Le Covid fait ses classes

Positive au Covid-19, elle se retrouve avec un zéro à son exam

Chaque semaine, un acteur de cette année scolaire 2020-2021 sous le signe du Covid-19 raconte ce qui se passe derrière les murs des écoles. Aujourd’hui, Iléana Fourtic, étudiante qui devait passer son BTS diététique cette semaine.
par Marie Piquemal
publié le 25 septembre 2020 à 16h50

De l'école à la fac, l'épidémie de coronavirus secoue comme un cocotier. Dans cette nouvelle chronique, Libé recueille des bouts de vie de l'intérieur, derrière les murs des écoles. Des paroles de profs, d'élèves, d'infirmières scolaires, de parents… Qui, au fil des semaines, vont dépeindre par petites touches cette année 2020-2021, forcément à part.

Retrouvez l'épisode précédent «Chaque jour, j'ai deux ou trois élèves absents à chaque cours»

Aujourd'hui, Iléana Fourtic, étudiante, candidate au BTS diététique, et privée d'une épreuve orale par le coronavirus.

«J’étais la personne la plus confinée de France… J’ai passé mon été enfermée dans ma chambre, à réviser comme une folle mes épreuves de BTS diététique. Les épreuves écrites, qui se déroulent en principe en mai-juin, avaient été décalées à la rentrée, et on enchaînait avec les oraux qui, eux, ont toujours lieu début septembre. Quelques jours après l’écrit, je tombe malade. Une copine, qui elle aussi passait l’examen, pareil. Sur le moment, j’étais sûre que c’était le contrecoup, la fatigue. Je fais partie des flippées du Covid, je fais hyper gaffe à tout, je vois quasi personne. Par précaution, on se fait tester l’une et l’autre. Positives. Mon amie, plus âgée, en reconversion professionnelle, est hospitalisée en réanimation.

«J'appelle le lycée, pour les avertir. Dans ma tête, j'étais certaine qu'une solution allait être trouvée. Il n'était de toute façon pas possible de se rendre à la convocation pour les oraux, mon amie était à l'hôpital et moi, j'étais au fond de mon lit, genre dans le top 5 des pires semaines de ma life. Pas en état et surtout contagieuse. Le médecin a été formel : tant qu'on a des symptômes, on est contagieux, même si le délai de sept jours est écoulé.

«Le secrétariat du lycée me renvoie vers le rectorat de Bordeaux. Réponse écrite la veille de l'épreuve. Je vous lis : "Il n'est pas possible de procéder au report de l'épreuve en question, ce qui aurait pour effet de reporter les résultats pour l'académie. Par ailleurs, les services du ministère de l'Enseignement supérieur n'ont donné aucune directive en ce sens pour les élèves malades en cours de session." A la fin de ce mail  [que Libération a consulté, ndlr], il est rappelé qu'en principe, en cas d'absence à une épreuve obligatoire, le candidat a une note éliminatoire. Mais que là, vu que cette absence est «due à une raison de force majeure, [elle] sera sanctionnée par la note de zéro sur vingt», mais que ma situation serait «signalée spécifiquement au jury de délibération». Super.

«Ça fait quatre ans que je prépare ce diplôme»

«Sauf que zéro pour l’épreuve avec le plus gros coefficient (trois), c’est impossible à compenser… Ça équivaut à me renvoyer à l’année prochaine. C’est hyper dur. Ça fait quatre ans que je prépare ce diplôme : une année de remise à niveau, deux ans de BTS et une année supplémentaire en candidat libre pour valider mes stages. C’était ma dernière épreuve, la plus facile en plus : la soutenance de mémoire. Je comprends que ce soit compliqué pour le rectorat d’inventer des solutions. Le contexte est difficile pour tout le monde.

«Mais m’entendre répondre qu’il n’y a pas de solution… Comment ne pas le vivre comme une injustice ? Avec la fièvre et la fatigue, j’en suis venue à douter, à me demander ce que j’avais foiré. Et puis jeudi matin, j’ai décidé de me battre à fond. J’ai saisi la médiatrice de l’Education nationale, j’ai écrit au ministre, partout.. Je rêve de faire ce métier. Etre diététicienne à l’hôpital, et puis un jour peut-être intervenir auprès des jeunes dans les écoles. C’est tellement important de bien manger pour avoir une bonne santé. Je lâcherai pas.»

Contacté jeudi en fin d'après-midi par Libération, le rectorat de Bordeaux n'a, à cette heure, pas apporté d'élément d'explication.

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