À Lille, les policiers ont brièvement accroché leurs menottes sur la grille de la préfecture en guise de protestation. (Image d'illustration)

Des policiers déposent leur équipement au sol lors d'un rassemblement à Nice, le 11 juin 2020.

Valery HACHE / AFP

Christophe Castaner a tenté jeudi de désamorcer la colère des policiers, sans y parvenir au regard des premières réactions virulentes à ses entretiens avec les syndicats de police, dans un contexte de relance des manifestations contre les violences policières et d'accusations de racisme.

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Des rassemblements ont eu lieu jeudi en fin de journée dans plusieurs villes, comme à Saint-Étienne, Marseille, Nice, Bordeaux, Bobigny, Toulouse ou encore Lille où sous la pluie, une centaine de policiers vêtus de leur uniforme, et portant un masque, ont notamment crié "Castaner démission" avant d'entonner la Marseillaise. À chaque fois, les policiers ont symboliquement jeté à terre leurs menottes.

"Je vois dans ces images la marque et les témoignages de l'amertume, de la tristesse et de la lassitude" des policiers qui ont "le sentiment d'être victimes d'amalgame", a réagi sur BFMTV Michel Lavaud, porte parole de la police nationale.

"Christophe Castaner a perdu la confiance des policiers"

"Les flics de France ne considèrent plus Christophe Castaner comme le supposé premier flic de France. Il nous a lâchés lundi, nous a jetés en pâture lundi. À lui de regravir l'Everest de la confiance", avait tonné avant les rassemblements Yves Lefebvre, secrétaire général de Unité SGP Police (premier dans la police nationale), appelant ses collègues "à ne plus interpeller, à ne plus intervenir".

"Christophe Castaner a perdu la confiance des policiers", a-t-il estimé ce jeudi après son rendez-vous avec le ministre de l'Intérieur, dont les annonces sur le racisme et les techniques d'interpellation suscitent la défiance chez les forces de l'ordre.

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Yves Lefebvre a demandé au ministre de revenir sur sa décision d'interdire la technique dite de la clé d'étranglement ou contrôle de tête. "Ce qu'on a vécu depuis lundi est inacceptable. On fait des faux procès pour satisfaire la vox populi et quelques collectifs qui ne représentent qu'eux-mêmes", a déclaré le syndicaliste, dont l'appel a donc été suivi.

Yves Lefebvre a demandé que le pistolet à impulsion électrique (PIE) ne soit pas généralisé comme alternative à la suppression de la technique d'interpellation controversée dite du contrôle de tête. Il a souhaité que les nouveaux modèles de cette arme dite de force intermédiaire soient expérimentés sur deux ou trois départements avant un retour d'expérience.

Castaner regrette ses propos sur les "soupçons avérés"

Enfin le patron d'Unité a affirmé que Christophe Castaner avait concédé une "erreur" en évoquant lundi l'hypothèse d'une suspension d'un agent en cas de "suspicion avérée" de racisme. La suspension en cas "de soupçon avéré est définitivement balayée. Castaner a reconnu sa grossière erreur en la matière", a affirmé Yves Lefebvre.

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"La présomption d'innocence est maintenue (...) On ne va pas sur de la suspicion ou de la délation", a-t-il encore expliqué. "Si Christophe Castaner veut regagner la confiance des policiers, il a du travail. On lui a donné quelques pistes en la matière, c'est à lui de s'expliquer", a complété le secrétaire général, qui a aussi dénoncé "un monde de bisounours" loin de la "réalité du travail de flic au quotidien".

"Tout le monde demande sa tête"

Sur RTL ce jeudi, Rocco Contento, responsable parisien du syndicat Unité-SGP-Police, a déclaré que les policiers ont "très mal vécu les annonces de monsieur Castaner". "C'était catastrophique, on ne l'a pas vu venir. On nous retire le moyen de contrainte de la clé d'étranglement (...) Mais il faut une mesure alternative", a expliqué le syndicaliste, assurant d'un "rejet total du ministre de l'Intérieur" de la part de ses collègues et lui : "Tout le monde demande sa tête (...) c'est le sentiment profond de tous les collègues", a-t-il aussi dit.

Deuxième syndicat à être reçu ce jeudi, Alliance a également menacé d'actions revendicatives dans les prochains jours. "Un ministre de l'Intérieur doit être derrière ses policiers", a souligné Fabien Vanhemelryck, secrétaire général, ajoutant que "le ministre est en dehors des clous mais le président de la République l'est tout autant."

L'autre syndicat de gardiens de la paix, Unsa-Police, a lui aussi été reçu place Beauvau par le ministre de l'Intérieur. Celui-ci s'entretiendra ce vendredi avec les syndicats d'officiers et de commissaires. Christophe Castaner a prôné lundi lors d'une conférence de presse une "tolérance zéro" pour le racisme dans les forces de l'ordre, dont la suspension sera "systématiquement envisagée pour chaque soupçon avéré" en la matière.

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