Des chercheurs ont inventé un exosquelette sur ressort qui permet d'augmenter la vitesse de course de 50 % sans batterie ni moteur extérieur. Un dispositif léger et portable inspiré de la pédale de vélo qui pourrait doper les performances humaines dans le sport ou la police.


au sommaire


    Pourra-t-on bientôt rattraper un vélo à la course à pied ? C'est le défi que s'est lancé David Braun, professeur de mécanique et d'informatique à l'université Vanderbilt, aux États-Unis. Avec ses étudiants, il a imaginé un exosqueletteexosquelette à ressort s'inspirant de la dynamique des pédales de vélo. D'après ses calculs, cet équipement permettrait d'atteindre 18 mètres par seconde, soit près de 65 km/h.

    Un exosquelette inspiré de la pédale de vélo

    De nombreux exosquelettes robotiques ont été développés pour assister les personnes paralysées à remarcher, aider à soulever des charges lourdes ou encore soulager le poids des équipements chez les soldats. Ils utilisent des actionneurs et de l'énergieénergie externe (moteurs et batteries) afin d'augmenter la puissance humaine. Mais aucun ne permet de courir plus vite sans alimentation en énergie.

    « En ce qui concerne la vitessevitesse humaine, le vélo est le champion en titre depuis plus d'un siècle », atteste David Braun. Si le vélo permet d'atteindre des vitesses bien supérieures à la course à pied, c'est grâce à l'invention de la pédale en 1868. Le pédalage procure un triple avantage : il ne produit pas de perte d'énergie lors de l'impact du pied avec le sol, supporte en partie le poids du corps et propulse le cycliste en continu, contrairement à la course où la propulsion ne s'opère que quand le pied touche le sol.

    Le ressort emmagasine l’énergie fournie par le pied lors de la poussée au sol, et la restitue pour accélérer la course. © David Braun, <em>Science Advances</em>, 2020
    Le ressort emmagasine l’énergie fournie par le pied lors de la poussée au sol, et la restitue pour accélérer la course. © David Braun, Science Advances, 2020

    Accélérer au fur et à mesure que l'on prend de la vitesse

    Pour appliquer cet avantage à la course à pied, David Braun et son équipe ont imaginé un exosquelette sur ressorts qui emmagasine l'énergie lors de la poussée au sol et la libère lorsque la jambe est en l'airair. Contrairement aux ressorts conventionnels, dont la rigiditérigidité est constante et dépend du matériaumatériau, ce ressort à rigidité variable voit sa rigidité augmenter en se raccourcissant.

    Or, c'est cette rigidité qui détermine la force avec laquelle le coureur pousse contre le sol pour accélérer le corps : plus le ressort est rigide, plus la force de propulsion est importante pour une même force de compression. « Augmenter la rigidité du ressort lorsque le coureur prend de la vitesse produit le même effet que passer à une vitesse supérieure sur un vélo lorsque le cycliste roule plus vite, explique David Braun. Cela permet aux coureurs de fournir plus d'énergie et de contourner la limitation biomécanique où l'énergie n'est fournie que pendant le court temps de contact au sol de la course rapide ».

    Vitesse maximale atteinte par la course à pied, la course avec prothèse, le patin à glace et le vélo en fonction du temps d’effort fourni par la jambe. © David Braun, <em>Science Advances</em>, 2020
    Vitesse maximale atteinte par la course à pied, la course avec prothèse, le patin à glace et le vélo en fonction du temps d’effort fourni par la jambe. © David Braun, Science Advances, 2020

    Vitesse de pointe de 20 mètres par seconde

    Selon ses calculs, détaillés dans la revue Science Advances, un tel dispositif permet en théorie d'utiliser ses jambes 96 % du temps de course et d'atteindre une vitesse de 20 mètres par seconde, « ce qui est comparable à la vitesse de pointe du cyclisme », assure David Braun. Un dispositif plus pratique, portant sur environ 60 % du temps de foulée, permettait déjà d'atteindre 18 mètres par seconde, soit 50 % plus rapide que le record du monde de 12 mètres par seconde au sprint de 100 mètres, d'après le chercheur. Et cela sans lourde batterie ni moteur électrique.

    Tout cela n'est encore qu'au stade purement théorique. Mais cette technique de propulsion plus légère pourrait repousser les limites de la performance humaine et de la loi du sport, suggère David Braun. En 2012, le coureur handicapé sud-africain Oscar Pistorius avait suscité le débat avec ses prothèsesprothèses en forme de spatule s'affichant aux côtés des athlètes valides. David Braun imagine davantage la création d'une nouvelle épreuve olympique. « Après tout, on a bien des courses de patins à glace ou de cyclisme sur piste ? », fait-il remarquer.

    Le saviez-vous ?

    Jusqu’ici, les ingénieurs se sont surtout portés sur les chaussures pour améliorer les performances des coureurs. En 2017, Nike a ainsi sorti la Nike Vaporfly 4 %, une chaussure sensée améliorer le coût énergétique de 4 % par rapport à une chaussure classique, soit un gain de temps d’environ une minute par heure.

    Ces chaussures permettent de réduire l’impact vertical, diminuant ainsi la fatigue musculaire, et font porter la force de l’appui plus en avant, ce qui rend la foulée plus efficace. Le marathonien Eliud Kipchoge a ainsi réussi à passer sous la barre des 2 heures grâce à ces chaussures magiques.