Des gens agglutinés sur une plage, qui embarquent à la hâte sur de petits voiliers pour fuir le danger, les bras chargés d’enfants et d’effets personnels. Ce sont les images que donne à voir cette semaine la une de Savana. L’hebdomadaire mozambicain titre “À la dérive !”, pour donner la mesure du “drame humanitaire” qui afflige actuellement le pays.

Sous la pression djihadiste dans le Cabo Delgado, une province du nord du pays riche en gaz naturel (où des milliards d’euros sont investis par des multinationales étrangères, dont Total), les habitants ont dû, depuis octobre 2017, massivement quitter leur foyer pour échapper aux attaques.

Fuite, choléra, abus sexuels et îles refuges

Les chiffres sont alarmants : “Le nombre de déplacés à l’intérieur du Mozambique a augmenté de 2 700 % en deux ans et représente désormais 1,4 % de la population du pays”, rapporte l’agence de presse Lusa, qui cite un tout récent rapport du Centro de Integridade Pública (CIP), une ONG mozambicaine. Près de 425 000 des 29 millions d’habitants du Mozambique se retrouvent donc sans aide actuellement.

La grande majorité afflue chaque jour dans les rues de la capitale régionale, Pemba, avant de transiter par son port, de sauter sur des “embarcations artisanales” et de se réfugier sur de petites îles au large, un peu plus au nord, décrit Savana.

L’envoyé spécial sur place du journal Domingo évoque une situation qui n’est pas loin d’être “incontrôlable”, face à cette arrivée “massive”, principalement de femmes et d’enfants, dont bon nombre sont touchés par une épidémie de choléra :

La nourriture, les ambulances, les toilettes, les moyens humains et matériels font déjà défaut.”

“Un crime contre l’humanité”, selon le gouvernement

Pis encore : le site Plataforma dénonce de nombreux abus sexuels, en s’appuyant, là encore, sur le récent rapport du CIP. Selon l’ONG, “les autorités locales abusent de femmes et de jeunes filles vulnérables” contre de l’aide humanitaire. Des plaintes déposées sont restées sans lendemain.

Au plus haut niveau de l’État, l’inquiétude est palpable. Le 27 octobre, le ministre de l’Intérieur, Amade Miquidade, a qualifié les attaques armées des terroristes islamistes dans le Cabo Delgado de “crime contre l’humanité”, des propos rapportés par le journal Carta de Moçambique. Selon les différentes estimations, le conflit aurait fait entre 1 000 et 2 000 morts.