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RDC: des humanitaires accusés d’abus sexuels lors de l’épidémie d’Ebola

Des expatriés, engagés dans la lutte contre Ebola dans l’est de la République démocratique du Congo, ont agressé des employées congolaises

Des soignants dans un centre de traitement d'Ebola à Beni, dans l'est de la RDC, le 16 juillet 2019 — © keystone-sda.ch
Des soignants dans un centre de traitement d'Ebola à Beni, dans l'est de la RDC, le 16 juillet 2019 — © keystone-sda.ch

C’est un nouveau scandale qui touche le secteur humanitaire. Des employées congolaises d’organisations et d’ONG internationales engagées dans la lutte contre l’épidémie d’Ebola vaincue en juin 2020 dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) accusent leurs collègues expatriés d’avoir abusé d’elles. Par le passé, des faits similaires avaient été dénoncés par des femmes en Haïti ou en République centrafricaine. La politique de «tolérance zéro» proclamée par les organisations humanitaires n’a manifestement pas d’effets dissuasifs.

«Il y a une condition. Il faut qu’on fasse l’amour tout de suite», a raconté une jeune femme de ménage à propos d’un médecin de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui lui avait proposé de passer chez lui pour discuter d’une promotion. «Il a commencé à me déshabiller. J’ai reculé, mais il s’est jeté sur moi et a continué à m’arracher mes vêtements. Je me suis mise à pleurer et je lui ai dit d’arrêter… Mais il ne s’est pas arrêté. Alors j’ai ouvert la porte et je suis sortie en courant», poursuit-elle. Son contrat n’a ensuite pas été renouvelé.

Contrats précaires

Ce témoignage et celui de 50 autres femmes ont été recueillis par le site d'information spécialisé The New Humanitarian et par la Fondation Thomson Reuters. Selon leur enquête publiée mardi, les victimes étaient cuisinières, femmes de ménage ou travailleuses communautaires embauchées avec des contrats à court terme et payées entre 50 et 100 dollars par mois. Certaines étaient des survivantes d’Ebola. D’autres témoins, des chauffeurs, décrivent des pratiques très répandues. Une femme a déclaré que l’exigence de rapports sexuels était un «passeport pour l’emploi» dans une région très pauvre et fragilisée par des années de conflit.

La plupart des témoignages visent des expatriés employés par l’OMS, mais des femmes se sont dites victimes d’hommes travaillant pour l’Unicef, l’Organisation internationale des migrations (OIM) ou pour des ONG comme World Vision, Alima et Médecins sans frontières. Selon leurs victimes, les agresseurs venaient de Belgique, du Burkina Faso, du Canada, de France, de Guinée et de Côte d'Ivoire.

L’OMS ouvre une enquête

Juste avant la publication de ces informations, l’OMS a annoncé qu’elle avait ouvert une enquête concernant des accusations d’agressions sexuelles. «Les actions qui auraient été perpétrées par des individus s’identifiant comme travaillant pour l’OMS ne sont pas acceptables et feront l’objet d’enquêtes sérieuses», a assuré l’agence de santé des Nations unies, dans un communiqué.

La RDC combat une nouvelle épidémie d’Ebola, la onzième qui a touché ce pays et qui a provoqué la mort de 50 personnes depuis juin. La précédente avait provoqué 2287 décès pour 3470 cas entre août 2018 et juin 2020. Une somme de 1 milliard de dollars a été investie pour lutter contre cette épidémie et 15 000 personnes ont participé aux opérations d’aide. Seule l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest, en 2013-2016, avait fait plus de victimes.