Archéologie : Découverte d’une exceptionnelle tombe princière de l’âge du Bronze dans le Calvados

Archéologie : Découverte d’une exceptionnelle tombe princière de l’âge du Bronze dans le Calvados
Fouille en cours d’une des sépultures de l’âge du Bronze située à côté de la tombe princière © James Villaregut, Inrap

Une tombe princière de l'âge du Bronze ancien a été découverte par une équipe de l'Inrap dans la Plaine de Caen à Giberville.

En amont de la construction d’un lotissement à Giberville, une fouille préventive avait été prescrite par la Drac Normandie. Le chantier de fouilles, qui concernait un terrain de près 4,5 hectares, vient de s’achever dans la Plaine de Caen. Menée par l’archéologue Emmanuel Ghesquière et une équipe de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), l’opération a révélé des vestiges datés du Mésolithique jusqu’aux périodes contemporaines. Parmi les découvertes figure un tumulus princier de l’âge du Bronze ancien (1 800 à 1 400 avant notre ère). Cette découverte témoigne d’un moment singulier durant lequel se développe le phénomène des sépultures individuelles et la hiérarchisation sociale au sein même du monde funéraire.

Une tombe princière mise au jour

La fouille a livré quatre ensembles funéraires datés du Bronze ancien. L’un d’entre eux contient une tombe exceptionnelle, de forme trapézoïdale, datée entre 1800 et 1600 ans avant notre ère. Aucune trace du monument funéraire qui surmontait probablement son caveau n’est parvenue jusqu’à nous. À l’intérieur, le défunt – dont il ne reste que deux os des jambes – était allongé sur le dos, la tête orientée vers l’est, et accompagné d’un riche matériel funéraire : un poignard en bronze, des fragments de parures en ambre, originaire de la Baltique, et 14 pointes de flèche perçantes, dites armoricaines, finement taillées dans le silex. Ce mobilier a pour vocation d’accompagner le défunt dans l’au-delà et il se veut représentatif de son statut social. La richesse des artefacts exhumés lui vaut l’appellation de « tombe princière ».

Poignard en bronze retrouvé dans la tombe princière de Giberville, daté de l’âge du Bronze ancien (vers 1800-1600 ans avant notre ère), de type armoricain (sous-type Longues ou Bourbiac) © Bruno Bell

Poignard en bronze retrouvé dans la tombe princière de Giberville, daté de l’âge du Bronze ancien (vers 1800-1600 ans avant notre ère), de type armoricain (sous-type Longues ou Bourbiac) © Bruno Bell

L’élite de l’âge du Bronze

Les éléments découverts dans la tombe princière constituent à bien des égards des biens de prestige. La maîtrise du silex, la présence de matériaux dits exotiques mais aussi la fabrication d’objets de parure signalent le rang social de son détenteur. Les armatures de flèche exhumées sont de type ogival et à ailerons longs. Elles constituent l’une des spécificités de l’âge du Bronze ancien de l’ouest de la France. Hormis au Danemark, dans le Wessex (Angleterre) et en Armorique, peu de communautés valorisent au cours de cette période la production d’objets en silex très standardisés. La fabrication de ces fines flèches, produites par pression à l’aide d’une pointe en cuivre, nécessite une haute technicité. Elles sont l’apanage d’une élite sociale, tout comme le poignard en bronze mis au jour. De type armoricain, disposant d’une longue lame de 27 cm et d’une garde à 6 rivets, celui-ci est un attribut de l’homme adulte. Autre témoignage de richesse, des fragments de parures en ambre, provenant de la Mer Baltique, ont également été retrouvés à Giberville. Rares sont les sépultures possédant ce type de mobilier. À l’heure actuelle, seules trois ont été découvertes dans la région.

Pointes de flèche de type armoricain (sous-type Limbabu, ogivales longues) retrouvées dans la tombe princière de l’âge du Bronze ancien (vers 1800-1600 ans avant notre ère) de Giberville © Clément Nicolas

Pointes de flèche de type armoricain (sous-type Limbabu, ogivales longues) retrouvées dans la tombe princière de l’âge du Bronze ancien (vers 1800-1600 ans avant notre ère) de Giberville © Clément Nicolas

Du Néolithique à l’âge du Fer

À proximité de la tombe princière, un enclos d’habitation de la même période (1700-1500 ans avant notre ère) a également été mis au jour. Il contenait, dans ses fossés, des vestiges liés à l’activité domestique  : des ossements d’animaux consommés, des récipients en céramique mais aussi des outils de mouture, qui permettent le plus souvent de transformer les céréales en farine, et des usteniles en silex.

Enclos de l’âge du Bronze ancien, contemporain de la tombe princière et des groupes funéraires trouvés sur le site de Giberville © Emmanuel Ghesquière, Inrap

Enclos de l’âge du Bronze ancien, contemporain de la tombe princière et des groupes funéraires trouvés sur le site de Giberville © Emmanuel Ghesquière, Inrap

Une nécropole de l’âge du Fer a aussi été détecté. Elle est composée de 45 tombes datant de la période gauloise (52 av. J.-C. à 486 ap. J.-C.). Fait singulier, elle contient des inhumations d’individus de tous les âges, qui arborent, pour certains, des éléments de parures en bronze, des bracelets en lignite mais aussi des fibules en bronze et en fer.

La fouille a par ailleurs révélé un dispositif de chasse astucieux. La faune des environs, notamment le gros gibier (cerfs, aurochs, chevreuils, sangliers), était piégée dans de vastes fosses « en Y » appelées Schlitzgrüben, longues de 3 à 5 mètres. Quarante de ces structures creusées, ayant servi dès le début du Néolithique jusqu’à l’âge du Bronze final (5000 et 1000 ans avant notre ère), ont été identifiées sur le site.

Fosses de chasse de type Schlitzgruben © Emmanuel Ghesquière, Inrap

Fosses de chasse de type Schlitzgrüben © Emmanuel Ghesquière, Inrap

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