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Une chercheuse australo-britannique a été échangée contre trois Iraniens par Téhéran

En 2019, Kylie Moore-Gilbert avait été condamnée à 10 ans de prison pour espionnage au profit d'Israël. Au cours des derniers mois, l'Iran a multiplié les échanges de prisonniers avec des pays détenant des ressortissants iraniens condamnés

Kylie Moore-Gilbert à l'aéroport de Téhéran, le 25 novembre 2020. — © EPA /IRIB
Kylie Moore-Gilbert à l'aéroport de Téhéran, le 25 novembre 2020. — © EPA /IRIB

La chercheuse australo-britannique Kylie Moore-Gilbert, condamnée pour espionnage au profit d'Israël, a salué mercredi la fin de son calvaire après sa libération acceptée par Téhéran en échange de trois Iraniens.

«Un homme d'affaires et deux citoyens iraniens, détenus à l'étranger sur la base de fausses accusations ont été libérés en échange d'un espion de double nationalité travaillant pour le compte du régime sioniste», avait annoncé plus tôt Iribnews, site internet de la télévision d'Etat, en donnant le nom de Kylie Moore-Gilbert. La télévision n'a donné aucune autre précision sur l'échange.

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Iribnews a simplement publié une vidéo sans commentaire montrant trois hommes non identifiables accueillis avec les honneurs par le vice-ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, ainsi que les quelques plans de Kylie Moore-Gilbert à l'aéroport.

Une «épreuve longue et traumatisante»

Après plus de 800 jours de détention, cette spécialiste du Moyen-Orient a reconnu que son départ d'Iran serait «doux amer» en dépit des «injustices» subies. «Je suis venu en Iran en amie, avec de bonnes intentions», a-t-elle affirmé dans un communiqué publié par le gouvernement australien, dans lequel elle rend aussi hommage aux Iraniens «chaleureux de coeur, généreux et braves». La chercheuse a aussi salué dans ce texte la fin d'une «épreuve longue et traumatisante», ajoutant que le soutien qu'elle a reçu en détention «était ce qui comptait le plus pour» elle.

Sa famille et ses proches ont fait part dans un communiqué de leur immense soulagement après les premières images montrant la jeune femme depuis sa libération, diffusées par la télévision iranienne d'Etat. Selon ces images, Kylie Moore-Gilbert est vue à l'aéroport de Téhéran aux côtés de l'ambassadrice d'Australie en Iran, Lyndall Sach.

Le premier ministre australien Sott Morrison, qui s'est entretenu avec la chercheuse, a salué cette libération. «C'est une personne extraordinairement forte, intelligente et courageuse, capable de dépasser ce calvaire», a-t-il déclaré à la télévision Channel 9.

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«Une bonne nouvelle en provenance d'Iran, c'est rare», a réagi l'organisation de défense des droits humains Amnesty International sur Twitter. «C'est un énorme soulagement d'entendre parler de sa libération.»

Un sentiment d'abandon durant son emprisonnement

L'arrestation de Kylie Moore-Gilbert, enseignante trentenaire en études islamiques à l'université de Melbourne (Australie), avait été confirmée en septembre 2019. Selon sa famille, elle avait été incarcérée plusieurs mois auparavant. Condamnée à 10 ans de prison pour intelligence avec Israël, la jeune femme a toujours nié être une espionne. «Je ne suis pas une espionne. Je n'ai jamais été une espionne», écrivait-elle.

Selon le quotidien britannique The Guardian, elle aurait été arrêtée en septembre 2018 à l'aéroport de Téhéran après avoir participé à une conférence académique en Iran. Dans des lettres sorties clandestinement de prison et publiées en janvier par le Guardian et le Times, elle disait avoir refusé une offre des Iraniens d'espionner pour leur compte.

Se sentant «abandonnée et oubliée», Kylie Moore-Gilbert évoquait également dans ces missives écrites entre juin et décembre 2019 une existence précaire et faite de privations, sans visites ni appels, ainsi que des problèmes de santé récurrents. Signant «une prisonnière politique innocente», elle demandait à être transférée dans la section générale des femmes de la prison d'Evine à Téhéran, après des mois en isolement dans une petite cellule éclairée en permanence ayant «porté gravement atteinte» à sa santé. Finalement transférée dans cette section, elle y a côtoyé l'universitaire franco-iranienne Fariba Adelkhah et l'Irano-Britannique Nazanin Zaghari-Ratcliffe.

Plusieurs échanges de prisonniers

Détenue depuis juin 2019 et condamnée à cinq ans de prison pour «collusion en vue d'attenter à la sûreté nationale» et «propagande contre le système» politique de la République islamique - des accusations qu'elle nie -, Fariba Adelkhah est détenue à domicile sous contrôle d'un bracelet électronique depuis début octobre. Depuis plusieurs mois, c'est également la situation de Nazanin Zaghari-Ratcliffe, menacée d'un nouveau procès après avoir été condamnée à cinq ans de prison sur une accusation de complot contre la sûreté nationale, qu'elle nie.

L'Iran, qui ne reconnaît pas la double nationalité, dénonce comme autant de tentatives d'«ingérence inacceptable» les appels de Paris à libérer Fariba Adelkhah et de Londres à élargir Nazanin Zaghari-Ratcliffe.

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Au cours des derniers mois, l'Iran a procédé à plusieurs échanges de prisonniers avec des pays détenant des ressortissants iraniens condamnés, en attente de procès, ou menacés d'extradition vers les Etats-Unis.