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Sept mots à l’origine chinoise que vous employez sans le savoir

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Ce sont des termes qui font la poésie de nos livres et de nos cuisines. Florilège.

Ce sont des mots que l’on emploie sans le savoir. À table, lorsqu’on cherche un accompagnement pour ses frites, à la terrasse d’un café, quand on échange un verre ou bien dans sa cuisine, si l’on cherche un thé pour lutter contre la fatigue. Les termes originaires de la langue chinoise font intimement et joliment partie de la langue française. Florilège.

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Tchin-tchin, «je vous en prie»

Eh oui! Bien que les Français soient d’illustres buveurs, ce n’est pas à Rabelais ni même à Molière que l’on doit l’expression. Selon Le Trésor de la langue française, elle provient de «tsing tsing» qui signifie «salut» en pidgin anglo-chinois de la région de Canton, en Chine. Le pidgin étant le nom donné au «système linguistique formé d’anglais modifié et d’éléments autochtones, servant de langue d’appoint en Extrême-Orient».

Mais comment serait-elle parvenue en France? D’après le sinologue Jacques Pimpaneau qui raconte l’histoire de la locution dans son ouvrage Célébration de l’ivresse (Éditions Philipe Picquier) et ainsi que le note la journaliste Ophélie Neiman dans Le vin c’est pas sorcier (Marabout), «tchin-tchin» date de l’époque de Napoléon III. De retour en France, les soldats qui avaient fait la campagne de Chine sous l’empereur, expliquèrent que les Chinois buvaient en échangeant des tchin-tchin. En l’occurrence, ils ne disaient pas vraiment «tchin-tchin» comme on le prononce à la française, mais «qing qing», soit «je vous en prie».

À noter que la formulation peut très bien s’écrire «tchin-tchin» et «tchin tchin» sans trait d’union.

De la saumure de poisson au ketchup

Restons dans un registre gastronomique et étudions un peu ce condiment que l’on déguste à tous les plats (ou presque). Il faut tout d’abord préciser que le sens originel du ketchup n’est pas assuré. L’emploi du conditionnel est donc à prendre en compte. Selon Le Dictionnaire historique de la langue française (Le Robert), le terme est attesté dans un premier temps sous les formes «katchup» (en 1785, à Québec), «catchup (en 1815, en français du Canada), Ket-Chop puis «catsup» et même «calchup».

Est-ce à dire que le mot «ketchup» tel qu’on le connaît est né hier? Non. On le note déjà sous sa forme, mais en anglais, au début du XVIIIe siècle. Cependant, il apparaît sous différentes orthographes «catchup» (1690) et «kitchup», qui serait lui-même emprunté au chinois. En effet, le mot viendrait de «kôe chiap» ou «kê tsiap», deux formulations qui désignaient la «saumure de poisson». Rien à voir avec la pâte de tomate. Et encore! La locution chinoise pourrait être issue du malais «kêchap», signifiant «goût».

Du thé grâce aux Néerlandais

Et le thé là-dedans? Ne croyons pas que les Britanniques y soient pour quelque chose! En effet, et ainsi que l’indique Le Dictionnaire historique de la langue française, le mot est «emprunté au malais teh, te ou à un mot t’e de dialectes chinois méridionaux par le néerlandais». Le tout, précise le thésaurus, «dans des textes en latin moderne». Un sacré chemin! D’autant que l’art de boire le thé n’est pas récent. La botanique et la médecine chinoises font remonter son usage au IIIe millénaire avant l’ère chrétienne. Elle servait alors à soulager les fatigues, «fortifier la volonté» et même à «ranimer la vue».

Les premières attestations du mot «cha», tout droit dérivé du terme actuel chinois «cha», en Occident remontent au IXe siècle. Mais ce n’est que bien plus tard, à l’aube du XVIIe siècle, que la plante finit par être importée en Europe. Toujours d’après Le Dictionnaire, c’est grâce à la Dutch East Company que le thé put arriver jusque dans nos tasses.

À noter que la transcription du mot chinois en portugais (chá), en russe (tchaï), en turc (çay) est totalement transparente.

Des hommes ginsengs

Plus transparent que les termes précédents, le «ginseng» n’en reste pas moins intéressant pour son histoire. Ainsi qu’on peut le lire dans Le Trésor de la langue française, le terme attesté dès le XVIIe siècle vient de deux mots chinois: jên (homme) et shên (plante). En effet, on considère qu’il existe une ressemblance entre la racine de la plante et le corps humain. Au consommateur d’en juger...

De la même façon l’origine du litchi est claire. Mais saviez-vous que le mot, emprunté au chinois «li-chi», nous a été rapporté par l’intermédiaire de récits de voyage portugais et espagnols? C’est ce que note Le Dictionnaire historique de la langue française. Il est alors, au XVIe siècle, attesté sous la forme «lechia». Ce n’est que deux siècles plus tard, en 1721, qu’apparaît enfin le «litchi».

Un «haï-ku» et des «westerns sojas»

Le «haï-ku», petit poème qui sait en peu de mots décrire l’évanescence du monde, ne viendrait peut-être pas du japonais. Comme on peut le lire dans Le Dictionnaire historique de la langue française, «haïkaï», «haï-kaï» ou «haï-ku» est un mot japonais attesté en 905, comme titre d’une section d’une anthologie, sous la forme haïkaï-ka. On peut retrouver cet emploi dans le titre du recueil Pour vivre ici, onze haï-kaïs de Paul Eluard. Cela étant dit, «il est un terme d’origine chinoise signifiant ‘‘poème mettant en œuvre les jeux de l’esprit’’».

Il se pourrait que le mot soja ne soit pas non plus issu du japonais. D’après Le Trésor de la langue française, le mot serait probablement issu par l’intermédiaire du néerlandais soja, au japonais shoyu «sauce de soja» et celui-ci au chinois. En cantonais, on le note sous la forme tséung-yau et en mandarin chiang-yu, ce qui signifie littéralement «huile de soja», de chiang «soja» et yu «huile». Toutefois, ainsi qu’on le note dans Le Dictionnaire historique de la langue française, «c’est très probablement le néerlandais qui a transmis, par le japonais, le mot à l’Occident».

À noter que si l’on utilise la formule «western spaghetti» pour parler des westerns produits en Italie, on emploie l’expression «western soja» pour «désigner un film d’action et d’aventures tourné en Extrême-Orient et dont les personnages sont asiatiques».


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Sept mots à l’origine chinoise que vous employez sans le savoir

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8 commentaires
  • Berjidet

    le

    Donc tchin tchin vient du chinois et utilisé encore en Chine dans le même contexte ; mais à ne pas utiliser au Japon, d’après les articles parus au moment du mondial de rugby, puisque étant évocateur du pénis chez eux... Curieux !

  • Hérétique

    le

    N'emploi-t-on dans le français "han-shin", la boisson chinoise fortement alcoolisée ?

  • Rene Mettey

    le

    "ils ne disaient pas vraiment «tchin-tchin» comme on le prononce à la française, mais «qing qing», "
    et comme en pinyin (transcription officielle chinoise) le q se prononce tch...
    L'empereur fondateur de la Chine s'appelait Qin (prononcé...Chin'), et la dynastie qui se termina avec Pu Yi était la dynastie Qing ("tching" !).
    Donc les Chinois disent bien "tchin-tchin"...