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Archéologie

Des traces de pollution retrouvées sur l’ancien site maya de Tikal

Des chercheurs américains ont apporté la preuve d’une pollution importante de certains réservoirs d’eau potable de l’ancien site maya de Tikal. Le mercure et les algues identifiés rendaient l’eau du site impropre à la consommation.

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Temple du Grand Jaguar, au coeur du parc national de Tikal

Le site a été abandonné à la fin du 9e siècle de notre ère.

MANUEL VALDES/AP/SIPA

Classé au patrimoine mondial de l’Unesco depuis plus de 40 ans, le site maya de Tikal (Guatemala) est aujourd’hui le terrain de jeu des chercheurs de l’Université de Cincinnati (UC, Ohio, Etats-Unis). Dans un article publié le 25 juin 2020 dans la revue Scientific Reports, les chercheurs font état d’un taux important de mercure, de phosphates et d’algues bleues toxiques dans deux des quatre réservoirs d’eau potable de la ville. Ces composés auraient rendu l’eau non seulement imbuvable, mais également toxique pour ses consommateurs.

"Le mauvais côté de ces algues est qu'elles résistent à l’ébullition", précise dans un communiqué David Lentz, professeur de sciences biologiques à l'UC et auteur principal de l’étude. "Même bouillie, la consommation de cette eau aurait rendu les gens malades." Un problème majeur pour ce site en plein cœur de la forêt tropicale, pour lequel les réservoirs étaient la seule source durable d’eau pour cuisiner, boire ou encore irriguer les terres.

Une pollution d’origine humaine

Selon les chercheurs, le mercure présent en grande quantité dans les réservoirs aurait une origine anthropique. Il serait plus précisément dû au cinabre, un pigment rouge vif très prisé par les Mayas. Obtenu à partir de sulfure de mercure (HgS), celui-ci était utilisé en Amérique centrale pour orner les bâtiments, pour les teintures ou encore lors de cérémonies funéraires. Au fil des années et à cause des saisons pluvieuses, le mercure se serait ainsi petit à petit infiltré dans les deux réservoirs principaux du site, pour atteindre jusqu’à 17 fois le seuil de toxicité dans les années 800.

Le cinabre était extrait d’une formation volcanique proche de Tikal. Crédit : Géry Parent

Les analyses géochimiques ont de plus révélé de grandes quantités de phosphates remontant à la même période. Ces fortes concentrations sont les marqueurs d’une augmentation de la pollution organique dans les réservoirs, via notamment les déchets alimentaires et la contamination fécale. Les Mayas auraient donc pollué leurs propres ressources jusqu’à les rendre inutilisables...

Une pollution fatale aux Mayas ?

Célèbre de par ses temples et architectures spectaculaires, l’ancienne cité maya de Tikal l’est tout autant par le mystère qui plane autour de son abandon soudain, au 9e siècle de notre ère. Si les hypothèses actuelles penchent pour des facteurs économiques et sociaux (compétitions entre cités-États, rois désacralisés…) couplés à une sécheresse pluridécennale, les chercheurs de l’UC pensent que leur découverte était le dernier élément manquant pour expliquer ce départ précipité.

Les pics de pollution des réservoirs coïncident en effet avec l’apogée de la population et précèdent de peu le déclin et le départ de cette dernière. Cette difficulté à trouver de l’eau aurait donc "contribué au dépeuplement et à l’abandon final de la ville", selon David Lentz.

Si la pollution des réservoirs d’eau en elle seule ne suffit pas à expliquer le départ des Mayas, celle-ci peut en revanche être la raison pour laquelle le site n’a pas été réoccupé après la fin de la sécheresse. L’équipe de chercheurs de l’Université de Cincinnati prévoit de retourner à Tikal dans les prochaines années pour finir de répondre à cette mystérieuse question.

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