L’échec amoureux, sa vie, son œuvre

"On attend sans doute toujours un peu trop de l’autre."  La philosophe Claire Marin. Wikipédia Rogelio de Egusquiza
"On attend sans doute toujours un peu trop de l’autre." La philosophe Claire Marin. Wikipédia Rogelio de Egusquiza
"On attend sans doute toujours un peu trop de l’autre." La philosophe Claire Marin. Wikipédia Rogelio de Egusquiza
Publicité

Cette semaine, Superfail revient sur un échec bien connu et fortement documenté : l’échec de la relation amoureuse. Quelles sont les causes profondes des ruptures amoureuses ? Existe-t-il des manières de « bien rompre » ? Que pouvons-nous faire de nos ruptures et que font-elles de nous ?

Avec
  • Claire Marin Philosophe, professeure de philosophie en classe préparatoire et écrivaine

Pour évoquer le « fail amoureux », autrement dit la rupture amoureuse, nous sommes allés interroger la philosophe Claire Marin, professeure de Philosophie et auteure du livre Ruptures aux éditions de l’Observatoire. 

Les raisons de l’échec amoureux 

Plusieurs raisons peuvent expliquer l’échec de la relation amoureuse. Une des premières raisons relève de l’affirmation de soi : l’on peut considérer qu’une relation nous empêche de nous réaliser, de devenir nous-même. 

Publicité

On attend sans doute toujours un peu trop de l’autre. Qu’il nous fasse devenir quelqu’un de meilleur, de plus beau, de plus désirable. Peut-être que c’est aussi pour ça qu’on rompt : le moment où cette illusion ne tient plus. Claire Marin, professeure de Philosophie

La rupture peut également provenir de la sensation d’être enfermé dans une relation dite « toxique », lorsque l’un des conjoints porte sans cesse des jugements négatifs sur l’autre, pouvant entraîner à terme, une forme d’intériorisation de la dépréciation. 

Enfin, la relation amoureuse peut s’achever tout simplement parce que l’amour n’est plus là. La difficulté pour Claire Marin, est de savoir reconnaître l’étiolement de cet amour, et d’en prendre conscience au même moment au sein du couple. Il arrive en effet fréquemment que l’un des conjoints ait cette intuition plus vite que l’autre, ce qui fait de la rupture un évènement essentiellement douloureux. 

Matières à penser
43 min

Comment « bien » rompre ? 

La nature souvent asymétrique de la rupture – un individu en rejette un autre qui l’aime encore – la rend par essence douloureuse. S’éterniser en explications n’atténuera pas les effets négatifs de l’évènement. Pour Claire Marin, il existe un type de rupture que l’on peut qualifier de « brutale », lorsqu’un mot ou un acte décisif entraîne une rupture définitive et radicale dans le couple. 

Mais une question subsiste : il y a-t-il des motifs de rupture moralement condamnables ? Dans le cas où la volonté de quitter son conjoint provient de son mal-être (dépression, maladie etc.), est-il permis de partir, faisant fi du fameux adage : « pour le meilleur et pour le pire » censé structurer les relations amoureuses ?  Pour l’auteure, la rupture dans ce cas peut également apparaître légitime : 

Si je me rends compte que cette personne a ce fond dépressif qui est incompatible avec mon caractère, ma façon de vivre et que j’ai besoin d’être dans une relation avec quelqu’un de plus positif, durablement ça ne tiendra pas. Autant être lucide sur la compatibilité des humeurs et des caractères de chacun. 

Que faire quand on est quitté ? 

Dans un premier temps, il semble indispensable d’accueillir le chagrin et de faire le deuil de la relation si celle-ci a été importante. Mais pour Claire Marin, une manière efficace de relativiser la douleur de la rupture est d’envisager les relations amoureuses comme une manière de découvrir différentes facettes de notre personnalité. Elle explique : 

Il reste des parties de nous qui sont un peu en jachère et chaque nouvelle relation ira exploiter des domaines de notre être. En ce sens on se découvre aussi, dans la multiplicité des relations. 

L'équipe