Violences conjugales : « J’ai été sa chose pendant 40 ans »

Par Patrick Certain

Les vacances passées en Guadeloupe ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase pour un couple de cadres vannetais. Blessée à la suite de coups portés par son mari, l’épouse a alors dénoncé 40 années d’humiliations et frustrations. Le coupable écope de prison avec sursis et devra se faire soigner.

Violences conjugales : « J’ai été sa chose pendant 40 ans »
(FRANCOIS DESTOC/LE TELEGRAMME)

Début mars dernier, juste avant le récent confinement, les vacances en Guadeloupe se sont achevées dans la violence pour un couple, bien établi à Vannes depuis de longues années. À l’issue d’une soirée alcoolisée, la femme a reçu des coups portés par son époux, sous prétexte qu’elle se serait ridiculisée, sous l’effet du rhum, par ses propos en présence d’amis. Sous la violence, elle est tombée à la renverse et s’est sérieusement blessée. Craignant de nouvelles représailles conjugales, elle n’est pas allée consulter un médecin sur place et a attendu son retour en métropole pour aller porter plainte auprès de la police à Vannes, certificat médical cette fois à l’appui, en dénonçant au final des violences physiques et morales qui duraient depuis des années.


« Un tyran en famille »


Au tribunal, la présidente lit au mari les déclarations que son épouse a faites aux policiers pour expliquer le climat dans lequel elle vit depuis leur rencontre en 1979 : elle a été obligée de cesser ses études pour le suivre lors de son installation à Vannes, il lui a été interdit de porter des vêtements colorés mais aussi de continuer de voir ses amis, de faire du sport et d’aller au cinéma, il est devenu jaloux des deux enfants qu’ils ont adoptés, il refuse de reconnaître le cancer et le lourd traitement médical qu’elle subit.

Devant les juges, la victime ne mâche pas ses mots : « Pendant des années, je me suis adaptée en permanence à lui par amour. Mais c’est un pervers narcissique : à l’extérieur il est charmant mais en famille c’est un tyran qui n’est jamais bien nulle part. Il me faisait du chantage au suicide. Il voulait tout contrôler et me disait que je ne servais à rien. Il m’obligeait à me peser tous les jours pour me dire que j’étais grosse ! J’ai été sa chose pendant 40 ans. Depuis que nous ne vivons plus ensemble, je n’ai plus de boule au ventre ». Pour la procureure, « au-delà des coups portés en Guadeloupe, cette femme vivait en permanence dans le stress. Les violences morales sont aussi destructrices que les violences physiques ».


Quatre claques


Cadre supérieur dans la fonction publique tout comme sa femme, le prévenu, âgé de 58 ans, se défend : « J’ai toujours porté mon épouse. Je n’avais pas d’emprise sur elle. Je l’ai valorisée quand sa famille ne la soutenait pas. Je lui ai mis quatre claques au début de notre mariage, mais il n’y a pas eu de violences physiques. En Guadeloupe, je reconnais qu’il y a eu ce que j’appelle une altercation, qui a provoqué une cassure ». Mais l’expertise médicale de la victime a relevé que « celle-ci a ses ressources psychiques atteintes de longue date » et les parents de l’épouse et la fille du couple ont aussi affirmé, lors de l’enquête, que le prévenu humiliait fréquemment sa femme. « Au bout de 30 années de mariage, il y a des choses que je n’acceptais plus. Elle ne décidait rien et cela devenait pesant », se justifie ce dernier, en pleurant à la barre.

Le tribunal a décidé de condamner le mari coupable à huit mois de prison avec un sursis probatoire durant deux ans, avec obligation de soins et interdiction de contact avec la victime. Le montant des dommages qui seront accordés à la femme sera déterminé à l’automne par les juges.

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