Le Nobel de chimie à la Française Emmanuelle Charpentier et à l'Américaine Jennifer Doudna
Par Maxime TellierElle est la troisième Française primée par le Nobel de chimie : après Marie Curie, en 1911, et sa fille Irène Joliot-Curie, en 1935, Emmanuelle Charpentier est récompensée avec l'Américaine Jennifer Doudna pour leurs travaux sur le développement d'une méthode d'édition du génome.
Emmanuelle Charpentier espère apporter "un message très fort" aux jeunes filles en gagnant le Nobel 2020 de chimie, un prix scientifique remporté pour la première fois par un duo 100% féminin. La Française s'est exprimée lors d'une conférence de presse organisée par les Nobel peu après la remise du prix, où elle a aussi déclaré qu'elle se considère avant tout comme une scientifique avant d'être une femme de science, "les femmes scientifiques peuvent aussi avoir un impact pour la recherche qu'elles mènent", a-t-elle souligné.
La journaliste Leandra Kristin Morich l'a rencontrée pour Radio France le 16 octobre 2020. Emmanuelle Charpentier évoque la recherche fondamentale, les conséquences de sa découverte il y a huit ans, les différences d'approche entre l'Allemagne et la France et les femmes dans la recherche :
Emmanuelle Charpentier : "Cela démontre aussi que la recherche, à l'heure actuelle, est aussi faite avec des femmes. Et j'espère que ça continuera parce que je vois beaucoup de jeunes femmes scientifiques qui décident d'abandonner la recherche."
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La mise au point d'un "couteau suisse de l'édition du génome"
Emmanuelle Charpentier a 51 ans et travaille à Berlin où elle dirige le centre de recherches Max Planck pour la science des pathogènes. Elle est récompensée aux côtés de l'Américaine Jennifer Doudna, 56 ans, qui a accompli ses travaux à Berkeley en Californie. Généticienne, microbiologiste et biochimiste, la Française a découvert avec sa consœur l'un des outils les plus pointus de la technologie génétique : des nano-ciseaux baptisés CRISPR/Cas9.
L'Académie royale des sciences de Suède souligne que :
Depuis que Charpentier et Doudna ont découvert les ciseaux génétiques CRISPR / Cas9 en 2012, leur utilisation a explosé. Cet outil a contribué à de nombreuses découvertes importantes en recherche fondamentale, et les chercheurs en plantes ont pu développer des cultures résistantes aux moisissures, aux ravageurs et à la sécheresse. En médecine, des essais cliniques de nouvelles thérapies contre le cancer sont en cours, et le rêve de pouvoir guérir des maladies héréditaires est sur le point de se réaliser. Ces ciseaux génétiques ont propulsé les sciences de la vie dans une nouvelle ère et, à bien des égards, apportent le plus grand bénéfice à l'humanité.
En conférence de presse, après l'annonce de son Nobel de chimie, Emmanuelle Charpentier a expliqué que "Cette technologie a eu un impact révolutionnaire sur les sciences de la vie, elle entre dans le cadre de nouvelles thérapies contre le cancer et pourrait permettre de réaliser le rêve de guérir des maladies héréditaires." La scientifique française a aussi indiqué que "Crispr-cas est utilisé pour détecter le coronavirus". Deux start-up américaines, Sherlock Biosciences et Mammoth Biosciences, sont déjà autorisées à vendre leurs tests de diagnostic du Covid-19 aux États-Unis grâce à cette technique, explique Le Figaro.
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Cette chirurgie génétique permettrait de réparer des fragments d'ADN et de les réimplanter dans le corps d'un patient, pour des maladies du sang par exemple, avec un réel espoir de guérison.
Mais ce "couteau suisse" qui bouleverse la génétique n'est toutefois pas sans risques, explique Sophie Bécherel :
Les "ciseaux moléculaires" Crispr, qui bouleversent la génétique. Une technologie prometteuse mais avec des risques de dérive.
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Déjà de nombreux prix, dans les pas de Marie Curie
Les deux femmes ont déjà reçu de nombreux prix scientifiques pour leur découverte (dont le prix Kavli en 2018 pour Emmanuelle Charpentier, voir lien ci-dessous) et sont aujourd'hui les 6e et 7e lauréates récompensées par un Nobel de chimie dans l'Histoire ; la France en comptant trois désormais.
En 1911, Marie Curie avait reçu la prestigieuse récompense pour ses travaux sur le radium et le polonium (en hommage à son autre pays, la Pologne) après avoir été la première femme à gagner un Nobel en 1903 (en physique pour ses recherches sur la radioactivité). Elle reste à ce jour la seule femme à avoir gagné deux de ces prix. Sa fille, Irène Joliot-Curie avait aussi été primée par le Nobel de chimie, aux côtés de son mari Frédéric, pour leurs études sur la radioactivité artificielle.