Covid-19 : mieux informés, les Australiens ont déjà dompté la seconde vague

En Australie, l’arsenal destiné à informer la population est plus important qu’en France. Une des clés de la sortie de crise, une fois la seconde vague passée.

 Les Australiens disposent de plus d’informations que les Français sur la propagation de l’épidémie sur leur territoire.
Les Australiens disposent de plus d’informations que les Français sur la propagation de l’épidémie sur leur territoire. AFP/William West

    L'Australie n'a pas attendu de se laisser déborder pour mettre en place des mesures extrêmement strictes de contrôle des déplacements, de restrictions au travail ou de traçage des cas contacts.

    Le pays a vécu deux vagues successives. Celles-ci ont été surmontées, en limitant la casse : moins de mille décès sont à déplorer. Là où la France s'approche du cap des 50 000 morts.

    Nous avons interrogé Hadrien Brassens, chef d'entreprise expatrié à Sydney. Celui-ci décrit les dispositifs en vigueur à la sortie de la seconde vague. Qui, sans pour autant esquisser un retour à la normale, permet à la population de sortir à nouveau. Dans le pays, le mot d'ordre n'est pas « contrôle du virus », mais « extermination du virus », et l'information de la population semble prendre une part importante dans le plan de bataille.

    900 morts en six mois en Australie, 900 morts en deux jours en France

    Sur le papier, la situation de la France et de l'Australie n'a pas grand-chose de comparable. Outre des bilans aux antipodes, le pays est loin d'être aussi dense que le nôtre. « Ici, même en ville, la plupart des gens vivent dans des maisons avec jardin. Clairement, le virus à moins de chance de circuler qu'à Paris », fait remarquer Hadrien Brassens, ancien parisien, en filmant par sa fenêtre.

    Il n'empêche. Le pays ne s'est jamais laissé déborder par l'épidémie. « Ici, la situation sanitaire avait près de deux semaines de retard par rapport à celle de la France au printemps et nous avons pourtant confiné en même temps », se souvient-il, tout en décrivant l'arsenal déployé : fermeture des frontières, y compris entre Etats, fermeture des bureaux, des commerces etc. Excepté l'arrivée rapide de tests, le dispositif en vigueur semblait relativement similaire au nôtre, mais mis en place suffisamment tôt.

    Entre les deux vagues, il y a eu de nombreuses alertes. « Un camionneur, un des rares à pouvoir circuler entre Etats, a fait une halte trois jours au sud de Sydney. Il a fréquenté un pub, une fête d'une trentaine de personnes. Chacun a été retrouvé, contacté, et la situation a été maîtrisée rapidement », dit-il avant de préciser que le nombre de clusters recensés est très faible, mais suffisant pour justifier le maintien de la fermeture des frontières internes.

    La détection d'un cluster à Adélaïde a par exemple justifié la fermeture de toutes les frontières moins de 10 heures après. « La nouvelle est tombée lorsque certains étaient dans un vol interne, à leur atterrissage tous les occupants ont été placés en quarantaine, même s'ils n'avaient rien à voir avec le foyer détecté », décrit Hadrien Brassens.

    Des technologies pour mieux informer et responsabiliser

    Le boulon s'est desserré une fois la deuxième vague passée. Aujourd'hui, à Sydney, on peut aller au parc, au restaurant et le port du masque n'est même plus obligatoire. Seuls les rassemblements de plus de 30 personnes sont interdits. « Globalement, les gens ont compris ce qu'on leur demandait. J'ai juste l'impression qu'au-delà d'être plus disciplinés, les Australiens sont mieux informés que les Français ».

    C'est sur le plan de la technologie que semble se faire la différence. A la description des cahiers destinés à lister les coordonnées des clients de restaurant en France, l'entrepreneur a ri. « Ici, on a tout simplement un QR code, et les gens entrent leurs coordonnées directement sur le mobile. En cas d'alerte, un message est envoyé à tous, instantanément ».

    L'information de la population va bien plus loin. « Ici les chaînes d'info signalent lorsqu'un bowling a été fréquenté par une personne positive. Outre le fait qu'il soit fermé, les gens qui y sont allés doivent aller se faire tester et s'isoler en cas de résultat positif ». En France, les foyers de contaminations, consignés chaque jour dans le système MONIC, ne sont pas rendus publics, à dessein. « Pour ne pas paniquer la population et pour que les personnes qui se situeraient à l'autre bout du département ne se relâchent pas », nous confiait Patrick Rolland, coordonnateur interrégional chez Santé publique France.

    Si « StopCovid » puis « TousAntiCovid », les applications d'alerte françaises, ont longtemps été boudées, « ici beaucoup l'ont installée. Les mentalités sont différentes, les gens étaient prêts à partager leurs données personnelles si c'était pour mieux être informés et pour mieux informer leurs voisins », a constaté Hadrien Brassens.

    En Australie, l'information passe même par les tuyaux des égouts. « Les analyses des eaux usées permettent de cartographier les résidus de virus, quartier par quartier. Ces informations sont rendues publiques, ce qui permet de savoir, où le virus circule, même faiblement », remarque le français. Là encore, ces analyses existent dans l'Hexagone, mais leurs résultats ne sont pas dévoilés

    Avec des mesures strictes et réactives, une population mieux informée et un déconfinement raisonné, la deuxième vague australienne, déjà loin, n'était en fait qu'un clapot comparé à la tempête qui frappe de nouveau le Vieux Continent.