« Combien de fois il nous faudra être ici pour dire plus jamais ça ? »

Une foule importante était présente place de la République à Paris pour rendre hommage à Samuel Paty, assassiné pour avoir enseigné la liberté d'expression.

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C'est sous des salves d'applaudissements qu'a commencé l'hommage à Samuel Paty, le professeur d'histoire décapité vendredi dans les Yvelines. Une manifestation place de la République organisée à l'appel de Charlie Hebdo. Une place où avait commencé la marche républicaine de janvier 2015 après les attentats visant le journal satirique et l'Hyper Cacher – dont le procès devrait se conclure en novembre prochain. Sur les pancartes et les banderoles, les slogans en soutien au professeur rappelaient ce dimanche que, pour la première fois depuis les attentats de Toulouse en 2012, un enseignant était la victime du terrorisme islamiste en France.

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Place de la République, une foule dense écoute les discours d'hommage à l'enseignant assassiné vendredi après-midi dans les Yvelines.
Place de la République, une foule dense écoute les discours d'hommage à l'enseignant assassiné vendredi après-midi dans les Yvelines.
Pour Jean, 27 ans, venu avec un ami, le dégoût le dispute à la colère : « On en revient à une période que l'on pensait avoir mise derrière nous. » « Qu'ils sachent que nous nous battrons jusqu'au bout par notre attachement à des valeurs de liberté et à notre unité. Merci d'être venus si nombreux », clame le premier intervenant sur un podium entouré de barrières disposées pour l'occasion par les forces de l'ordre. « Il a raison, on devrait être tous ensemble », s'exclame Jean, heureux et triste à la fois de participer « à un moment d'union nationale comme il y en a peu, même si ce sont les enseignants qui sont touchés ». Sur les réseaux, ces derniers jours, ont fleuri quantité de hashtags pour soutenir un corps enseignant saisi par l'horreur.

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« Pour tout le monde, ça a été l'effroi. Depuis 2015, on sait que c'est compliqué pour nous, que l'école est un lieu où la laïcité peut poser problème », explique Sylvie, professeure dans un collège des Yvelines, le même département où enseignait Samuel Paty. « Il faut continuer à assurer notre mission de service public », relève l'enseignante.

Place de la République, en début d'après-midi pour l'hommage rendu à Samuel Paty, l'enseignant assassiné vendredi dans les Yvelines.
Place de la République, en début d'après-midi pour l'hommage rendu à Samuel Paty, l'enseignant assassiné vendredi dans les Yvelines.
#jesuisprof, « Je suis samuel » #pastoucheamonprof, « Protégeons les profs et les éducateurs spécialisés », l'heure était à la mobilisation du côté des enseignants munis de pancartes et peu sensibles à la présence de Jean-Michel Blanquer, attendu en fin d'après-midi. « Ça fait quarante ans que l'administration nous demande de ne pas faire de vagues », accuse une salariée de l'Éducation nationale.

Sur les circonstances du drame qualifié par le président de la République d'attentat « islamiste caractérisé », Antoine*, lycéen, n'est pas surpris. « Ça nous a interpellés », précise sa mère, venue en compagnie de ses trois enfants pour témoigner de l'importance de ce moment. « Avec ce qui s'est passé ces dernières années, ça ne m'a pas choqué, même si je trouve ça intolérable », précise l'adolescent, qui pense que le sujet de la liberté d'expression sera évoqué prochainement dans l'enceinte scolaire. Sous le monument à la République, assailli par les photographes, des groupes se forment. Comme un flash-back : « Je suis Charlie », en 2015. « Encore combien de fois il nous faudra être ici pour dire plus jamais ça ? » s'émeut une salariée de l'enseignement supérieur venue avec ses collègues syndiqués. « C'est vrai qu'il y a une certaine ghettoïsation dans les quartiers, mais, nous, on pose la question des moyens. L'école ne peut pas régler tous les problèmes toute seule », explique Frank, responsable syndical à l'université.

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Résister

Métro République, les bouches de métro sont noires de monde.
Métro République, les bouches de métro sont noires de monde.
À mesure que grossit une foule de plusieurs milliers de personnes, les conversations s'orientent sur l'attitude du professeur d'histoire-géographie, critiqué sur les réseaux sociaux pour avoir montré des caricatures du Prophète. Incompréhensible pour Franck qui salue, au contraire, l'attitude « compréhensive » de l'enseignant convoqué par sa hiérarchie après des plaintes de parents d'élèves. « C'est terrible de désigner quelqu'un à la vindicte populaire », ne pardonne pas Marc, animateur en milieu scolaire. Lui est inquiet du pouvoir grandissant des réseaux sociaux. « Sur Twitter, Facebook, il suffit qu'on vous balance pour être tué ? » s'interroge ce trentenaire après qu'un parent d'élève – placé en garde à vue depuis – a divulgué l'adresse du collège où travaillait Samuel Paty sur Internet.

À la tribune, les témoignages de solidarité se succèdent en même temps que les responsables politiques de gauche et de droite. Passé 17 heures, les bouches de métro en périphérie de la place débordent de monde alors que retentit la Marseillaise. De l'avis de tous présents ce dimanche, un seul mot d'ordre prévalait : « Ne pas céder. »

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*Ce prénom a été changé

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Commentaires (38)

  • Le gars Bardine

    Je ne peux qu'abonder à 100% dans votre sens...

  • L'inconnue

    Nos lois, ils les utilisent déjà contre nous par leur victimisation systématique auprès de juges complaisants... Et d'associations dont c'est le fond de commerce.

  • emigen51

    Je ne décolère pas envers tous ces présidents et ministres qui ont fait le lit de cette terreur islamiste. Qu'on cesse aussi de laisser se propager sur les réseaux sociaux toutes ces vidéos à charge sur nos forces de police! Il y en a vraiment assez de voir toujours les mêmes en marge ou véritablement contre la loi, provoquer les forces de l'ordre sans avoir la moindre crainte d'une sanction judiciaire lourde.