Au Myanmar, un poète militant condamné pour avoir dénoncé une coupure internet

L'image montre un homme portant des lunettes et un masque de protection faciale, entouré par d'autres personnes avec un masque. Il regarde la caméra. Un photographe prend une photo, en arrière plan. On distingue le logo RFA (Radio Free Asia), à droite en bas de l'écran.

Maung Saungkha le jour de sa condamnation. Photographie de Radio Free Asia Burmese. Copyright © 1998-2020, RFA. Photographie reproduite avec l'autorisation de Radio Free Asia, 2025 M St. NW, Suite 300, Washington DC 20036.

[Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des pages en anglais, ndlt.]

Un tribunal local du Myanmar a reconnu le poète et activiste Maung Saungkha coupable de violation de la loi sur les rassemblements et les défilés pacifiques.

Maung Saungkha, co-fondateur du groupe de défense de la liberté d'expression Athan, a été inculpé en lien avec une manifestation organisée le 21 juin dans la ville de Yangon [la capitale économique], au cours de laquelle une banderole a été déployée : « L'internet est-il bloqué pour occulter des crimes de guerre et assassiner des gens ? »

Maung Saungkha a été entendu lors de six audiences, entre le 7 juillet et le 21 août. Un officier de police a fait une déposition contre lui, expliquant que le militant avait organisé une manifestation sans en informer les autorités. Sa condamnation a été prononcée le 4 septembre, lorsque le tribunal lui a proposé de choisir entre purger une peine de 15 jours de prison ou payer une amende de 30 000 kyats (22,50 dollars US). Il a choisi cette dernière option.

Le tribunal m'a condamné aujourd'hui à une amende de 30 000 kyats ou à une peine de 15 jours de prison, parce que j'avais lancé une action réclamant la fin de la coupure d'internet dans les États de Rakhine et de Chin. Merci à tous pour votre soutien ✊@pen_int @HRWBurma @amnesty @article19asia @accessnow @athan_info

Cela faisait un an, le 21 juin, que l'internet et les réseaux de communication étaient soumis à des restrictions dans l'État de Rakhine au Myanmar, après les affrontements entre l'armée du Myanmar et le groupe armé Arakan Army. Les opérateurs de télécommunications locaux ont indiqué que les autorités leur avaient ordonné de restreindre les services 3G dans la région jusqu'en octobre 2020.

Athan et d'autres groupes de la société civile ont adressé une pétition au gouvernement pour le rétablissement complet de la connexion internet à Rakhine, en particulier parce que les résidents locaux ont besoin de consulter des informations vitales relatives à l'épidémie de COVID-19.

Dans un courriel adressé à l'organisation de défense des droits humains Human Rights Watch, le 12 août, Maung Saungkha avait déploré le recours systématique à des lois préjudiciables à la liberté d'expression :

I don’t see any signs or attempts to improve the freedom of expression in Myanmar. In my opinion, the government prosecutes people for protesting against the internet shutdown because it still wants to have the internet cut off in those areas.

Je ne constate aucun signe ou tentative visant à promouvoir la liberté d'expression au Myanmar. À mon avis, le gouvernement continue de poursuivre les personnes qui manifestent contre la coupure internet parce qu'il tient à ce qu'internet soit coupé dans ces régions.

Le parti au pouvoir au Myanmar, la Ligue Nationale pour la Démocratie (National League for Democracy, NLD), est arrivé à la tête du pays en 2015, au terme d'une victoire écrasante. Il était dirigé par d'éminentes personnalités du mouvement pour la démocratie, farouchement opposées à la dictature militaire.

La condamnation de Maung Saungkha constitue un autre indice de l'incapacité du NLD à modifier les politiques menées par le précédent gouvernement militaire pour réprimer la dissidence.

Selon les recherches menées par Athan, 91 plaintes pénales ont été enregistrées en vertu de la loi sur les rassemblements pacifiques contre des militants, des étudiants et des manifestants pacifiques, depuis 2015.

Ismail Wolff, directeur régional du groupe de défense des droits humains Fortify Rights, a souligné que Maung Saungkha n'aurait pas dû être poursuivi pour avoir simplement dénoncé une décision politique du gouvernement :

Maung Saungkha may not be in prison this time around but he should never have been arrested in the first place or faced trial simply for defending human rights. These arrests and convictions are part of a systematic attempt to silence those who speak out against human rights abuses.

Maung Saungkha ne se trouve peut-être pas en prison aujourd'hui, mais il n'aurait jamais dû être interpellé ou traduit en justice pour la simple défense des droits humains. Ces arrestations et condamnations relèvent d'une tentative systématique de museler ceux qui s'expriment contre les violations des droits humains.

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