«Tout ce que je sais, c’est que je ne veux pas vivre dans une société où nous serons abrutis par les «fake news» du régime communiste chinois»
Cécile, manifestante
«Manifester dans la rue, c’est tout ce que je peux faire aujourd’hui. Peut-être que la semaine prochaine, ce ne sera plus possible, peut-être que l’armée chinoise sera ici», commente Cécile, 22 ans. «Tout ce que je sais, c’est que je ne veux pas vivre dans une société où nous serons abrutis par les fake news du régime communiste chinois.» Elle assure vouloir continuer à se battre même une fois la loi appliquée, «sans trop savoir encore comment». En écho, le jeune militant Joshua Wong répète aux journalistes le même leitmotiv: «La capitulation n’est pas une option, nous devons continuer à nous battre.» Cette figure du mouvement pro-démocratie particulièrement active dans la recherche de liens diplomatiques à l’étranger est pourtant l’une des cibles désignées de la loi en cours d’élaboration au parlement chinois, et qui vise à condamner les «terroristes, sécessionnistes et interventionnistes», soit ceux soupçonnés de collusion avec «les forces étrangères».
Un «débat démocratique et non violent»
La contestation sans précédent en cours depuis juin 2019 n’est pas fomentée par des pays étrangers mais est le fruit «du vrai mécontentement de Hongkongais ordinaires», ont rétorqué dimanche 199 hommes politiques de 23 pays, parmi lesquels le dernier gouverneur de Hongkong, Chris Patten, et des sénateurs américains. «Des lois draconiennes ne feront qu’aggraver la situation, mettant en danger l’avenir de Hongkong en tant que ville internationale ouverte de Chine», écrivent-ils dans un communiqué commun, dénonçant «la violation flagrante de la déclaration sino-britannique».
Ce texte signé avant la rétrocession en 1997 incarne la promesse d’un haut degré d’autonomie pour la région administrative spéciale jusqu’en 2047. La Suisse par la voix du Département des affaires étrangères a elle aussi rappelé accorder «une grande importance au principe «un pays, deux systèmes» et souligné qu’un «débat démocratique et non violent est la meilleure façon» de préserver les succès de Hongkong basés sur «les libertés civiques, l’indépendance de la justice et une vaste auto-administration».
La «main de Pékin»
Ce n’est pas la première crise de doute traversée par Hongkong. Régulièrement, les opposants pâlissent devant la «main de Pékin» de plus en plus visible, selon eux. L’année dernière, ce sont les milieux d’affaires qui avaient été les premiers à s’inquiéter des risques que le projet de loi sur les extraditions vers la Chine faisait peser sur l’Etat de droit. Des transferts de capitaux à l’étranger avaient alors été enregistrés. La rue avait fait plier les autorités, qui avaient retiré le texte. Mais un an après, Pékin semble à bout de patience.
La loi sur la sécurité nationale à Hongkong devra s’appliquer «sans le moindre délai», a averti le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, au moment même où des centaines de manifestants s’armaient de poubelles, planches en bois ou autres munitions de fortune pour occuper des rues sans toutefois trop résister. La police avait déjà procédé à 120 arrestations trois heures après le début du rassemblement et à la nuit tombée tentait encore de venir à bout des dernières poches de résistance dispersées dans les quartiers de Causeway Bay et Wan Chai.
La date d’application du texte controversé n’est pas claire. Le texte soumis au parlement chinois doit encore être formellement approuvé à Pékin avant d’être directement promulgué à Hongkong. Mais la procédure pourrait être accélérée et des réunions convoquées en urgence, craignent des opposants.