La pandémie risque de provoquer une vague de problèmes de santé mentale

Youth unemployment

De nombreux jeunes au chômage souffrent de problèmes de santé mentale. [Francisco Osorio/Flickr]

Alors que le nombre de cas et de décès liés au coronavirus continue à baisser en Europe, les législateurs commencent à prendre conscience des effets de la pandémie sur la santé mentale des citoyens.

Selon un rapport des Nations unies publié le 13 mai, une autre crise causée par le COVID-19 se profile.

« L’isolement, la peur, l’incertitude, les difficultés économiques — sont ou pourraient être la cause de souffrances psychologiques », indique Devora Kestel, directrice du Département Santé mentale et abus de substances psychoactives à l’OMS. Elle explique que nos sociétés pourraient connaître une hausse de la gravité des maladies mentales, en particulier chez les enfants, les jeunes et le personnel de santé.

« La santé mentale et le bien-être de sociétés entières ont été gravement touchés par la crise et doivent être traités en priorité », déclare-t-elle.

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, affirme qu’il faut aider et soutenir « le personnel soignant en première ligne, les seniors, les adolescents, les jeunes, les personnes souffrant déjà de problèmes mentaux et celles coincées dans des situations de conflit ou de crise ».

Dans plusieurs États membres, dont l’Italie et le Royaume-Uni, les médecins et les infirmiers se sont vu offrir un soutien psychologique.

Mais les conséquences de plusieurs mois de confinement strict, combinées à la menace d’une grave récession et à des pertes d’emploi massives partout en Europe, risquent de soulever une vague de troubles mentaux.

Claudia Marinetti, la directrice du réseau paneuropéen Mental Health Europe qui représente les professionnels de la santé mentale, les usagers et les prestataires de services, corrobore cette hypothèse.

« Il est important de considérer la situation actuelle comme un marathon à entamer. Il y aura des implications à long terme pour les services de santé mentale », a-t-elle indiqué à Euractiv.

Une enquête menée au Royaume-Uni par l’association caritative YoungMinds révèle que 83 % des personnes sondées affirment que leur santé mentale s’est aggravée pendant la crise sanitaire. Par ailleurs, 26 % des jeunes qui bénéficiaient d’un soutien psychologique n’ont pu l’obtenir au cours de la pandémie en raison des mesures de confinement.

Certaines personnes ont aussi été privées d’accès aux services de santé mentale parce qu’elles étaient plus réticentes à se rendre chez leur généraliste ou dans l’impossibilité de le consulter à cause de la crise sanitaire. Les médecins traitants sont généralement le premier interlocuteur auquel s’adressent les personnes souffrant de problèmes mentaux. Une baisse significative des admissions dans les services d’urgence des hôpitaux a également été enregistrée partout en Europe.

Claudia Marinetti précise que les mesures de restriction ont tout de même eu une conséquence positive : les professionnels de la santé mentale ont été poussés à proposer leurs services en ligne en l’absence d’autres options. Le nombre de visites à domicile des thérapeutes a aussi augmenté, mais la directrice de Mental Health Europe insiste sur le fait que « le contact humain ne doit pas perdre son importance ».

Les mesures de confinement du coronavirus, « terreau propice » aux violences domestiques

Des préoccupations émergent sur la montée des violences faites aux femmes, un problème survenu en Chine au début de l’épidémie du coronavirus.

La pandémie a aussi affecté les pensionnaires de centres psychiatriques, où une hausse de l’isolement des patients et des méthodes coercitives a été notée.

Parallèlement, dans certains pays, les services de santé mentale des hôpitaux ont été reconvertis en salles de soin des personnes atteintes du coronavirus, et les docteurs ont encouragé les patients qui s’en sentaient capables à rentrer chez eux.

« Reste à savoir ce qui arrivera à ces personnes qui n’ont pas bénéficié d’assez de soutien dans quelques mois », déclare Claudia Marinetti.

En outre, des milliers de femmes vulnérables ont fait face à un risque accru de violence domestique causé par le confinement.

Nous devons vraiment nous assurer qu’à l’issue de la pandémie, des coupes budgétaires ne seront pas opérées dans les services sociaux et que les gouvernements européens auront conscience de l’impact du chômage massif sur la santé mentale, affirme Claudia Marinetti.

« Dès aujourd’hui, nous devons veiller à ce que des mesures soient instaurées pour éviter [cette situation]. Si les citoyens ne vont pas bien et ne sont pas soutenus, nous ne sortirons pas de la récession », soutient-elle.

D’après la directrice, il faut aussi faire en sorte que la pandémie ne mène pas à un pic des prescriptions de benzodiazépines, les molécules qui entrent généralement dans la composition des anxiolytiques et antidépresseurs, et qui peuvent mener à une dépendance à long terme si elles ne sont pas accompagnées d’autres formes de thérapie.

« J’espère vraiment que la crise actuelle a permis aux décideurs politiques de réaliser que nous pouvions réellement changer les choses », indique Claudia Marinetti. Elle appelle à une réponse plus coordonnée au sein de l’UE, avec en son cœur la stratégie européenne pour la santé mentale, que la Commission doit publier avant la fin de l’année.

Il semblerait que cette stratégie ne vise pas à accroître les compétences de l’UE en la matière, mais plutôt à trouver des moyens de coordonner la collecte de données et les meilleures pratiques dans l’ensemble du bloc.

Sanofi renvoie l’UE à ses responsabilités sur le vaccin contre le Covid-19 :

Le géant pharmaceutique Sanofi ne distribuera pas prioritairement aux États-Unis un éventuel vaccin contre le Covid-19 si l’Union européenne se montre « aussi efficace » pour financer son développement, a déclaré jeudi son responsable français.

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