Ce nouvel exemple de “répression du HDP, qui prône la reconnaissance culturelle et une plus grande autonomie des Kurdes de Turquie”, selon le Washington Post, intervient dans le cadre d’une enquête sur les violentes manifestations de l’automne 2014, qui avaient fait 37 morts à travers le pays.

La population était descendue dans la rue pour protester contre le gouvernement, resté bras croisés face à la prise par l’État islamique de Kobadié, une ville syrienne à la population majoritairement kurde, située à un jet de pierre de la frontière turque.

“Ankara accuse les responsables du HDP d’avoir appelé la population à manifester”, alors que le HDP accuse au contraire “la police turque d’avoir provoqué les violences”, explique Al-Jazira.

Le parquet “n’a pas donné le détail des chefs d’accusation retenus pour chacune des 82 personnes visées, mais assure que les crimes et délits commis pendant les manifestations incluent meurtre, tentative de meurtre, vol, dégradations, pillages, destruction du drapeau turc et coups et blessures à l’encontre de 326 membres des forces de l’ordre et 435 citoyens”, rapporte le quotidien turc Hurriyet.

Vingt des 82 accusés ont été arrêtés vendredi en Turquie – dont le maire HDP de Kars, Ayhan Bilgen. La plupart des autres seraient à l’étranger ou auraient rejoint la milice séparatiste du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), qualifiée de terroriste par Ankara, les États-Unis et l’Union européenne (UE).

Plus de 1 000 membres du HDP emprisonnés

Il s’agit du “plus grand coup de filet” dans les milieux prokurdes cette année, même si les arrestations de dirigeants du HDP ont été “une constante des cinq dernières années”, remarque El País. “Plus de 1 000 membres du parti sont actuellement sous les verrous”, précise le quotidien espagnol. Parmi eux, ses anciens leaders, Figen Yuksekdag et Selahattin Demirtas, également cités dans l’enquête sur les manifestations, mais déjà emprisonnés depuis 2016.

De nombreuses voix de l’opposition affirment d’ailleurs que les mandats d’arrêt lancés vendredi, pour des faits remontant à plus de six ans, n’avaient d’autre but que de maintenir ces deux leaders derrière les barreaux.

“Ils se focalisent sur les violentes manifestations des 6, 7, et 8 octobre 2014 dans le sud-est du pays, et essaient d’en attribuer la responsabilité à Demirtas et au HDP, comme si le parti avait pu prévoir les violences à venir”, dénonce ainsi Emma Sinclair-Webb, directrice du bureau turc de l’ONG Human Rights Watch, dans les colonnes d’Arab News.

Le procureur d’Ankara a par ailleurs indiqué que sept députés du HDP font partie des suspects et qu’un “récapitulatif des charges retenues contre eux sera envoyé au Parlement, afin de lever leur immunité”, rapporte Bloomberg.