Tribune. La très sérieuse revue Nature Astronomy a publié dans son numéro du lundi 14 septembre un article sur la détection de phosphine (PH3) dans les nuages de Vénus, une planète souvent considérée, à tort, comme la sœur jumelle de la Terre. Prétendant ne trouver aucune raison naturelle (abiotique) à la présence de cette molécule dans les conditions environnementales de Vénus, les auteurs en concluent, tout simplement, à la présence de vie bactérienne anaérobie dans les nuages de cette planète.
La phosphine est effectivement, sur notre Terre, en partie au moins, un produit de l’activité de certaines bactéries. Les auteurs observent que, puisque la phosphine est considérée généralement comme une biosignature, sa détection à cet endroit signe quasi obligatoirement la présence de vie sur cette planète pourtant particulièrement inhospitalière de par le milieu anhydre et très acide de ses aérosols.
Naturellement, une telle déduction n’est pas passée inaperçue et a donné lieu à nombre de communiqués de presse dithyrambiques, repris sans trop de prudence par de nombreux médias et réseaux sociaux. Pourtant, et malgré le sérieux du processus de relecture auquel un tel article a été soumis, de nombreuses questions, tant de nature scientifique et technique que politique, restent posées concernant une affirmation péremptoire où le spectaculaire a pris le pas sur la réflexion scientifique.
Des contradictions
Tout d’abord, il n’existe aucun consensus scientifique sur la définition d’une biosignature. Aucune molécule isolée, a fortiori simple, ne peut être attribuée de manière certaine à une action biologique. Pour preuve, la phosphine est détectée depuis longtemps dans deux planètes géantes (Jupiter et Saturne) mais aussi dans une enveloppe circumstellaire, sans que l’on puisse préciser les mécanismes détaillés de sa formation. Pour autant, personne n’a jamais revendiqué la présence de vie dans l’atmosphère de ces objets, qu’ils soient planètes géantes ou étoile.
Il est par ailleurs indiqué dans cet article que puisqu’il n’a été trouvé aucune source ni aucun mécanisme abiotique permettant de maintenir l’abondance observée de phosphine, alors l’hypothèse d’une origine biologique est la plus crédible. Cependant, avec une prudence quasi schizophrène, les auteurs avouent ne rien connaître de la chimie des gouttelettes des nuages de Vénus et ne peuvent écarter des mécanismes photochimiques, ou même géochimiques (volcanisme ?), qui pourraient être à l’origine de la phosphine.
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