Economiste et essayiste, Nicolas Bouzou est fondateur et directeur du cabinet de conseil Asterès.

"Les écologistes-Potemkine nous font croire que la modernité est coupable alors qu'elle est la solution."

P. CHAGNON/COCKTAIL SANTÉ

Les polémiques sur les sapins de Noël, les maris qui sont des criminels en puissance, l'écriture inclusive ou le porno dans l'ascenseur ont eu au moins un mérite : elles ont révélé au public que certains de ceux qui se prétendent écologistes le sont peut-être un peu, mais secondairement. Moins que moi, sans aucun doute, qui circule à vélo ou en voiture électrique, qui récupère mon eau de pluie, qui donne mes déchets alimentaires à mes poules qui me le rendent bien en déposant leurs fientes dans mon potager. Moins que moi qui travaille et écrit depuis quinze ans sur l'économie circulaire, l'avenir du nucléaire ou la ville intelligente. Il est temps que le mensonge cesse : les dits écologistes ne combattent pas pour l'avenir de l'humanité mais pour son passé. Ils n'aiment pas la civilisation libérale qui nous apporte la technologie, les voyages et le droit, en effet, de regarder du porno. Car ces gens sont aussi des moralisateurs. Vont-ils nous interdire de coucher avec qui on veut au prétexte que l'expiration haletante pendant l'acte sexuel contribue au CO2 ?

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Ces (faux) écologistes paniquent car ils sont en train de perdre leur rente. Mon exemple ne vaut rien à lui seul. La vérité, c'est que l'agriculture, les transports, l'industrie sont en train de se transformer en profondeur. La vérité, c'est que face au gravissime péril climatique, le monde entier est entré en transition avec une ardeur jamais vue dans l'histoire de l'humanité. Le fameux découplage entre la croissance du PIB par habitant et les émissions de CO2 est déjà enclenché dans la plupart des pays, dont la France. Face à la catastrophe, ce mouvement est trop timide, pas assez puissant. Il faut donc l'amplifier : plus de nucléaire pour de l'énergie décarbonée, plus de recherche et développement pour l'écoconception, plus d'investissements dans les centres de tri, de la 5G très vite pour pouvoir faire des smart-cities et pour relocaliser, plus de géno-agriculture pour économiser des intrants et de l'eau, et pour éviter les maladies, des bâtiments rénovés plus vite...

Une modernité coupable

Les écologistes-Potemkine nous font croire que la modernité est coupable alors qu'elle est la solution. Ils refusent les recherches sur la fusion nucléaire qui pourrait conduire à une énergie propre et renouvelable parce qu'ils détestent plus la technologie qu'ils ne s'intéressent au climat. Ils nous disent qu'il faudrait abdiquer nos libertés pour la planète alors que c'est dans les pays libéraux et riches qu'on prend le plus soin de l'environnement, comme en témoigne l'Environnemental Performance Index de Yale. Mais ils n'aiment pas l'entrepreneuriat...

Il y a quelques semaines, le député France Insoumise François Ruffin a tweeté la saillie suivante : "Un ciel sans avions, des routes sans camions, des océans sans super-cargos, une vie simple et un commerce local. Voilà la grande trouille du patronat : que nous vivions mieux, que la planète respire." Il est clair que, dans ce monde de mort (le terrifiant concept de "la vie simple"), la planète "respirera" mieux. Mais ce qu'on demande à des intellectuels et à des politiques dignes de ce nom, c'est de penser un monde joyeux, ouvert, libre, prospère ET qui respire. Pas de nous expliquer que si on fait tout en plus petit, la pollution aussi sera petite, ou que si on ne fait plus d'enfants, il y aura moins d'humains pour polluer.

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Et puis, ce n'est pas le patronat qui serait victime de cette décroissance, mais le peuple de ceux qui, déjà, ont du mal à boucler leurs fins de mois. L'écologisme de la gauche radicale est triste et élitiste. Il veut construire moins. Tant pis pour les jeunes et les pauvres, tant mieux pour les propriétaires. Il ne veut pas de la 5G, beaucoup plus rapide à installer et moins coûteuse que la fibre. Tant pis pour ceux qui n'auront pas internet. Ils n'avaient qu'à naître et vivre au bon endroit. Cet écologisme est petit-bourgeois. Il éloigne le peuple de l'urgence écologique, la vraie.

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