La France souffre d'excès de socialisme

TRIBUNE. La crise sanitaire révèle les faiblesses d'un pays suradministré et qui préfère trop souvent l'assistanat plutôt que l'entrepreneuriat.

Par William Thay et Emeric Guisset

Illustration du ministère de l'Économie et des Finances, quai de Bercy, Paris, France.
Illustration du ministère de l'Économie et des Finances, quai de Bercy, Paris, France. © Nicholas Orchard / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Temps de lecture : 5 min

En entrant à l'Élysée en 1981, les socialistes auront laissé de leur passage un legs encombrant, une idéologie destructrice, le socialisme. Si la gauche a ensuite perdu des élections, elle aura réussi à transformer durablement à la fois le mode de fonctionnement de l'État et la notion de travail. Nous avons manqué notre entrée dans la mondialisation en perdant le combat idéologique en faveur de la bureaucratie et de la baisse du temps de travail conduisant à une logique moins productive. Dès lors, la France n'a subi qu'une succession de crises et un long déclin. Renouer avec les « jours heureux » nécessite le courage d'abandonner notre dogme socialiste pour enfin changer de paradigme et en finir avec cette pensée.

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L'échec de l'État social obèse et bureaucratique

Les politiques menées depuis 1981 ont conduit à un accroissement continu du poids de l'État. Alors que les années 1980 marquent une rupture avec les politiques keynésiennes, mises en échec avec les deux chocs pétroliers, l'État a continué de grossir alors que les autres pays avaient entamé le chemin inverse. Ainsi, le niveau de dépenses publiques a évolué de 46 % du PIB en 1980 à près de 56 % actuellement, avec notamment une hausse importante des dépenses sociales (24,5 % du PIB en 1981, 31 % en 2019). Dès son élection, François Mitterrand ambitionne de mettre en œuvre un vaste programme de nationalisation et de réforme de l'État pour transformer en profondeur la relation entre la société et l'État. Malgré l'échec de cette politique et le tournant de la rigueur de 1983, cette rupture a ancré l'idée que lutter contre les inégalités, c'est augmenter le poids de l'État-providence, et notamment des politiques sociales, au détriment de la production affaiblie par son manque de compétitivité.

Conséquence de cette idéologie, le socialisme a mis en œuvre la prise de pouvoir de la bureaucratie, par le poids croissant des fonctionnaires et de l'État dans la maîtrise du pays. Ainsi, le nombre de fonctionnaires a augmenté de 40 % entre 1981 et 2018, alors que, dans le même temps, la population n'a augmenté que de 18 %. De plus, la haute administration a profité au renoncement du pouvoir politique à accomplir sa mission pour acquérir des responsabilités supplémentaires, comme le souligne Chloé Morin dans Les Inamovibles de la démocratie. La technocratie peut ainsi influer de façon décisive sur le pouvoir politique pour édicter des décrets de plus en plus absurdes et disposer de l'argent public avec une efficacité très contestable. En effet, alors que nous assistons à une augmentation des prélèvements obligatoires (48,8 % du PIB), de la dépense publique (56,5 %) et des dépenses sociales (31 %), nous voyons également un accroissement des inégalités, de la pauvreté, et une moindre qualité et quantité des services publics.

Paralysée par l'État profond, qui n'a pas forcément intérêt au changement, la France doit aussi son déclin au fait qu'elle a fait primer l'égalité sur la liberté et la nation. Le socialisme a transformé la relation au travail en rompant avec une tradition de la gauche depuis l'échec de 1981 illustré par le tournant de la rigueur de 1983. La mondialisation a en effet rendu inefficace les remèdes keynésiens classiques qui ont fait le succès de la gauche dans le monde pour obliger les pays à adopter des politiques néolibérales sous l'impulsion de Reagan et Thatcher dans les années 1980. Il est désormais difficile de faire cohabiter le souhait d'égalité et la productivité. Sous l'impulsion des socialistes, nous avons préféré la première option au détriment de la seconde, alors que les autres pays européens ont fait l'inverse. Cet arbitrage nous a ainsi conduits à faire porter le poids des dépenses sociales principalement sur le travail, alors que le nombre d'actifs diminue (hausse du chômage et vieillissement de la population), réduisant drastiquement notre compétitivité et notre espoir de rebond.

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La crise sanitaire peut faire tomber le socialisme

La crise sanitaire a révélé des failles profondes du système français basé sur notre faiblesse productive et l'inefficience de notre dépense publique. Notre manque de capacité industrielle nous a ainsi été préjudiciable lorsqu'il a fallu produire en urgence du matériel de production. Cette baisse progressive de nos capacités industrielles associée à notre dépendance stratégique ou non à des pays extérieurs doit impérativement être corrigée à partir d'une politique économique plus compétitive. De plus, notre système de santé, supposé être l'un des meilleurs du monde, a ainsi été mis en saturation rapidement et n'a pas tenu la comparaison face au modèle allemand. Pourtant, nous dépensons le même montant par habitant que nos voisins, mais nous disposons de moins de lits de réanimation, et d'un personnel soignant moins bien rémunéré. Ces points de comparaison offrent ainsi une légitimité supplémentaire pour mettre en place des réformes systémiques pour un changement de paradigme.

La crise économique et sociale découlant de la crise sanitaire ne doit pas être l'occasion de voir ressurgir les vieilles solutions socialistes. Les mesures keynésiennes conservent une pertinence dans le pic de la crise à travers une hausse des dépenses publiques comme le chômage partiel, ou par les stabilisateurs économiques, mais elles ne permettent pas de gérer durablement la relance. Ce constat a notamment déjà été tiré après l'échec du plan de relance mené par Mitterrand puisqu'il finançait l'industrie allemande à partir des fonds du contribuable français. De plus, la socialisation des pertes résultant des choix de confinement, avec de l'argent que nous n'avons pas, restreint encore davantage nos moyens d'action pour nous relancer. Le retour des vieilles lubies socialistes, comme celui de l'ISF, ne suffira pas à financer cette crise. À titre d'exemple, il faudrait 100 années d'ISF pour couvrir le coût du seul premier confinement. La seule solution est de payer cette crise par l'effort collectif du travail.

Lire aussi Confinement : « Quoi qu'il en coûte », saison 2

On ne peut pas résoudre un problème avec le même mode de pensée que celui qui a généré ce problème. La crise sanitaire peut même être l'occasion de rompre avec le dogme socialiste qui a gouverné la France depuis une quarantaine d'années pour construire un nouvel horizon. En finir avec cette gestion socialiste et choisir le travail plutôt que l'assistanat, c'est le seul choix qui est digne de nous et c'est le seul choix qui est digne de la France.

William Thay est président du Millénaire, think tank spécialisé en politiques publiques et travaillant à la refondation de la droite. Emeric Guisset, secrétaire général adjoint du Millénaire

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Commentaires (69)

  • mugen808

    Je ne peux qu applaudir des deux mains ! Tout en me demandant si les commentaires des lecteurs seraient aussi positifs sur Libération par exemple ?

  • Delouche

    Enfin le mal qui ronge le pays depuis plus de 40 ans, et mis à jour.
    De plus en plus de Français ont pris conscience de l’état léthargique dans lequel les socialistes ont maintenu la France, pour pouvoir vivre comme des seigneurs et maintenir leurs privilèges, avec l’aide de certains syndicats, qui appliquaient la loi du toujours plus. Ainsi qu’une catégorie de médias qui fort de cette situation se faisaient plaisir à en rajouter.
    Il va falloir se serrer la ceinture et relancer le travail, qui depuis JOSPIN a quitté la France par le biais des décentralisations.
    Nous ne sommes pas encore sorties du tunnel socialiste. Ils ont fait des petits, qui avancent masqué.

  • dutch1

    Vous prêchez des convaincus !

    Ca ne sera pas facile tant que la France pourra emprunter... Il s'agit d'une addiction.