Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Le naufrage économique de la classe moyenne au Liban : « La “Suisse du Proche-Orient” va devenir un nouvel Afghanistan »

La dépréciation de la monnaie nationale face au dollar et la hausse du prix des denrées de base ont anéanti le pouvoir d’achat de la population.

Par  (Beyrouth, correspondance) et  (Beyrouth, correspondant)

Publié le 16 juillet 2020 à 04h05, modifié le 04 août 2020 à 20h49

Temps de Lecture 8 min.

Article réservé aux abonnés

Une file d’attente devant un bureau de change à Beyrouth, le 17 juin.

Dans les travées du supermarché Fahad, à Furn Al-Chebbak, un quartier de la classe moyenne chrétienne de Beyrouth, les clients poussent leur chariot en traînant les pieds. Ils attrapent un produit, blêmissent à la vue du prix, le reposent d’un air dépité, et repartent errer entre les rayons. « Faire les courses est devenu ma hantise », confie Gloria, une sexagénaire en jean et tee-shirt, qui vit sur l’épargne de son mari ingénieur, décédé il y a quelques années. « Nous autres, Libanais, on était habitués à un certain confort de vie. Mais, aujourd’hui, avec la crise, on ne peut plus rien acheter. La “Suisse du Proche-Orient”, le surnom qu’on donnait à notre pays, va devenir un nouvel Afghanistan », ajoute-t-elle avant d’aller inspecter les prix des légumes.

Le cataclysme financier qui s’est abattu, au printemps, sur le Liban a anéanti le pouvoir d’achat de la population. Les Libanais, qui n’avaient déjà plus accès à leur épargne en dollars depuis l’automne 2019, à la suite des restrictions imposées par les banques, en réaction à la crise de liquidités, doivent composer, depuis juin, avec deux fléaux supplémentaires : l’effondrement à toute allure de la monnaie nationale, qui oscille ces derniers jours sur le marché noir entre 7 500 et 9 500 livres pour 1 dollar, alors que le taux officiel est de 1 500 ; et la hausse vertigineuse du prix des denrées de base, multiplié par deux ou trois, comme le kilo de viande de bœuf, aujourd’hui facturé 50 000 livres, contre 18 000 deux mois plus tôt.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Le Liban précipité dans l’abîme

Ce double phénomène, dépréciation et hyperinflation, est en train de chambouler le profil socio-économique du Liban. Traditionnellement considéré comme un pays à revenu moyen supérieur, il se retrouve subitement rétrogradé au rang des Etats à bas revenu. Au taux de 10 000 livres pour 1 dollar, qui a pratiquement été atteint la semaine dernière, le salaire minimum libanais, fixé à 675 000 livres par mois, soit 450 dollars (393 euros) officiellement, ne valait plus que 67 dollars (58 euros), soit le niveau du smic… en Afghanistan.

Ce déclassement affecte toutes les catégories sociales, mais il est particulièrement visible parmi la classe moyenne, le socle du pays, projetée dans un processus de paupérisation foudroyant. « C’est du jamais-vu, dit Talal Salman, 82 ans, ancien directeur du défunt quotidien As-Safir et « mémoire » du Liban. Pendant la guerre civile [1975-1990], l’argent coulait à flots, car chaque faction avait son bailleur de fonds étranger. Aujourd’hui, le pays suffoque. La classe moyenne est en train de disparaître. Notre passé, pourtant si douloureux, nous fait rêver par rapport à ce qui nous attend. »

Il vous reste 74.5% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.