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L’annexion d’une partie de la Cisjordanie par Israël serait contraire au droit international estiment des experts de l’ONU

La barrière entre Israël et la Cisjordanie à Béthléem
Photo : ONU Info / Reem Abaza
La barrière entre Israël et la Cisjordanie à Béthléem

L’annexion d’une partie de la Cisjordanie par Israël serait contraire au droit international estiment des experts de l’ONU

Paix et sécurité

Plus de cinquante experts et rapporteurs spéciaux des droits de l’homme ont estimé mardi que l'accord du nouveau gouvernement de coalition d'Israël visant à annexer des parties importantes de la Cisjordanie palestinienne occupée après le 1er juillet violerait un principe fondamental du droit international.

« L'accord du nouveau gouvernement de coalition d'Israël visant à annexer des parties importantes de la Cisjordanie palestinienne occupée après le 1er juillet violerait un principe fondamental du droit international », ont déclaré les experts et rapporteurs de quarante-sept des mandats indépendants des procédures spéciales nommés par le Conseil des droits de l'homme.

« Il doit être rejeté de manière significative par la communauté internationale », ont-ils souligné mardi dans une déclaration commune.

Les rapporteurs spéciaux et experts rappellent que l’annexion d'un territoire occupé constitue une violation grave de la Charte des Nations Unies et des Conventions de Genève. Une telle annexion est contraire à la règle fondamentale affirmée à maintes reprises par le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale des Nations Unies, selon laquelle l'acquisition de territoire par la guerre ou la force est inadmissible.

Ils font valoir que la communauté internationale a interdit l'annexion précisément parce qu'elle incite à la guerre, à la dévastation économique, à l'instabilité politique, aux violations systématiques des droits de l'homme et à la souffrance humaine généralisée. 

« Les plans d'annexion annoncés par Israël étendraient la souveraineté sur la plus grande partie de la vallée du Jourdain et sur l'ensemble des plus de 235 colonies israéliennes illégales en Cisjordanie. Cela représenterait environ 30 % de la Cisjordanie », ont déploré les experts.

« L'annexion de ce territoire a été entérinée par le plan américain "Peace to Prosperity", publié fin janvier 2020 », ont-ils précisé.

Les experts rappellent qu’à de nombreuses reprises, les Nations Unies ont déclaré que l'occupation israélienne, vieille de 53 ans, est la source de profondes violations des droits de l'homme à l'encontre du peuple palestinien. Ces violations comprennent notamment la confiscation de terres, la confiscation de ressources naturelles, la démolition de maisons, le transfert forcé de population, ainsi que les expulsions et déplacements forcés, les détentions arbitraires, mais aussi l'insécurité alimentaire.

Pour les signataires de la déclaration, l'occupation israélienne depuis un demi-siècle a signifié avant tout le déni du droit à l'autodétermination des Palestiniens.

Bantoustan palestinien

« Ce qui resterait de la Cisjordanie serait un bantoustan palestinien, des îles de terre déconnectées, complètement entourées par Israël et sans lien territorial avec le monde extérieur », ont mis en garde les experts.

« Ainsi, le lendemain de l'annexion serait la cristallisation d'une réalité déjà injuste : deux peuples vivant dans le même espace, dirigés par le même État, mais avec des droits profondément inégaux. C'est la vision d'un apartheid du 21e siècle », ont-ils fait valoir.

Rappelant que le Conseil de sécurité a critiqué à plusieurs reprises les colonies israéliennes, les qualifiant de violation flagrante du droit international, les experts ont regretté l’absence de réponse de la communauté internationale face au mépris d'Israël pour les résolutions du Conseil et à son enracinement continu dans les colonies.

Pour les experts, la communauté internationale a cette fois-ci la responsabilité juridique et politique solennelle de défendre un ordre international fondé sur des règles, de s'opposer aux violations des droits de l'homme et des principes fondamentaux du droit international et de donner effet à ses nombreuses résolutions critiquant la conduite d'Israël dans le cadre de cette occupation prolongée.

« La responsabilité et la fin de l'impunité doivent devenir une priorité immédiate pour la communauté internationale », ont insisté les experts.

« Elle dispose d'un large éventail de mesures de responsabilisation qui ont été largement et avec succès appliquées par le Conseil de sécurité des Nations Unies dans d'autres crises internationales au cours des 60 dernières années », ont-ils ajouté.

Selon eux,les mesures de responsabilisation choisies doivent être prises en pleine conformité avec le droit international, être proportionnées, efficaces, soumises à un examen régulier, conformes aux droits de l'homme, au droit humanitaire et au droit des réfugiés, et conçues pour défaire les annexions et mettre fin à l'occupation et au conflit de manière juste et durable. Les Palestiniens et les Israéliens ne méritent pas moins.

Au terme de leur déclaration, les experts regrettent vivement le rôle joué par les États-Unis d'Amérique dans le soutien et l'encouragement des plans illégaux d'Israël visant à poursuivre l'annexion des territoires occupés.

« À de nombreuses reprises au cours des 75 dernières années, les États-Unis ont joué un rôle important dans la promotion des droits de l'homme dans le monde », ont déclaré les experts.

« A cette occasion, elle devrait s'opposer ardemment à la violation imminente d'un principe fondamental du droit international, plutôt que de s'en faire le complice actif », ont-ils conclu.

Note

Les Rapporteurs spéciaux font partie de ce que l'on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les procédures spéciales, le plus grand organe d'experts indépendants du système des droits de l'homme des Nations unies, est le nom général des mécanismes indépendants d'enquête et de surveillance du Conseil qui s'occupent soit de situations de pays spécifiques soit de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire ; ils ne font pas partie du personnel des Nations unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et travaillent à titre individuel.