, le site “est très vieux”, a par exemple expliqué à l’AFP Kooper Caraway, responsable local du syndicat AFL-CIO.
“Les couloirs sont très étroits, les vestiaires comme les salles à manger sont petits”, forçant les salariés à travailler et à se déplacer ”épaule contre épaule”, a-t-il raconté, ajoutant que la direction “n’a pas pris la situation au sérieux suffisamment tôt”.
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