La date lui a été communiquée au dernier moment, sans qu’elle ne puisse en référer à son avocat. De toute manière, lui aurait-on accorder le droit d’en avoir un ? Pas certain. Demain matin, à Riad s’ouvrira le procès de Loujain al-Hathloul, cette militante saoudienne dont le terrible crime serait d’avoir conduit une voiture dans le royaume de Mohamed Ben Salmane, avant que ce dernier n’ait donné son feu vert aux femmes du pays pour le faire. Un acte de haute transgression qui vaut à la féministe de 31 ans de croupir dans une prison saoudienne depuis deux ans et demi sans aucune autre forme de procès qu’une mascarade de justice tenue à huis clos pour interrompue arbitrairement il y a de cela déjà plusieurs mois.

 

Torture à l’électricité, sévices sexuels, privation de nourriture…

« Le seul verdict acceptable serait la libération immédiate et inconditionnelle de Loujain al-Hathloul », a déclaré Lynn Maalouf, responsable régionale d’Amnesty International au Moyen-Orient dans un communiqué. « Ce n’est pas une criminelle, c’est une activiste des droits humains que l’on punit tout simplement pour avoir voulu faire changer les choses. » Vouloir « changer les choses » aura coûté bien cher à la jeune saoudienne. Après avoir été arrêtée au printemps 2018 à Abu Dhabi où elle préparait un Master de sociologie, elle aurait été exfiltrée des Émirats pour être emmenée dans un centre de détention où les forces de l’ordre de son pays natal lui aurait fait subir les pires tourments. Tortures à l’électricité, sévices sexuels, privation de nourriture et de sommeil, voilà le sort que l’on réserverait aux militants des droits de l’Homme dans le royaume de MBS.

 

La fable de l’espionne qui aurait trahi son pays 

Pas étonnant que dans les rangs d’Amnesty International et de Human Rights Watch l’on se ronge les sangs à la vieille de ce procès. D’autant qu’aucune ONG ni aucun membre de la famille de Loujain n’a été autorisée à lui rendre visite depuis le 26 octobre dernier, date à laquelle la militante a débuté une grève de la faim. À quelques heures du procès, l’Arabie Saoudite maintient sa version des faits. Non contente d’avoir été surprise au volant d’une voiture, Loujain al-Hathloul serait également une espionne qui aurait trahi son pays. Mohamed Ben Salmane avait même affirmé en mars détenir des vidéos qui prouveraient le crime de la jeune femme et promis de les diffuser. Dans le royaume, comme ailleurs, personne n’en a jamais visionné la moindre seconde. C’est dire le poids des accusations et le fondement de ce procès…