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De nouvelles preuves de la présence de César et ses légionnaires à Gergovie en 52 avant Jésus-Christ

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Une fouille préventive conduite par l'Inrap a permis de retrouver une partie des ouvrages militaires romains édifiés au cours de l'été 52 avant notre ère par les légionnaires de César qui assiégeaient Gergovie. Les archéologues se sont appuyés sur des fouilles réalisées sous le Second Empire.

Une partie du fossé sud du grand camp de Jules César mis au jour par  l'INRAP sur la commune d'Orcet Puy-de-Dôme Une partie du fossé sud du grand camp de Jules César mis au jour par  l'INRAP sur la commune d'Orcet Puy-de-Dôme
Une partie du fossé sud du grand camp de Jules César mis au jour par l'INRAP sur la commune d'Orcet Puy-de-Dôme © Radio France - Jean-Pierre de Mongelas

Gergovie, au même titre qu’Alésia, est un lieu emblématique de la guerre des Gaules. C'est devant cet oppidum, lieu de naissance de Vercingétorix situé au cœur du territoire arverne, que César connaît l'une de ses rares défaites au cours de la guerre de conquête qu’il conduit en Gaule entre 58 et 51 avant notre ère. En 53, les peuples du centre de la Gaule supportent de moins en moins la présence romaine. Le soulèvement général débute l’année suivante à Cenabum (Orléans) chez les Carnutes. Les Arvernes, auxquels se joignent plusieurs peuples de l’ouest et du centre, prennent la tête de l’insurrection. Après la chute d’Avaricum (Bourges) et le massacre de sa population, la guerre est portée au cœur même des terres de Vercingétorix. Devant Gergovie, la machine militaire romaine s’enraye et César doit battre en retraite.

Le dispositif militaire romain comprend un camp principal, dénommé le "grand camp" situé probablement dans la plaine et un second camp, appelé le "petit camp", installé sur la colline située au pied de l’oppidum. Un ouvrage relie les deux camps. La bataille de Gergovie mobilisera six légions plus des Gaulois ralliés à César, c'est-à-dire 50.000 hommes au total et plusieurs centaines de machines de siège. Sur le plateau, 50.000 Gaulois sont rassemblés prêts à livrer bataille. C’est Napoléon III de 1861 à 1862 qui fait le premier établir, par l’intermédiaire de recherches d’ampleur, la position précise des fortifications césariennes devant Gergovie.

Borne érigée en 1862 pour marquer l’emplacement des fouilles conduites sous le règne de Napoléon III
Borne érigée en 1862 pour marquer l’emplacement des fouilles conduites sous le règne de Napoléon III © Radio France - Jean-Pierre de Mongelas

Regain d'intérêt pour les ouvrages césariens au pied de Gergovie

En 1994 et 1995, une première campagne de prospection a permis la collecte de mobilier caractéristique de l’armée romaine de la fin de la République, des projectiles entre autres choses. C’est dans ce cadre que se placent deux fouilles, réalisées à la suite d’un projet de construction de maisons individuelles, d’un petit secteur localisé immédiatement à proximité de l’angle sud-est du grand camp. Bien que d’emprise limitée (3.000 m²), elles ont permis de retrouver le fossé principal servant à la délimitation du camp romain sur son côté sud, à quelques mètres de l’une des bornes installées à l’issue des fouilles de 1862. Cet ouvrage, qui n’avait pas été revu depuis 160 ans, a pu être fouillé sur une trentaine de mètres. Il s’agit, à ce jour, de la plus grande portion fouillée d’un seul tenant pour l’ensemble du dispositif romain devant Gergovie. 

"Les camps romains étaient souvent carrés ou rectangulaires et délimités par un fossé en V à profil très aigu de deux mètres de profondeur environ avec un remblai de deux mètres au-dessus ce qui faisait une sorte de rempart pour assurer la défense du campement", explique Yann Deberge le responsable du chantier de fouille à l'Inrap Auvergne. "Au départ, nous nous sommes appuyés sur les relevés effectués à la demande de Napoléon III en 1861 et 62 et nous pouvons confirmer que c'est bien ici qu'était installé le grand camp de César dans la plaine à trois kilomètres à vol d'oiseau de l'oppidum de Gergovie. Nos fouilles ont permis aussi de collecter quelques éléments de mobilier qui confirme l'époque romaine. Notamment un objet typique des cantonnements militaires romains." 

Piquet de tente romain
Piquet de tente romain - Denis Gliksman-Inrap

Un mobilier peu abondant mais caractéristique

"Il s’agit d’une fiche en fer d’une vingtaine de centimètres pointue d'un coté et qui comporte une perforation à l’autre extrémité, c'est un piquet de tente, une sardine car n'oublions pas que les légionnaires en campagne dormaient dans des tentes par groupes d'une dizaine", poursuit le responsable du chantier de fouille à l'Inrap Auvergne_. "Nous avons également trouvé des petits clous de chaussures qui ont la particularité d'avoir un relief sur la tête, ce sont sans doute des marques de fabrique. Il faut savoir qu'au milieu du 1er siècle avant Jésus-Christ, les seules personnes qui portent des chaussures cloutées, ce sont les légionnaires romains. Tout cela confirme un peu plus l'existence d'un camp militaire romain."_ Le peu de mobilier trouvé au cours de ces fouilles s'explique par la durée d’occupation du camp. Deux ou trois semaines, selon Yann Deberge. Comme il s'agit d'un campement, il n'y avait pas d'installation en dur et très peu d'objets de la vie courante ont été perdus.

Clous de chaussure de légionnaire romain
Clous de chaussure de légionnaire romain - Denis Gliksman-Inrap

Avec la découverte de four à pain nous allons pouvoir commencer à comprendre comment s'organisait le camp - Yann Deberge

Il y a peu de temps, la connaissance de l’organisation interne des camps liés à la guerre des Gaules était encore extrêmement lacunaire. Elle le demeure encore largement, même si sur plusieurs sites, et Gergovie en fait partie, des découvertes nouvelles permettent de faire évoluer le dossier. C’est notamment le cas de la mise en évidence de fours culinaires de petite dimension qui sont pourvus d’un espace de cuisson en forme de coupole creusé dans le sous-sol et auquel une fosse permet l’accès. 

Quatre de ces petites installations culinaires, qui permettaient à une « chambrée » de légionnaires de préparer leurs repas, ont été retrouvées à l’occasion des deux fouilles conduites dans ce secteur du camp césarien devant Gergovie. "Sur les camps romains, il n'y a pas de cantine généralisée", explique Yann Deberge "les légionnaires répartis par petits groupes de 10 par tente s'organisent pour cuisiner eux-mêmes les repas. Grâce à la disposition des fours dans le campement, on va passer du stade la vérification du tracé des camps à la phase suivante qui consiste à comprendre comment ils étaient organisés en interne, en particulier les espaces de circulation, voilà pourquoi nous considérons ces découvertes faites à Orcet comme essentielles". 

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