Kafka, coupable d’être innocent : épisode • 2/4 du podcast L'imposture

L'enfer de la bureaucratie selon Kafka ©Getty
L'enfer de la bureaucratie selon Kafka ©Getty
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A qui demander justice dans un monde d'imposteurs ?

Faut-il soi-même se faire imposteur, comme Joseph K. dans le Procès, pour obtenir justice ? Des procès staliniens à la culpabilité de l'artiste l'existence, Kafka nous apprend à discerner l'imposture de l'arbitraire.  Procès sans raisons, condamnations au hasard, l'imaginaire de Kafka dépasse de loin ce que l'histoire a pu faire de pire... Denis Salas nous emmène sur les prédictions de cet écrivain, "prophète sans peuple, et sans sol" (Marthe Robert).

Le texte du jour

« Le voyageur réfléchissait : il est toujours délicat d’intervenir sérieusement dans les affaires des étrangers. Il n’était citoyen ni de la colonie pénitentiaire, ni de l’État auquel elle appartenait. S’il voulait chercher à empêcher ou à contrarier l’exécution, on pouvait lui dire : « tu es un étranger, tais-toi ». À cela il n’aurait rien pu répondre, juste ajouter qu’il ne savait pas ce qui lui avait pris, car il voyageait dans le seul but d’observer et nullement pour modifier les codes des étrangers. Mais la situation était trop tentante.  Il était flagrant que la procédure était injuste et l’exécution inhumaine. Nul ne pouvait l’accuser de chercher à satisfaire un intérêt personnel puisque le condamné lui était inconnu ; ce n’était pas un compatriote ni même un être qui pouvait éveiller la compassion. Le voyageur avait été recommandé en haut lieu, il avait été reçu avec une grande courtoisie, et le fait qu’on l’ait invité à assister à cette exécution semblait même signaler qu’on attendait son avis à propos de la justice pratiquée en ces lieux. C’était d’autant plus vraisemblable que le commandant, comme il venait de l’entendre de manière on ne peut plus nette, n’était pas un partisan des méthodes répressives et qu’il se comportait presque de manière hostile à l’égard de l’officier. Le voyageur en était là de ses réflexions quand il entendit un cri de fureur. »

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Kafka, La colonie pénitentiaire, 1919, traduction Alexandre Vialatte, Gallimard, p.27

Lectures

Franz Kafka, Le Procès, 1919, lu par George pour les NCC (16/12/2015)

Franz Kafka, La colonie pénitentiaire, 1919, traduction Alexandre Vialatte, Gallimard, p.27

Franz Kafka, « Joséphine la cantatrice », 1924, dans La Colonie pénitentiaire et autres récits, trad. Vialatte, p. 88

Extraits

L’aveu, film de Costa Gravas (1970)

Marguerite, film de Xavier Gianoli (2015)

Références musicales

Donna Agrell , Septuor en Si bémol Maj : Finale - pour clarinette cor basson trio à cordes et contrebasse 

Quatuor Endellion, Quartettino : Allegro molto vivace - pour quatuor à cordes

Vicente Sempere-Gomis,  Echos II de votre Faust - pour flûte violoncelle et piano

Bob Dylan, Hurricane

Information complémentaire

Association française pour pour l'histoire de la justice

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