Rentrée

«Ce n’est pas facile, j’ai envie de voir le visage de mes profs»

Compliquant la compréhension des leçons, le masque donne aussi l’impression aux enfants de ne pas connaître leurs enseignants.
par Cécile Bourgneuf
publié le 8 septembre 2020 à 20h11

Alors, cette rentrée ? «Ça se passe bien !» répond sans hésiter la petite Flora, 4 ans, ravie de son entrée en moyenne section. Comme dans toutes les classes de France, sa maîtresse de l'école Hugo-Vialatte, à Saint-Flour dans le Cantal, est masquée. «C'était moins choquant pour elle parce qu'elle avait déjà vu les enseignants après le déconfinement fin juin», assure son père Yann. C'est vrai que la petite dernière de ses trois enfants ne semble pas du tout être dérangée par le port du masque, qu'elle ne voit pourtant qu'à l'école et au marché, où il est obligatoire. Tout de même, au cours de la discussion, la pipelette lâche une remarque loin d'être anodine : «La dernière fois, la maîtresse nous a dit de rentrer après la récré. J'avais pas compris parce que j'entends pas toujours.»

Attention

Ne pas entendre à cause de ce fichu morceau de tissu, voilà le gros problème de Melyna, 8 ans, élève d'une école primaire de Saint-Laurent-du-Var (Alpes-Maritimes). Dans sa classe à double niveau de CM1 et CM2, deux enseignantes se relaient mais le diagnostic est le même : il faut tendre l'oreille à cause des masques. «Je trouve que c'est plus dur de comprendre ce qu'elles disent. Je suis obligée de bien me concentrer pour y arriver», remarque Melyna, pourtant habituée à exercer son attention, puisqu'elle pratique la gym rythmique six à huit heures par semaine. Placée «tout derrière», sur la troisième rangée, elle préférerait «être devant pour mieux entendre». Sa mère Audrey s'interroge : «Elle entend mieux sa voisine donc ça n'aide pas en termes de distraction. C'est une bonne élève mais elle a besoin de quelqu'un qui l'accompagne et, si elle ne comprend pas les cours, ça risque d'être plus difficile. Il y aura un suivi bien plus fort de ma part.» Autre difficulté soulevée par sa fille : ce sentiment de ne pas bien connaître les enseignantes avec ces masques qu'elles n'enlèvent jamais, «sauf pour boire». Melyna a donc filé entre midi et deux dans la bibliothèque pour voir les photos de l'école d'avant-Covid accrochées au mur. Histoire de se remémorer les sourires des maîtresses, qu'elle parvient tout juste à deviner derrière les masques «parce que les joues remontent et les yeux se plient».

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A Paris, Malo, 6 ans, est entré en CP, une année importante dans la vie d'un enfant. «Je vois tout le temps la maîtresse avec le masque et c'est comme si elle était malade, ça me rend un peu triste», dit ce petit blond marqué par les semaines de souffrance de sa mère, touchée par le Covid-19 durant le confinement. Malo a vu le visage de son institutrice une seule fois, il lui a trouvé «l'air gentille». Parce que ce n'est pas le cas quand elle le porte ? «Non, assure-t-il. Je sens quand elle est contente.» Il ne comprend pas toujours mais l'assure, «ça va».

Articulation

Ce n'est pas le sentiment d'Ismaël, 11 ans, qui a fait sa rentrée en sixième dans le Xe arrondissement de Paris, dans la cour des grands donc. «Ce n'est pas facile parce que j'ai des profs différents à chaque fois et j'ai envie de voir leur visage car je ne les connais pas. Ils nous ont tous montré à quoi ils ressemblaient le deuxième jour, mais c'est tout», regrette-t-il. Lui aussi doit porter un masque, une obligation à partir de 11 ans. Ça lui donne chaud mais il supporte. En revanche, il a le sentiment que ses professeurs sont énervés de le porter toute la journée et assure que certains ne font aucun effort d'articulation. «Quand un prof explique quelque chose, on n'entend pas toujours et on lui demande de répéter. C'est assez énervant. Je suis tout derrière et, à chaque fois qu'on change de classe, on garde la même place. Donc c'est plus dur d'entendre pour moi.» Heureusement, les cours sont projetés sur le tableau et Ismaël peut y lire les consignes qu'il n'a pas comprises à l'oral. Malgré tout, il a peur que ce soit «un peu compliqué cette année».

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