Laïcité : Macron reproche aux médias anglo-saxons de «légitimer les violences» contre la France

Le président dénonce ceux qui « mettent un système d’équivalence » entre la mort d’un homme et la publication de caricatures. Il critique les médias, particulièrement américains, qui légitimeraient les attentats en taxant la France d’islamophobie.

 Emmanuel Macron, le 11 novembre 2020 sous l’Arc de Triomphe à Paris, pour les commémorations de l’Armistice.
Emmanuel Macron, le 11 novembre 2020 sous l’Arc de Triomphe à Paris, pour les commémorations de l’Armistice. LP/Arnaud Journois

    Alors qu'Emmanuel Macron recevra ce lundi après-midi à Paris, à la demande de celui-ci, le très trumpiste chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo, le président de la République s'exprime encore dans la presse anglo-saxonne.

    Cette fois, c'est au très influent New York Times qu'il a parlé, ainsi qu'à la revue Grand Continent, éditée par le Groupe d'études géopolitiques, une association indépendante domiciliée à l'École normale supérieure (ENS). Il y parle de laïcité avec force et douleur, regrettant le peu de soutien international après les derniers attentats endurés en France, notamment l a mort du professeur Samuel Paty le 16 octobre, et la mort de trois personnes à Nice treize jours plus tard.

    « Je ne vais pas changer mon droit parce qu'il choque ailleurs »

    « Il y a cinq ans, quand on a tué ceux qui faisaient des caricatures, le monde entier défilait à Paris et défendait ces droits ». Cette fois, « beaucoup de condoléances ont été pudiques », regrette-t-il. « On a eu, de manière structurée, des dirigeants politiques et religieux d'une partie du monde musulman - qui a toutefois intimidé l'autre, je suis obligé de le reconnaître - disant : ils n'ont qu'à changer leur droit. Ceci me choque », « je suis pour le respect des cultures, des civilisations, mais je ne vais pas changer mon droit parce qu'il choque ailleurs ».

    Le chef de l'Etat semble dénoncer la couverture des médias, dans ses propos au New York Times. Il estime que « les fondamentaux sont perdus » quand il voit « dans ce contexte, de nombreux journaux qui, je pense, viennent de pays qui partagent nos valeurs, qui écrivent dans un pays qui est l'enfant naturel des Lumières et de la Révolution française, et qui légitiment ces violences, qui disent que le cœur du problème, c'est que la France est raciste et islamophobe ».

    Après qu'Emmanuel Macron avait défendu le droit à la caricature, lors de l'hommage national rendu à Samuel Paty dans le cadre si symbolique de la Sorbonne, dans plusieurs pays musulmans, des manifestants, galvanisés par le président turc Recep Tayyip Erdogan, avaient appelé à boycotter la France et ses produits.

    Pour Emmanuel Macron, « c'est précisément parce que la haine est interdite dans nos valeurs européennes, que la dignité de la personne humaine prévaut sur le reste, que je peux vous choquer, parce que vous pouvez me choquer en retour. Nous pouvons en débattre et nous disputer parce que nous n'en viendrons jamais aux mains puisque c'est interdit et que la dignité humaine est supérieure à tout ». Répondre timidement à cela, c'est « accepter que des dirigeants, des chefs religieux, mettent un système d'équivalence entre ce qui choque et une représentation, et la mort d'un homme et le fait terroriste ».

    « Les fondamentaux sont perdus »

    « Le combat de notre génération en Europe, ce sera un combat pour nos libertés. Parce qu'elles sont en train de basculer », avertit-il.

    Début novembre, Emmanuel Macron avait répondu à un article paru dans le journal britannique Financial Times où il était accusé de « stigmatiser, à des fins électorales, les Français musulmans ». Il y avait publié une « lettre à la rédaction » pour dénoncer ces accusations.

    Le journaliste Ben Smith écrit que le chef de l'Etat français accuse les médias anglophones, et américains en particulier, de chercher « à imposer leurs propres valeurs à une société différente ». Il leur reprocherait de ne pas comprendre « la laïcité à la française - une séparation active de l'Église et de l'Etat qui date du début du XXe siècle ».