L'incroyable parcours de Severiano de Heredia, le premier (et seul) maire noir de Paris

En 1879, Severiano de Heredia devenait maire de Paris. Il est le seul maire noir que la capitale ait eu. Retour sur le parcours de celui qui fut aussi député et ministre.

Severiano de Heredia a été élu maire de Paris en 1879
Severiano de Heredia a été élu maire de Paris en 1879 (©DR)
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Depuis 2013, une rue porte enfin le nom de Severiano de Heredia dans le 17e arrondissement de Paris. C’est bien le minimum que devait faire la capitale pour celui qui fut son maire du 1er août 1879 au 12 février 1880. 

Severiano de Heredia, restera dans l’histoire comme le premier, et jusqu’à maintenant le seul, maire noir de Paris. 

Député puis ministre des Travaux publics

Ce fils d’esclaves affranchis d’origine cubaine, cousin direct du poète José Maria de Heredia, arrive en France à l’âge de 10 ans. Il fait de brillantes études à Louis-le-Grand où il reçoit le grand prix d’honneur du lycée. 

Plus tard, en 1870, il obtient sa naturalisation. Trois ans plus tard, ce franc-maçon, républicain de tendance radicale, est élu au conseil municipal de Paris pour le quartier des Ternes (17e) avant de devenir président du conseil municipal de Paris (l’équivalent du maire) en 1879.

Il ne s’arrête pas là puisqu’il entre au palais Bourbon et y siège comme député de la Seine dès 1881.

Consécration, il est nommé ministre des Travaux publics en 1887, succédant à Emile Loubet. 

Victime du colonialisme

Mais ensuite, sa carrière décline. Et pour une raison que Paul Estrade, auteur du livre Ce mulâtre que Paris fit maire et la République ministre, a analysée : « Alors que l’on justifie les conquêtes africaines pour civiliser les populations noires, il était assez contradictoire d’avoir un mulâtre au sein du gouvernement français ». Le colonialisme comme cause de sa perte. 

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Alors qu’il gravissait les échelons de la politique, les populations indigènes, elles, étaient exposées comme des animaux lors de l’exposition coloniale de 1886 au jardin d’Acclimatation.

Comme ministre, il eut aussi droit à des qualificatifs de haut vol, baptisé le « ministre chocolat » par certains ou le « nègre du ministre » par d’autres politiques distingués…

Après ses échecs aux élections législatives de 1889 et 1893, il se retire de la vie politique et se consacre à la littérature, lui qui plus jeune avait composé des nouvelles et essais poétiques. 

Il meurt le 9 février 1901 d’une méningite à son domicile de la rue de Courcelles. Il est enterré au cimetière des Batignolles. 

« Oubli coupable »

Il aura donc fallu plus de 110 ans pour Severiano de Heredia obtienne la reconnaissance de la ville de Paris. Anne Hidalgo avait admis cette « oubli coupable » lors de l’inauguration de la rue à son nom : « Le premier maire noir de Paris puis ministre de la République française a été renié et relégué pendant longtemps parmi les oubliés de l’histoire ». 

Ce même jour, Paul Estrade avait exprimé très clairement son sentiment : « Severiano de Heredia a été oublié parce que Noir. Sa tombe refermée, l’ex-ministre est aussitôt mis sous le boisseau dans la patrie qu’il avait choisie et servie de façon admirable. Lui l’étranger né aux colonies, lui l’étranger descendant d’esclave. La subite dégradation de son image puis sa disparition totale, ont été la conséquence inéluctable des méfaits du racisme et du colonialisme. La République a été son tremplin et le colonialisme son tombeau ». 

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