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Archéologie

Etats-Unis : une première preuve directe de consommation d’hallucinogènes dans un site d’art rupestre

Des preuves d'ingestion d'hallucinogènes sur un site d'art rupestre ont été découvertes en Californie, aux Etats-Unis. Une première.

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Art rupestre: représentation d'une fleur de Datura sur le plafond de la grotte de Pinwheel Cave, en Californie.

Art rupestre: représentation d'une fleur de Datura sur le plafond de la grotte de Pinwheel Cave, en Californie. 

Crédits: Devlin Gandy

Pour la première fois, une preuve sans équivoque de consommation de plantes hallucinogènes dans un site orné d’art rupestre vient d’être révélée aux Etats-Unis. Elle a été effectuée en Californie, dans l’abri sous roche de Pinwheel Cave, au sud de Bakersfield, en bordure du territoire traditionnel du peuple amérindien Chumash.

Des vestiges de "chiques" séchées

Les archéologues avaient noté de longue date la présence, sur le plafond de ce site, d’une figure en forme d’hélice dessinée à l’ocre rouge. Celle-ci est caractéristique de l’ouverture de la fleur de datura, une plante rencontrée au Mexique et dans l’Ouest des Etats-Unis, connue pour ses puissantes propriétés psychoactives. Mais, surprise, les archéologues viennent de découvrir des vestiges de "chiques" séchées, des boulettes végétales mâchouillées, coincées dans les fissures de la cavité, à la façon de vieux chewing-gum collés !

 

Peinture d'une fleur de datura sur le site de Pinwheel Cave (Californie) (A gauche). Fleur de datura wrightii telle qu'elle se referme aux heures chaudes du jour (A droite). ©Rick Bury/ Melissa Dabulamanzi / PNAS

Dans un article publié dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), l’équipe de chercheurs a présenté l’analyse de ces substances par la méthode de la chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS). Les chiques se sont avérées contenir des alcaloïdes hallucinogènes (atropine et scopolamine) propres à la datura wrightii. Les fibres de cette délicate fleur blanche hautement toxique ont également été repérées lors d’examens réalisés à l’aide d’un microscope électronique à balayage.

Des fins spirituelles ?

Cette découverte revient sur l’hypothèse émise par certains spécialistes dans les années 1980 que de possibles états modifiés de conscience (EMC) avaient pu influencer la réalisation de certains graphismes sur les parois rocheuses. Un débat existe en effet depuis des décennies sur de possibles liens entre hallucinogènes, état de conscience altéré et art rupestre pour tenter d’expliquer la présence de certaines figures abstraites, parfois attribuées à des visions shamaniques. Toutefois, à Pinwheel Cave où ces consommations de composés psychoactifs ont été datés de 1530, les signataires de l’article ne prétendent pas que cette découverte suggère un lien direct entre absorption de datura et création de peintures rupestres, mais plutôt que ce site localisé en 1999, a pu être un lieu cérémoniel où les anciens Californiens venaient consommer du datura en certaines occasions. La fleur peinte étant là pour célébrer l’importance de la plante plutôt qu’une vision obtenue sous influence de psychotrope.

Pour David W. Robinson, archéologue, maître de conférence à l’Université du Lancashire central (UCLAN), (Royaume-Uni), le principal signataire de l’étude, la quantité de "boulettes" mâchée et le nombre d’outils en pierre taillée retrouvé à la surface du sol de l’abri sous roche, en particulier des pointes de flèches accompagnés de restes alimentaires, témoigneraient plutôt d’un lieu utilisé collectivement. Il aurait pu servir de point de rassemblement avant d’aller chasser, ou alors du datura aurait pu être consommé pour augmenter endurance et force. Des sources ethnographiques régionales font d’ailleurs référence à l’usage d’une boisson appelée toloache, confectionnée à partir de racines de cette plante. Mortelle à forte dose, la consommation de datura a pu être utilisée en tant que substance psychoactive à des fins spirituelles comme l’ayahuasca ou le peyotl. En 2019, une pochette rituelle à ayahuasca vieille de 1000 ans avait d’ailleurs été découverte dans une grotte de Bolivie (sans art rupestre) à 3900 mètres d’altitude.

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