LGBT+

Hongrie : le gouvernement veut inscrire le «genre» dans la Constitution

Nouvelle offensive conservatrice : la ministre de la Justice a déposé mardi un projet d'amendement pour inscrire dans la Constitution que «la mère est une femme, le père est un homme» et définir le sexe comme étant uniquement celui de la naissance.
par Marlène Thomas
publié le 11 novembre 2020 à 16h16

Le gouvernement hongrois mené par le souverainiste Viktor Orbán s'attaque à nouveau aux droits de la communauté LGBT+. Mardi, un projet d'amendement a été déposé pour inscrire dans la constitution que «la base de la relation familiale est le mariage ou la relation parent-enfant. La mère est une femme, le père est un homme» et que le sexe est défini comme étant uniquement celui de la naissance. «La Hongrie protège le droit des enfants à s'identifier en fonction de leur sexe», est-il écrit dans ce projet d'amendement soumis au Parlement par la ministre de la Justice, Judit Varga.

«Environnement aimant et sûr»

Ce texte déclare également que «l'éducation est assurée conformément aux valeurs fondées sur l'identité constitutionnelle de la Hongrie et la culture chrétienne». Dans le texte en question, le gouvernement assure qu'il est nécessaire de protéger les enfants «des nouvelles tendances idéologiques modernes du monde occidental […] qui menacent le droit des enfants à un développement sain». L'une des plus importantes ONG LGBT+ de ce pays d'Europe de l'Est, la Háttér Társaság a dénoncé dans un communiqué des modifications qui «augmenteraient la stigmatisation des personnes trans et rendraient les programmes de sensibilisation LGBTQI à l'école impossibles».

Ce texte n'est qu'un exemple supplémentaire de la rhétorique anti-LGBT+ de plus en plus souvent invoquée par l'autoritaire Orbán. Depuis mai, les personnes trans et intersexes sont déjà privées de la reconnaissance de leur genre. Ces propositions de changements constitutionnels sont aussi à mettre en parallèle avec un autre projet de loi qui interdirait l'adoption pour les couples de même sexe, comme le rapporte Euronews. Selon d'autres amendements soumis au Parlement mardi, seuls les couples mariés pourraient adopter des enfants. Les célibataires devront demander l'autorisation spéciale du ministre chargé des Affaires familiales. Or, l'adoption est pour les célibataires l'un des moyens les plus utilisés par les homosexuels désirant avoir des enfants. Alors que «de plus en plus de pays à travers le monde reconnaissent que les couples de même sexe peuvent être tout aussi bons parents, la Hongrie ignore toujours que des centaines de couples de même sexe offrent déjà un environnement aimant et sûr à leurs enfants», déplore la Háttér Társaság.

«Des propositions contraires aux principes internationaux»

Selon l'ONG, le timing de ces annonces ne doit rien au hasard : «Des propositions très restrictives, contraires aux principes internationaux et européens des droits de l'Homme, ont été déposées dans les heures qui ont suivi la ratification parlementaire de l'ordre juridique spécial [pour lutter contre la pandémie de Covid-19, ndlr], à un moment où les moyens d'exprimer les opinions des citoyens tels que les manifestations n'étaient pas autorisés». Un confinement partiel entre en effet en vigueur en Hongrie ce mercredi. Par ailleurs, comme le note l'AFP, ce nouveau projet de modification de la Constitution intervient alors que Budapest s'oppose à un projet de mécanisme conditionnant le versement des fonds européens notamment au respect de la charte européenne des droits fondamentaux, qui garantit, entre autres, les droits des minorités sexuelles et de genre.

Ces annonces s'inscrivent dans un mouvement plus général de recul des droits des femmes, mais aussi de la communauté LGBT+ dans de nombreux pays prônant une vision rétrograde et conservatrice de la famille. En Europe de l'Est, le président polonais ultraconservateur Andrzej Duda a aussi fait part cet été de son intention d'interdire l'adoption aux couples homosexuels. Récemment, une décision du Tribunal constitutionnel polonais a également interdit les IVG en cas de malformation du fœtus, soit la quasi-totalité des avortements légaux. Face à la mobilisation importante des Polonaises, le parti Droit et Justice (PiS) cherchent désormais à temporiser. Sans surprise, la Hongrie comme la Pologne font partie des 32 pays ayant fièrement cosigné, fin octobre à l'Assemblée mondiale de la santé, une déclaration actant leur volonté de s'émanciper des principes internationaux sur l'IVG.

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