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SERGIO AQUINDO

Turquie : les nouveaux habits historiques du président Erdogan

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Publié le 13 novembre 2020 à 06h00, modifié le 15 novembre 2020 à 17h04

Temps de Lecture 16 min.

Sobre bâtiment de pierre grise ouvert aux vents de la steppe anatolienne, le mausolée d’Atatürk, le père des Turcs, domine le vieux centre d’Ankara et reste l’étape obligée pour les chefs d’Etat ou de gouvernement étrangers en visite officielle. Il y a là le sarcophage du fondateur de la République, en 1923, sur les décombres de l’Empire ottoman, et quelques vitrines avec des objets du « Ghazi » (le « Victorieux »), dont un exemplaire en français du Contrat social, de Jean-Jacques Rousseau, annoté de sa main. Mustafa Kemal (1881-1938) revendiquait l’héritage des Lumières et de la Révolution. Sa République, inspirée du modèle jacobin, se proclamait laïque, même si la laïcité à la turque n’a pas grand-chose à voir avec son modèle. Il s’agit d’un contrôle de l’Etat sur la religion assez semblable à celui du modèle concordataire de Napoléon et non d’une séparation de l’Eglise et de l’Etat. Ajouté dans la première Constitution républicaine en 1937, le mot y figure toujours.

« La hargne et la haine que montre Recep Tayyip Erdogan à l’encontre de la France est à la mesure de l’estime qu’avait pour elle Mustafa Kemal », rappelle l’orientaliste Gilles Kepel. L’actuel président turc entretient une relation compliquée avec la figure du fondateur de la République. S’il reste fasciné par l’homme qui forgea la nation, il hait celui qui déposa le sultan, supprima le califat, changea l’alphabet. Après dix-huit ans de pouvoir et fort d’un contrôle quasi total de son parti, le Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur), Recep Tayyip Erdogan ne cache pas sa volonté de tourner la page du kémalisme.

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Quand le « Reis », comme l’appellent ses partisans, invective son homologue français, Emmanuel Macron, l’incitant « à faire des examens de santé mentale » après ses propos contre le « séparatisme islamiste », ou encore appelle au boycottage des produits tricolores, Recep Tayyip Erdogan cherche, selon les mots de Jean-François Pérouse, auteur, avec Nicolas Cheviron, d’Erdogan. Nouveau père de la Turquie ? (Editions François Bourin, 2017), à « renforcer la nouvelle envergure qu’il est parvenu à se tailler sur la scène internationale, celle de défenseur de l’islam et de pourfendeur des supposés oppresseurs des croyants dans le monde entier ».

Dos tourné à l’Occident

De fait, les contentieux stratégiques entre Paris et Ankara sont lourds, en Syrie comme en Libye, dans le Haut-Karabakh, en Méditerranée orientale, en mer Egée. Mais si le leader turc cible autant la France, c’est aussi pour ce qu’elle représente dans l’imaginaire turc, incarnant la route vers la « civilisation » dont Mustafa Kemal et, avant lui, les réformistes ottomans avaient fait leur priorité dès le début du XIXe siècle.

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