La discrimination raciale progresse en Allemagne

[EPA-EFE/FILIP SINGER]

L’Agence allemande anti-discrimination a reçu, en 2019, plus de 3500 plaintes pour discrimination et a noté une hausse significative de la haine raciale. Les experts appellent à la modernisation des lois fédérales.

L’Agence fédérale anti-discrimination (ADS) a présenté la deuxième édition de son rapport annuel sur les plaintes enregistrées au cours de l’année.

D’après le rapport, en 2019, environ un tiers des faits de discrimination dépendaient de l’origine ethnique du plaignant. Cela représente une hausse de 10 % par rapport aux chiffres de l’année précédente.

« Ces chiffres sont un signal d’alerte. L’Allemagne ne lutte pas assez contre le racisme », a déclaré un porte-parole de l’ADS lors d’une conférence de presse mardi.

Selon l’agence, la deuxième cause la plus fréquente de discrimination est liée au genre. Vient ensuite le handicap, qui représente plus d’un quart des plaintes, puis l’âge, la religion, les croyances et l’identité sexuelle.

Les lacunes juridiques

L’ADS, un centre d’orientation pour les personnes touchées par la discrimination, a été créé en 2006 dans le cadre de la directive sur l’égalité de traitement de l’UE.

La même année, l’Allemagne a adopté une loi sur l’égalité de traitement, qui sert de base juridique aux services de consultation du pays.

Cette loi inclut la discrimination liée à l’âge, au handicap, à l’origine ethnique, à la religion, aux croyances, au genre et à l’identité sexuelle.

Toutefois, son champ d’application est limité.

L’Allemagne s’inquiète de la flambée des délits à caractère politique

Le nombre de crimes à caractère politique a considérablement augmenté en Allemagne au cours de l’année dernière. Pour la première fois, les délits commis en ligne ont été inclus dans les statistiques. Un article d’Euractiv Allemagne.

Par exemple, elle mentionne uniquement la discrimination sur le lieu de travail et au sein de la société civile. Cela inclut par exemple la location d’un bien, mais pas les incidents avec les administrations publiques ou les forces de l’ordre.

La semaine dernière, pour élargir la portée de cette réglementation, le parlement régional du district de Berlin a adopté une loi anti-discrimination sans précédent qui vise à protéger les victimes de discrimination pratiquée par les autorités.

Selon Bernhard Franke, le chef par intérim de l’ADS, cette nouvelle réglementation doit servir de modèle aux autres Länder.

« C’est d’autant plus important, parce que le secteur de l’enseignement et le travail de la police relèvent entièrement de la compétence des États fédérés », souligne-t-il. Le commissaire de l’ADS appelle à la création d’organismes indépendants pour traiter les plaintes contre la police.

« Il ne doit pas y avoir de lacune à long terme », a-t-il prévenu lors de la conférence de presse.

Critiques au niveau européen

La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) juge que l’Allemagne lutte peu contre la discrimination. Dans un rapport publié en début d’année, l’ECRI note le manque d’organisations qui offrent un soutien efficace aux victimes de discrimination.

Bernhard Franke condamne aussi cette situation et demande que des bureaux anti-discrimination soient mis en place dans tous les Länder. À ce jour, cependant, seule la moitié d’entre eux disposent de tels organismes.

Comme le montre le rapport de l’ADS, les faiblesses de la législation allemande sont flagrantes lorsqu’on la compare aux lois similaires adoptées dans d’autres pays européens.

Par exemple, dans de nombreux pays, sont aussi couvertes l’origine sociale, la nationalité, la situation familiale et matrimoniale, ainsi que l’apparence — ce qui va bien au-delà des critères de l’Allemagne.

En outre, contrairement aux organisations allemandes, de nombreux bureaux de lutte contre la discrimination des États voisins ont également le droit d’intenter des actions collectives.

« Dans la pratique, les gens d’ici ont beaucoup plus de difficultés à faire valoir leurs droits qu’ailleurs en Europe », soutient un porte-parole de l’ADS.

Adapter la loi à la réalité sociale

Dans ce contexte, Bernhard Franke plaide pour une modernisation de la législation sur l’égalité de traitement, afin qu’elle soit « adaptée à la réalité sociale ». Selon lui, elle doit être appliquée à tous les domaines de la vie, « y compris l’action gouvernementale », car des lacunes entraîneraient une perte de confiance dans les autorités, notamment à long terme.

C’est l’Assemblée législative qui se charge des réformes. Par conséquent, Bernhard Franke demande au comité ministériel allemand contre le racisme de mettre la question à l’ordre du jour.

« Nous ne pourrons combattre la violence si nous traitons la discrimination quotidienne comme une considération secondaire », affirme-t-il.

Les eurodéputés exigent la condamnation des brutalités policières en Europe

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