"Je prends plaisir à jouer la carte de l'atypique" : qui sont les adultes à haut potentiel ?

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"Je prends plaisir à jouer la carte de l'atypique" : qui sont les adultes à haut potentiel ?

Qui sont les adultes à haut potentiel ?
Qui sont les adultes à haut potentiel ?
© Getty - ArtistGNDphotography

Et si le bonheur était une affaire d'intelligence ? C'est la question posée par Daniel Fiévet dans l'émission "L'été comme jamais". Avec ses trois invités, il a été question de l'intelligence, des enfants puis adultes surdoués. Mais comment reconnaître un adulte surdoué ou à haut potentiel ?

"Les surdoués sont statistiquement plus grands, plus robustes et plus sportifs que les autres. Ils sont également plus myopes" s'amuse Gabriel Wahl, psychiatre des enfants et des adolescents. Il rappelle bien sûr qu'il s'agit d'un fait statistique qui appelle à des exceptions. Daniel Fiévet revient sur les adultes surdoués avec Béatrice Millêtre, psychothérapeute et spécialiste des sciences cognitives et Marion Bartoli, tenniswoman et surdouée.

On considère aujourd'hui que 2% de la population française est surdouée. Dans la Courbe de Gauss, le surdon commence à un QI de 130. Gabriel Wahl parle de ce QI de 130 d'un "surdon ordinaire", qui correspond à une moyenne de ceux qui font de hautes études, et de grandes écoles. Lorsque cela commence à grimper vers 140 ou plus, on peut alors dire qu'il s'agit d'une personne sur 1000. 

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Il y a une palette de surdon qui va du surdon ordinaire à un vrai surdon qui s'épanouit dans l'innovation, dans la créativité. 

Des caractéristiques multiples

"Le problème du monde est que les stupides sont sûrs d'eux-mêmes" affirme Bertrand Russel. Les adultes surdoués doutent de tout. Gabriel Wahl, pédopsychiatre, donne un certain nombre des caractéristiques de ces surdoués : 

  • ils réussissent mieux que la moyenne à l'école, dans la vie professionnelle (c'est le cas de la majorité. Quand ils découvrent leur surdon alors qu'ils réussissent déjà, il s'agit d'une continuité, comme quelque chose qu'ils pressentaient déjà),
  • ils n'ont pas plus de problèmes affectifs ou d'anxiété que les autres,
  • ils ont plus d'aptitudes au bonheur, selon Béatrice Millêtre : "Il s'agit d'un paradoxe par rapport aux témoignages que l'on peut lire en ce moment. Les surdoués sont dotés d'une intelligence pure, d'une intelligence sociale et émotionnelle. Ils sont donc plus à l'aise en société."
  • ils sont plus résilients que les autres,
  • ils sont néanmoins plus sensibles. Il leur faut alors accepter cette (hyper)sensibilité, apprendre à s'en servir. Car ce n'est pas un handicap, ajoute Béatrice Millêtre, mais cela peut rendre les choses un peu plus fatigantes.
  • ils analysent plus et mieux certaines situations. Marion Bartoli, tenniswoman, raconte que cette intelligence lui a permis d'analyser des situations plus rapidement, notamment sur un terrain de tennis, sur lequel c'est l'adaptabilité qui prime. Elle témoigne néanmoins d'incompréhensions avec les autres dans l'analyse de ces mêmes situations : "je ne comprends pas comment il fait pour ne pas comprendre".

Quand on parle statistiquement d'une plus grande réussite et d'un plus grand bonheur chez les surdoués, il s'agit, le rappelle Béatrice Millêtre, d'une situation possible quand ils assument le fait d'être surdoués. Fonctionner à contre-courant, c'est ça qui peut les rendre malheureux. 

Mais dans tous les cas, surdoué ou non, c'est de la personnalité dont il faut tenir compte.

Il peut arriver que les surdoués ne soient pas dans une réussite constante (scolaire et professionnelle) et que des problèmes comme des troubles attentionnels ne leur permettent pas d'être excellents. La curiosité intellectuelle est freinée par un problème. Si celui-ci n'est pas identifié, il va contrecarrer la réussite scolaire et professionnelle. 

Grand bien vous fasse !
51 min

Au-delà des statistiques, des témoignages...

Victoire, une auditrice, raconte au micro de Daniel Fiévet : "J'ai été diagnostiquée haut potentiel avec un QI de 160 [Gabriel Wahl affirme plus loin dans l'émission qu'il ne s'agit pas d'un diagnostic mais d'une identification en tant que haut potentiel. Nous laisserons ici telles quelles les paroles des auditeurs]. Je n'ai jamais été brillante à l'école et j'ai une intégration sociale plutôt normale. Les gens sont mêmes déçus de ma 'banalité' quand je leur annonce ce que je suis. Nous ne sommes pas tous stéréotypés. _Nous pouvons vivre normalement voire banalement__._"

Gabriel Wahl affirme qu'en France, il y a une tendance qu'il juge regrettable qui est de surattribuer aux surdoués les problèmes existentiels ou affectifs. Il faut donc détacher le surdon de ces difficultés :

Quand les hauts potentiels sont confrontés à des difficultés, ils ne le sont pas parce qu'ils sont hauts potentiels mais parce qu'ils ont un problème par ailleurs.

Thomas a appelé l'émission pour témoigner : "Je n'aime pas ce mot de 'surdoué', ça met dans une case qui fait que la société attend quelque chose de nous. 'Haut potentiel' est déjà plus ouvert aux capacités autres que l'intelligence comme je la perçois. Quand j'ai été diagnostiqué 'haut potentiel' on m'a dit 'tout devrait être facile pour toi'". 

Thomas raconte ses difficultés d'intégration durant de nombreux années de sa vie et la libération qu'il a ressentie quand on l'a diagnostiqué. Il a alors tenté de s'affranchir des conventions sociales pour être plus à l'aise et plus en accord avec ce qu'il est. "Au quotidien, cela fait sept ans que je le sais, et c'est encore un fardeau dans le regard des autres. Mais je vois mon potentiel aujourd'hui."

Je prends plaisir à jouer la carte de l'atypique. 

... qui traduisent un épuisement et des difficultés néanmoins

Marie-Claude raconte elle son épuisement face au monde : "Je suis épuisée d'avoir essayé en vain pendant 40 ans de ressembler aux autres. Et comme nous vivons dans un monde de plus en plus intolérant à la différence, je me sens de plus en plus seule". Marie-Claude revient sur son parcours scolaire chaotique, composé également de redoublements et d'échecs, puis sur son parcours professionnel qui semble lui laisser un goût amer : "ma vie est un désastre". 

Corinne, identifiée à haut potentiel à 48 ans, affirme : "Concrètement, ça n'a rien changé à ma vie quotidienne, mais ça a tout changé en moi. Ma psychologue m'a annoncé cela (145 de QI), et j'ai fondu en larmes en me disant 'Ce n'est pas ma faute'. J'ai toujours eu du mal, enfant, à avoir des amis, je me calais beaucoup sur ce que les autres attendaient de moi. Et tout d'un coup, ce n'était plus de ma faute. La curiosité idiote que je peux avoir au quotidien fait rire mes amis et ma famille et j'arrive à trouver du positif dans tout. Je suis heureuse aujourd'hui."

Béatrice Millêtre réagit au soulagement dont témoigne Corinne. Certains ne découvrent pas leur surdon, ils en ont l'intuition, mais d'autres le découvrent et ont alors besoin de connaitre la règle du jeu du monde dans lequel ils vivent au quotidien. L'idée est aussi de pouvoir décoder le monde autrement. 

On peut être surdoué et avoir des difficultés scolaires, être malheureux ou ne pas réussir.

ALLER PLUS LOIN

🎧 RÉÉCOUTER L'été comme jamais : Être surdoué.e : une force ou un handicap ?

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